Hyosung avait déjà repris, fin 2006, la Fabric Plant de Goodyear à Colmar-Berg.  (Photo: Olivier Minaire/archives)

Hyosung avait déjà repris, fin 2006, la Fabric Plant de Goodyear à Colmar-Berg.  (Photo: Olivier Minaire/archives)

Cinq ans après la reprise, par le groupe coréen Hyosung, de la Fabric Plant de Goodyear à Colmar-Berg, une seconde entité du manufacturier de pneumatiques a été cédée, en l’occurrence la Goodyear Wire Plant de Bissen. L’usine va changer de mains, selon une transaction signée aux Etats-Unis et probablement finalisée cet automne. L’option Hyosung Corporation, citée dans l’opération de reprise depuis environ 18 mois, se confirme donc, comme cela semblait logique au vu de ces liens déjà tissés entre le groupe asiatique et la multinationale américaine.

Du reste, lors de la récente mission économique menée en Corée du Sud le mois dernier, une réunion de travail avait eu lieu avec les dirigeants de Hyosung qui avaient déjà clairement évoqué une possible extension de son activité au Grand-Duché.

«La question de la survie à moyen et long termes reste ouverte», estime néanmoins le LCGB, syn­dicat majoritaire, dans un communiqué diffusé en parallèle à l’annonce officielle de Goodyear, le 10 juin. «Des investissements significatifs donneraient un bon signal.»

A priori, les 296 salariés actuels du site peuvent tout de même être rassurés. Comme le confirme Jean-Paul Bruck, porte-parole de Good­year au Luxembourg, «rien ne bouge pour les salariés, qui changent simplement de patron». On est bien dans le cadre légal du simple transfert d’entreprise, articulé sur le maintien de l’activité principale. Le LCGB exclut de fait également tous licenciements ou baisses de salaires. «La convention collective a encore plus d’une année devant elle. Elle restera applicable sous sa forme actuelle, y précise-t-on. Et la délégation sera reprise dans sa composition actuelle.»

Le LCGB émet cependant quelques craintes pour l’avenir, pour la garantie d’emploi, pour les investissements, pour les emplois liés à la sous-traitance. Le syndicat s’interroge notamment sur le contenu de l’accord entre Goodyear et Hyosung quant à d’éventuelles charges minimales pour l’usine luxembourgeoise.

Stratégie réorientée

Goodyear est incontournable au Luxembourg, depuis 1949. De sa base de Colmar-Berg, le géant américain a tissé une toile industrielle forte. Dans les années 50, 60 et 70, le groupe a multiplié les sites (Tire Plant, Technical Center, Fabric Plant, Mold Plant, circuit d’essai, Wire Plant), dans une logique de maîtrise du processus de fabrication et de test des pneus (tréfilerie pour la structure, entoilage, moulage…).

Sur base de sa holding luxembourgeoise (1986), le pool européen a poursuivi les investissements au Luxembourg, notamment dans des unités de pneus pour poids lourds ainsi que dans un centre informatique, installé une joint venture avec Dunlop (en 1999) puis inauguré des laboratoires de recherche et développement.

En 2004, le groupe Goodyear représentait quelque 3.500 emplois dans le pays. Il y en a encore plus de 3.200 aujourd’hui. Les 300 personnes de Bissen représentent moins de 10% de cet ancrage multinational. La Wire Plant, «qui reste un site de production très important pour l’Europe notamment et qui a des commandes allant même au-delà de ses capacités actuelles» souligne M. Bruck, et ses 300 salariés représentent aussi la moitié des forces que Goodyear cède au groupe coréen Hyosung (l’autre moitié étant les sites de Caroline du Nord).

Chez Goodyear, on explique cela par une «ré­orientation de la stratégie vers un métier de base». L’activité «sidérurgique» – la fabrication des fils d’acier – ainsi que l’entoilage ont été vendus, au groupe coréen dans les deux cas.

Goodyear, sous son nom, conserve encore un poids certain au Grand-Duché. Même si, quand on consulte le site mondial de la multinationale, le Luxembourg manque à l’appel parmi une galaxie d’ancrages et de liens planétaires… «Une erreur malencontreuse, que nous avons déjà signalée, explique-t-on à Colmar-Berg. Mais cela ne doit pas faire peur. Nous sommes là et bien là!»