Sur la question de l’impôt sur la fortune des personnes physiques, le LSAP fait cavalier seul en souhaitant sa réintroduction «à long terme». (Illustration: Maison Moderne)

Sur la question de l’impôt sur la fortune des personnes physiques, le LSAP fait cavalier seul en souhaitant sa réintroduction «à long terme». (Illustration: Maison Moderne)

Coup de barre à gauche pour le LSAP. En faisant figurer dans son programme électoral la réintroduction de l’impôt sur la fortune, les sociaux-démocrates luxembourgeois font cavalier seul. Si ce choix peut être motivé par la volonté de marquer leur positionnement vers un électorat populaire, il peut aussi apparaître comme une manière de faire oublier que le parti est au pouvoir de manière ininterrompue depuis près de 15 ans. Quoi qu’il en soit, cette revendication est en rupture avec la décision applicable depuis le 1er janvier 2006, du fait de la politique menée par la coalition CSV-LSAP d’alors.

Mais si la mesure figure bel et bien sur le programme officiel, elle n’en demeure pas moins floue, puisque le LSAP affirme que le retour de l’impôt sur la fortune des résidents devra se faire «à long terme» afin de «lutter contre les injustices sociales». Sans aucun chiffre sur le nombre de personnes concernées, le montant qui serait versé au budget de l’État ou le délai de réintroduction en cas de coalition dirigée par Étienne Schneider. Une manière comme une autre, pour le parti, de ne pas se priver des suffrages d’une certaine catégorie d’électeurs, plutôt aisée.

Vouloir introduire cet impôt serait un mauvais message à envoyer.

Jamal Afakir, partner chez Atoz

Pour les autres partis, cette question n’apparaît pas comme un sujet de campagne, puisque ni le CSV ni les actuels partenaires de coalition du LSAP ne soutiennent la mesure. Pour les chrétiens-sociaux, l’opposition est même frontale, puisqu’ils indiquent «être clairement opposés» à cette idée, préférant taxer les hauts revenus via une modification du régime des stock-options, jugé «immoral» dans son état actuel. Si Déi Gréng n’abordent pas la question, les libéraux, eux, se montrent réticents, au même titre que l’introduction d’un «droit de succession en ligne directe».

«Vouloir introduire cet impôt au Luxembourg serait un mauvais message à envoyer, car il a un caractère très punitif dans les esprits, notamment dans celui des entrepreneurs qui pourraient se sentir punis d’avoir réussi, note Jamal Afakir, partner chez Atoz. Si nous regardons les systèmes en place en Europe, seule la France en est dotée et l’a transformé d’impôt sur la fortune générale en quasi-impôt sur la fortune immobilière.»

À l’inverse, le consensus autour du besoin de taxer le patrimoine des entreprises demeure. Aucun programme des quatre partis de gouvernement n’entend abolir un impôt qui a rapporté plus d’un demi-milliard d’euros en 2017 au budget de l’État, contre 152 millions d’euros en 2000.

Pourtant, pour les fiscalistes, cet impôt qui porte sur les actifs nets des sociétés serait contre-productif. Car le système jouerait le rôle d’épouvantail pour les investisseurs étrangers. «Les mesures en place actuellement permettent aux entreprises luxembourgeoises de réduire le montant de cet impôt, ce qui n’est pas le cas des entreprises étrangères qui passaient le plus souvent par des Soparfi, explique Gerdy Roose, partner chez BDO Luxembourg. Or, quand une Soparfi paie de l’impôt sur la fortune, c’est qu’une gaffe a été commise ou qu’un élément non prévu est survenu, et cela a des répercussions négatives sur l’image du pays.»