Depuis leurs débuts, l'informatique et Internet ont fait partie d'un univers exclusivement masculin. Le sexe dit faible, rebuté qu'il était par la technique mais aussi par l'absence de contenus et de services qui lui étaient destinés, se faisait rare sur le réseau. La fameuse ménagère de moins de cinquante ans, courtisée par tous les acteurs de la grande consommation de la planète, se faisait attendre, jouait les capricieuses en regrettant le manque de convivialité des sites et l'absence de sites répondant à ses intérêts.
Mais tout cela ferait désormais partie du passé? En effet, les chiffres le clament haut et fort: déjà, les Internautes femmes sont plus nombreuses
que leurs homologues masculins outre Atlantique (50,4% contre 49,6% - source Mediamark, MMXI), et la tendance est également en train de s'inverser de ce côté-ci de l'Atlantique: en France, même si le ratio femmes/hommes était encore de 40/60 en août, il faut noter que 53% des nouveaux internautes (connectés depuis moins de trois mois) sont des femmes (source Novatris, 9/2000).
Le Web aurait-il appris à parler aux femmes? Ou est-ce que ce sont-elles qui ont passé outre la barrière technologique?
Ne serait-ce pas plutôt une question de génération' Les nouveaux connectés sont jeunes, et l'école prônant la net-parité pour l'accès à Internet, les jeunes filles/femmes n'ont pas cet a priori négatif de leurs aînées vis-à -vis du réseau. Les chiffres, là encore, parlent: le profil de l'internaute, qui était un homme de 25-35 ans, CSP+, s'atténue. La pyramide des âges s'élargit chez les internautes, les très jeunes et les plus de 50 ans enregistrant les taux de progression les plus importants, avec les femmes. Celles-ci, plus que leurs compagnons, utilisent Internet à des fins pratiques: qui ne se souvient pas de ces "cyber-mamies" qui s'échangeaient (faisant fi des droits d'auteurs) des patrons par Internet?
Le Web se féminise donc, et les sites destinés aux femmes se sont mutipliés en quelques mois: www.vivrefemme.com, www.newsfam.com,
www.femmeonline.com, www.aufeminin.com. Sans oublier les sites plus ciblés, comme www.lyloo.com, qui vise plus particulièrement les adolescentes.
Au programme de ces sites, un inventaire qui ressemble fort aux sommaires des magazines féminins: mode, shopping, santé, beauté, couple, astrologie, cuisine, carrière, enfants, sorties, voyages, déco, tests-vérité, combines de copines, secrets de nanas et autres bons plans.
Mais comment? Les femmes seraient-elles à ce point futiles qu'il a fallu attendre qu'elles retrouvent leurs sacro-saintes fiches cuisine et autres conseils de la psychologue spécialiste des problèmes de couples pour enfin daigner ouvrir un browser? Non, bien évidemment: le foisonnement de ces sites féminins est davantage un indicateur de la présence de plus en plus forte des femmes sur le réseau qu'un argument pour qu'elles se connectent.
Mais les vieux schémas ont la vie dure: dans l'univers de la nouvelle économie, les entrepreneuses se font encore rares. Bien sûr, il y a les "stars", comme Orianne Garcia (co-fondatrice de Caramail), Carole Liscia (directrice marketing de Liberty Surf), Cécile Moulard (ex-Carat Multimedia travaillant maintenant chez Atos-Origin), mais elles sont l'arbre qui cache la fôret (d'hommes). Là encore les chiffres sont sans appel: selon l'Agence Pour la Création d'Entreprises (APCE), 15 % seulement des entrepreneurs dans le domaine des nouvelles technologies seraient des femmes, contre 30 % tous secteurs confondus.
Il faut ajouter à cela que les rares femmes à la tête de start-up sont souvent utilisées comme faire-valoir de leur entreprise: les médias et le public s'intéressant davantage à la soi-disant fondatrice, qu'aux aléas du cours de bourse de la société qu'elle dirige. La société Marimba, à la grande époque du " push " (dans les années 96-97), avait été la première à utiliser cette astuce marketing, qui avait pris la forme d'une charmante jeune femme multipliant les interviews à la presse, pour faire monter la cote de la société.
Aujourd'hui, juste retour des choses, les sites féminins ont essentiellement été créés à l'initiative de femmes, à la recherche de sites qui leur correspondent vraiment. Cer-taines, comme la porte parole du site FemmeOnline.com, ne connaissaient encore rien d'Internet il y a à peine quelques mois. Preuve que la technique n'est pas le plus important, le sens des affaires et le bon sens étant bien plus la clé du succès.