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? plutôt que vivre pour manger" dit le proverbe. Dans les affaires également, ce précepte compte: emmener un client prospect ? partenaire au restaurant peut s'avérer très utile

Certains y vont plus souvent que d'autres. Beaucoup y vont pour leur plaisir, une fois la journée de travail achevée. D'autres y vont pendant cette même journée de travail, pour ce travail justement. Le repas d'affaires, s'il a beaucoup évolué ces dernières années, reste encore une pratique régulière des hommes d'affaires. Les professionnels de la restauration le confirment.

Construire une offre

C'est sur le temps de midi qu'une bonne partie de ces repas se font. Les restaurateurs, de fait, sont attentifs aux différents critères qui peuvent attirer dans leurs murs ces consommateurs particuliers. Guy Tabourin, du Chiggeri, reconnaît ainsi réfléchir sur la façon de les séduire: "C'est une bonne partie de notre clientèle, on ne peut pas les ignorer! Leur plaire dépend de nombreux éléments, il est donc difficile de trouver celui qui est véritablement crucial. Notre approche s'affine au fur et à mesure des années, on voit des habitudes se dessiner".

Des exemples? "Notre restaurant est très demandé le soir. Ce sont des repas plutôt festifs, alors qu'au repas de midi les clients sont calmes, sobres". En conséquence, on varie l'offre, notamment en proposant une gamme de menus de midi pour 'toutes les bourses', entre 12 et 56 Euro. Connu pour sa carte des vins plus que généreuse ? pléthorique? ? le Chiggeri l'intègre dans son offre de services.

Si l'on sort, dans un tel contexte, du repas d'affaires en 'tête à tête', on peut faire appel à cette caractéristique lorsqu'il s'agit de réunir un petit nombre de personnes. "Je me souviens d'une entreprise qui avait demandé un repas pour une trentaine de personnes. Je m'étais excusé en leur disant que, ce soir-là, on avait prévu une dégustation de vins. Elle m'a répondu que non, c'était 'génial', c'était exactement ce qui l'intéressait! 'Ca change!' Nous nous sommes rendus compte que c'était là que se posait notre vraie spécialité".

Le vin, en plus, peut permettre d'engager une conversation, une communication plus informelle entre ceux qui partagent le repas: "Sur le sujet du  vin, il est facile de communiquer avec le client. À midi, même lors de repas classiques, on peut en proposer. Quand les clients deviennent des habitués, ils osent pour la plupart demander un vin 'à l'aveugle'. On connaît leurs goûts, on connaît leur budget, on s'auto-adapte. Pour la personne invitée, cela signifie beaucoup. Il est dans un lieu où son hôte se fait reconnaître. De plus, dans ces cas-là, on s'arrange pour proposer des vins qui vont plaire à la fois au connaisseur et à l'amateur un peu novice. On surprend les gens avec des régions ou des endroits. Dans un repas, on remarque souvent qu'entre les personnes, le vin est un très bon sujet pour commencer à discuter. C'est un premier intérêt commun sur lequel on peut se mettre à échanger. Il n'est pas forcément facile de discuter avec une personne que l'on ne connaît pas, de trouver des sujets de conversation'.

Au restaurant Speltz, 'institution' de la gastronomie en général et du repas d'affaires en particulier, l'offre elle aussi se doit d'être pensée. Carlo Speltz raconte: "Nous avons ouvert ce restaurant à la fin des années 80. C'était la fin du boom bancaire. À l'époque, nous étions fermés le samedi et le dimanche, cela éliminait naturellement une grande partie de la clientèle individuelle. Depuis quelques temps, nous avons décidé de diversifier notre clientèle, en essayant de faire venir des gens plus jeunes, ceux qui ne portent pas de cravate; pour cela, nous avons notamment commencé à ouvrir le samedi soir".

C'est dans la même démarche que M. Speltz tient à suivre sa clientèle et à lui proposer des nouveaux produits, mélange de tradition et d'innovation: "Un patron se doit d'observer et de réagir vite aux nouvelles attentes de sa clientèle. Grâce à l'informatique, nous avons un rapport mensuel des commandes. Les plats de légumes se sont par exemple imposés à une très grande vitesse. Ceci étant, le Speltz est quelque part une institution. Cette maison existe depuis 50 ans. Il y a de vieilles boiseries, nous sommes restés dans le lieu, il faut rester en partie au moins dans la tradition. Les gens viennent y chercher quelque chose, nous devons le leur donner. Dans cette tradition, il n'est pas interdit d'innover. Nous avons par exemple proposé un sorbet de betteraves rouges. Nous pouvons proposer beaucoup, si nous ne commettons pas d'erreurs de goûts".

Le Club Monnet, lui, propose d'autres services. On peut y faire des repas d'affaires, mais pas uniquement. En tant que Club, sa palette de services a vocation à 'satisfaire le membre'. Claudia Colantonio explique ainsi la présence des salons privés, permettant une discrétion maximale: "Pour être servi dans nos salons, le tarif est le même que directement dans le restaurant. Nous y avons la carte, mais nous pouvons également faire des propositions originales. Par exemple, si un repas dépasse une dizaine de personnes, nous privilégions les banquets ? buffets. Cette solution a un intérêt dès lors que le timing des rencontres est plutôt serré. Les membres ont toujours la priorité. On ne leur fait pas payer de frais de réservation, on les privilégie pour réserver les salons. Les non-membres, eux, se voient facturer les réservations de salles".

Entre tradition et modernité

Les évolutions peuvent se faire de nombreuses manières: sociologique, mais également quasi géographique... Carlo Speltz, ainsi, a vécu la montée en puissance du Kirchberg comme quartier d'affaires: "Le développement du Kirchberg a changé les entreprises qui viennent manger ici. Dexia, la BGL, les grandes banques allemandes sont parties. Au centre, nous avons eu de nouveaux clients. On a senti cette évolution, ces départs, nous avons réagi en nous adaptant".

Un repas d'affaires peut avoir lieu avant, pendant ou après des négociations. Il peut se dérouler entre des personnes qui se connaissent. Il peut se dérouler également entre deux personnes qui ne se connaissent pas du tout. D'où, pour certains, le choix de menus classiques. Guy Tabourin est clair: "Les demandes des repas d'affaires sont très classiques. Les invitants ont peur d'oser. Ils osent déjà en amenant les gens dans notre lieu, où la décoration et l'ambiance sont originales. Les repas d'affaire sont ceux qui commandent le plus de foie gras et de filet de b'uf".

Une des évolutions typiques de ces dernières années est le raccourcissement du temps passé à table dans un repas d'affaires. Guy Tabourin l'a très clairement constaté: "Le temps des repas d'affaires diminue très nettement. On boit également moins: si, avant, on pouvait voir des repas avec 2 ou 3 bouteilles, aujourd'hui on n'en consomme plus qu'une seule". Cependant, aller rapidement ne signifie pas aller trop vite: "Nous ne privilégions pas la vitesse de service. Si le client veut être servi rapidement, il doit le dire? nous pensons en fait que vitesse et plaisir ne vont pas ensemble'"

Carlo Speltz confirme: "On n'est plus à l'époque des repas d'affaires durant des heures. Aujourd'hui, la qualité et la vitesse sont deux critères importants. Les gens sont plus jeunes, ils ont plus d'ouverture. Je suis quelqu'un d'impatient. J'ai horreur des dîners qui traînent. Si je veux traîner, c'est moi qui en prends la décision: je le fais en fin de repas, avec le café, les digestifs. Quelle horreur de recevoir son premier café à minuit! Si un client précise qu'il est pressé, il risque d'être surpris chez nous. Nous avons une vitesse de service très rapide à ce moment-là!"

Son de cloche complémentaire au Club Monnet: installé au Kirchberg, il 'dessert' de nombreux bureaux alentours, avec un accès plus que facile, notamment grâce à un parking réservé: "Les gens se lassent d'aller au restaurant. Par rapport à nos collègues de la ville, nous avons l'avantage sur le temps de midi d'avoir un parking suffisant, de pouvoir facilement expliquer comment nous trouver, d'être à 5 minutes de l'aéroport. De plus, comme le service est personnalisé, si jamais notre membre est en retard à son rendez-vous, nous pouvons nous occuper de son invité, lui offrir à boire, l'installer, le mettre à l'aise".

Chez Speltz aussi, on fait évoluer son offre: "Parmi les nouveautés, nous avons eu celle de voir plus de dames parmi nos clients. Il est aujourd'hui régulier que ce soit elles qui choisissent le vin ? un bon vin. Par contre, le cigare reste encore plus une pratique masculine? Encore que? deux de mes clientes fument le cigare! L'assiette aussi a évolué: cela fait environ 10 ans que l'on a vu des gens nous demander une 'salade mixte'. Un telle demande posait à l'époque un problème au chef, mais il faut se mettre à la place du client: il mange, lui, chaque jour au restaurant. Ce n'est pas si facile que ça! Il y a 7 mois, nous avons eu un nouveau chef, qui avait travaillé dans de grandes maisons françaises. Nous avons essayé de trouver un plat attractif qui puisse faire office de remplacement à cette 'salade mixte'. Nous en avons trouvé un, qui a eu un succès retentissant. Mais, à côté de cela, on vend toujours autant de foie gras? Ca se vend comme des petits pains! Ce sont des grands plaisirs que l'on n'a pas disponibles à la maison'.

Etablissement plus récent, le Club Monnet a pourtant déjà vu des évolutions dans les pratiques de ses clients: "Nous remarquons que la décision de venir utiliser le Club est de plus en plus tardive. En début de semaine, nous avons trois salons libres chaque jour. À la fin de la semaine, ils auront tous été utilisés chaque jour. La réservation pour les groupes de 3, 4, ou 5 personnes se fait presque systématiquement en last minute. Même des groupes de 15 ou 20 réservent de cette manière-là ? environ 1 par semaine, précise Herbé Ball. Cette irrégularité des réservations est typique des affaires aujourd'hui: on annule tout ce qui n'est pas priorité et, au dernier moment, on utilise le déjeuner pour travailler, pour utiliser toutes les périodes de temps disponibles".

Le service, le service

Au Chiggeri, on a choisi de couvrir le maximum de demandes et de besoins. On a choisi également de ne pas renoncer à son 'âme': "Notre salle est 'à côté' de ce qui est connu. Nous n'avons pas de nappe sur nos tables! Cela fait que nous ne laissons pas indifférent ? que ce soit en bien ou en mal! Nous n'avons pas de macarons, nous ne faisons pas de chichis". En plus du vin, dont on a déjà parlé, le Chiggeri joue également sur les horaires d'ouverture et la palette d'offres: "Grâce à nos différents espaces, nous sommes à même de fournir une espèce de service 'all in one'. Il y a tellement de cafés, de bars, qui ferment à 1h00 du matin! Nous sommes ouverts jusqu'à 3h00, ce qui, dans le quartier centre, nous laisse pour ainsi dire seuls".

Une offre adaptée ne doit pas être gâchée par un service inapproprié: "Pendant le service, nous demandons au personnel de ne pas le différencier entre les différentes tables. Nous devons soigner tous nos clients de la même manière. Il arrive quelquefois qu'un ministre ou une autre personnalité vienne manger ici, et le personnel ne les connaît pas. C'est une chose que le client apprécie: être servi comme un client normal, comme les autres!" Ce type de service indifférencié est d'autant plus 'facile' à mettre en place que certaines fois les apparences sont trompeuses: "On ne sait jamais pourquoi les personnes viennent. Repas entre amis? Repas d'affaire? La tenue vestimentaire ne veut rien dire. Certains employés du secteur financier débarquent encore en cravate, mais c'est un repas entre amis. D'autres, notamment pour les repas entre Anglais, arrivent en casual, mais ont des repas très sérieux".

Chiggeri, Speltz, objectifs identiques. Carlo Speltz définit en fait ainsi son métier: "Notre travail, c'est de reconnaître l'homme d'affaires qui veut partir vite et le couple de passage, qui veut prendre son temps pour déjeuner. Nous ne devons pas dire 'nous sommes un restaurant d'affaire, le repas est à évacuer en une heure systématiquement', mais uniquement quand c'est le cas. Il arrive que dès le premier contact, nous sachions qu'il s'agit d'un repas d'affaires. Au moment de la réservation, c'est la secrétaire qui réserve au nom de l'établissement, pour M. X. On nous dit à qui envoyer la facture, tout est rapide et transparent".

Cette reconnaissance ne doit pas être ostentatoire, encore une fois, et doit garantir la discrétion. Claudia Colantonio, du Club Monnet, précise bien l'importance de l'installation de la salle: "Pour les déjeuners d'affairres, nous avons le Bistrot, mais également le restaurant gastronomique. Entre les tables, nous mettons un maximum d'espace, ce qui garantit un maximum de discrétion des discussions". Pour la discrétion, le client peut d'ailleurs être particulièrement gâté au Club, si l'on considère l'existence de certains salons privés, réservables gratuitement par les membres: "La pratique du client varie selon le but. On peut être vu et rester discret. On peut ne pas être vu. Certaines choses peuvent se passer très vite, à très court terme. La secrétaire nous appelle et nous dit que M. X a rendez-vous au Club et que, si  possible, il aimerait avoir un salon privé, pour deux heures".

Démarcher les entreprises?

Devant l'importance de la clientèle d'affaires, certains restaurateurs décident de prendre les devants. Au Chiggeri, on a engagé une personne dont la mission est de partir à la rencontre de ces entreprises. "Elle va leur faire connaître le Chiggeri, leur donner envie de jouer la carte de la différence. Surprendre par la carte des vins, bien entendu, mais également par l'assiette, au deuxième étage. Ce que nous aimerions devenir, c'est un partenaire pour les entreprises. Leur faire comprendre que nous pouvons organiser des repas de salariés, comme des repas d'affaires. Nous sommes ouverts à toute demande".

D'autant plus que faire venir une entreprise n'est pas facile. En plus de la qualité de la nourriture et de la boisson, d'autres critères entrent en jeu: "Aborder les sociétés est quelque chose de difficile: il faut trouver la personne concernée? Il y a beaucoup de potentiel sur le temps de midi. Nous nous sommes agrandis, nous sommes toujours en progression. L'idée est d'offrir un confort supplémentaire et, pourquoi pas, de créer un salon à cigares. La situation est très délicate. Tant que nous ne réussirons pas à proposer un tel salon, nous aurons un problème".

Hors de question, pour autant, de ne plus faire 'que' du repas d'affaires; on reste dans un restaurant. "Certains restaurants ont une équipe de 2 ou 3 commerciaux. D'autres ont bâti leur succès sur des relations professionnelles. Nous avons voulu bâtir le nôtre sur une offre qui se tient. Je ne veux pas avoir à être là toute l'année en permanence pour que mon restaurant fonctionne. Les clients n'ont pas à venir pour mon 'beau visage'".

Dans cette démarche, le facteur prix ne doit surtout pas être négligé. Carlo Speltz est sans appel sur ce point: "Les prix sont importants. Une bonne partie de notre clientèle est constituée de financiers, qui ont une mémoire des chiffres impressionnante. Il savent les prix d'un vin! Je ne peux pas tricher sur ceux que je demande! Les prix comptent. Au Luxembourg, les produits de luxe ont du succès, mais certains de mes confrères pratiquent des prix excessifs".

Listing: le choix est dur

Quels sont les restaurants du Luxembourg qui peuvent accueillir vos repas d'affaires? Ils sont nombreux, plus que nombreux! paperJam a sondé quelques-uns et quelques-unes de ses connaissances pour savoir quels étaient les établissements pratiqués? Voici une liste.

Agath, 274, route de Thionville, Howald, Tél: 48 86 87

L'Arpège, 29, rue Sainte Zithe, Luxembourg-Gare, Tél: 48 88 08

Astoria, 44, avenue du 10 septembre, Luxembourg-Belair, Tél: 44 62 23

Bar Café, 21, rue des Bains, Luxembourg -Centre-ville, Tél: 26 20 11 40

Chiggeri, 15, rue du Nord, Luxembourg-Vieille ville, Tél: 22 99 36

Dal Notaro, 139, rue de la Tour Jacob, Luxembourg-Clausen, Tél: 42 30 70

La Fourchette à droite, 5, avenue Monterey, Luxembourg-Centre-ville, Tél: 22 13 60

Gastronome, 90, rue Andethana, Hostert, Tél: 34 00 39

Le Grand Café, 9, place d'Armes, Luxembourg-Centre-ville, Tél: 47 14 36

Jardin Gourmand, 432, route de Thionville, Hesperange, Tél: 36 08 42

Kamakura, 4, rue Munster, Luxembourg-Grund, Tél: 47 06 04

Léa Linster, 17, rue de Luxembourg, Frisange, Tél: 66 84 11

Lohengrin Hôtel Saint Nicolas, 31, Esplanade, Remich, Tél: 26 66 3

La Lorraine, 7, place d'Armes, Luxembourg-Centre-ville, Tél: 47 14 36

Le Normandy Hotel Cravat,

29, boulevard Roosevelt, Luxembourg-Centre-ville, Tél: 22 19 75

Opium, 427-429, rte de Thionville, Hesperange, Tél: 26 36 01 60

La Pomme Cannelle, 12, boulevard Royal, Luxembourg-Centre-ville,

Tél: 241 61 67 36

Postkutsch, 8, rue Xavier Brasseur,

Esch-sur-Alzette, Tél: 54 51 69

Pré-Vert, Scheierhaff, Canach,

Tél: 26 35 41

Le Relais Gourmand, 2, rue du Pulvermühl, Luxembourg-Pulvermühle,

Tél: 42 87 36

Schneidewind, 20, rue du Curé, Luxembourg-Centre-ville, Tél: 22 26 18

Speltz, Coin rues Chimay et Louvigny, Luxembourg-Centre-ville, Tél: 47 49 50

La Table des Guilloux, 17, R. de la Résistance, L-4996 Schouweiler,

Tél: 37 00 08

Villa d'Este, 5, rue de Pulvermühl, Luxembourg-Pulvermühle, Tél: 42 04 30

Wengé, 15, rue Louvigny, Luxembourg-Centre-ville, Tél: 26 20 10 58

Clubs & Cercles:

Cercle Munster, 5-7, rue Munster, Luxembourg-Grund, Tél: 47 06 43-1

Club Monnet, 6, Circuit de la Foire Internationale, Luxembourg-Kirchberg,

Tél: 42 31 42

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