Après l’intervention d’Herman Van Rompuy et de Xavier Bettel, une table ronde s’en est suivie. (Photo: Licence C.C.)

Après l’intervention d’Herman Van Rompuy et de Xavier Bettel, une table ronde s’en est suivie. (Photo: Licence C.C.)

Il a beaucoup été question d’économie dans son discours d’état des lieux de l’Union européenne. Après les années de crise, «l’économie va mieux. Nous avons gagné plus de 6 millions d’emplois depuis 2014. Qui aurait pu dire ça en 2013? Le niveau de confiance des ménages est le plus élevé depuis 17 ans, la zone euro est plus forte qu’elle ne l’était fin 2010 ou 2012.»

Les rapports de force ne sont plus dictés par le pouvoir militaire, mais par l’économie, a estimé le Belge: «Le commerce est devenu un facteur déterminant. Et c’est là que l’UE est en position de force, car elle peut parler d’une seule voix.» La crise de la zone euro a finalement été pour lui salutaire: «Une monnaie commune doit avoir une politique économique commune.»

Mais si l’embellie économique ravit le politicien belge, ce dernier rappelle néanmoins que dans le contexte d’une population vieillissante, l’UE va devoir trouver des solutions: «La croissance n’est pas assez importante pour payer les systèmes de sécurité sociale, 2% de moyenne actuellement ne suffiront pas.»

Le sentiment d’appartenance est plus fort.

Herman Van Rompuy (ancien président du Conseil européen)

Sur le plan de la politique internationale, les choses ont bien changé depuis qu’Herman Van Rompuy n’est plus aux affaires (il était Premier ministre de Belgique de 2008 à 2009, et président du Conseil européen de 2010 à 2014): «Nous avions une relation harmonieuse avec Barack Obama… En quelques années, l’échiquier mondial a complètement changé. Nous devons rester fermes sur nos principes, mais toujours ouverts au dialogue.»

C’est comme si le Brexit avait réveillé l’esprit d’appartenance européen sur le continent. «Il y a eu une véritable prise de conscience, on a réalisé que le fait de quitter l’UE et la zone euro serait un facteur d’instabilité. Le résultat est que le sentiment d’appartenance est plus fort, même les populistes acceptent désormais l’idée européenne.»

Les populistes restent en embuscade

Mais si ces derniers semblent devoir compter avec l’Union européenne, les populistes restent en embuscade. Pour Herman Van Rompuy, les résultats économiques des pays ne peuvent pas être des arguments de campagne seuls. Des pays comme l’Allemagne ou encore les Pays-Bas ont sanctionné dans les urnes les pouvoirs en place alors qu’ils affichent une belle santé économique. «Les populistes n’ont pas perdu la guerre. Endéans cinq ans, il faut prouver que l’on peut s’attaquer aux racines profondes du populisme. Il faut que l’UE offre de la protection, sinon on se réfugie dans le protectionnisme.»

Concernant le Brexit en lui-même, Herman Van Rompuy a parlé d’«amputation politique» pour l’UE, tout en remettant les choses dans leur contexte. Avec une adhésion relativement tardive (1973), le Royaume-Uni a rejoint l’aventure européenne une génération après les pionniers du traité de Rome de 1957. «Ils n’étaient plus au cœur des décisions majeures, ne faisant partie ni de la zone euro, ni de la zone Schengen, c’est le pays le moins intégré de l’UE.»

Même avec les avancées annoncées vendredi dernier sur les négociations entre le Royaume-Uni et l’UE, Herman Van Rompuy craint que les négociations soient trop longues et complexes pour arriver à un accord d’ici au 29 mars 2019, jour de la séparation effective: «Ils ne seront pas prêts pour 2019, donc il faudra couvrir une période de transition, mais ils n’auront pas assez de temps pour cela non plus. La seule solution est de continuer avec ce qui existe maintenant, c’est-à-dire l’union douanière.»