Alors en poste à Francfort en 1981, Jean Fuchs apprend que le Luxembourg connaît un fort besoin en personnel dans le secteur bancaire. Il franchit la Moselle – bien moins hasardeux que le Rubicon – et intègre Paribas Luxembourg. Pendant 14 ans, il connaîtra de multiples postes et différentes responsabilités, avant d’occuper le siège de directeur général chez ATAG Gestion de Fortune.
Poussé par un besoin d’autonomie et une vision plus «libre» de son métier, il fonde en 2000 sa propre structure, Fuchs & Associés Finance, spécialisée en gestion de fortune et global family office.
L’entreprise croît, dans un souci d’éthique et de morale véhiculé par un objectif de satisfaction des clients, lui-même favorisé par une indépendance à même de proposer les meilleurs services et investissements du marché et du moment.
Chercher les clients ailleurs
Lorsque les remous financiers se font sentir et qu’une majorité hurle avec les loups, Jean Fuchs émet une voix dissonante. «La crise est un mot que je n’aime pas, d’autant plus que dans notre métier, il n’y a pas eu de grave crise.» S’il reconnaît néanmoins que les résultats de la société ont connu une baisse sensible, il avance que la période a permis de réorienter ses activités et d’embaucher une dizaine de personnes «qui, en temps normal, n’auraient pas bougé. Il est bon qu’il y ait une crise de temps en temps, afin de modifier les habitudes et de créer des opportunités». Dans le private banking, le Luxembourg connaît un temps de retard sur des places concurrentes telles Genève, Zurich ou Londres. «En termes de volumes, le Luxembourg restera vraisemblablement en retrait quelques années encore, car attirer une clientèle haut de gamme et sophistiquée ne se fait pas en deux ou trois ans», reconnaît-il. Cet aspect, négatif de prime abord, peut s’avérer positif, car il offre l’opportunité de créer des filiales ailleurs et d’aller chercher des réservoirs de clients potentiels dans d’autres contrées.
Et pour leur offrir une qualité de services revalorisée, «il faut trouver du personnel de très haut niveau. En se diversifiant et en recrutant judicieusement, on ouvre des portes sur le monde». Il le faut d’autant plus que les contraintes réglementaires et administratives, aux niveaux national et européen, sont des freins au développement du secteur. «Ces aspects réglementaires me semblent exagérés et coûteux. Ils sont mis en place au détriment de la flexibilité, de l’inventivité et de l’innovation», déplore Jean Fuchs. Pour contrer cette inertie, l’administrateur délégué de Fuchs & Associés Finance considère que la mentalité des professionnels des banques est à changer. «Il faut sortir de la logique de gens formatés sortant des mêmes écoles, avec les mêmes idées et les mêmes règles.»
Dans ce bouillon d’immobilisme, Jean Fuchs admet que le ministre des Finances Luc Frieden «a la volonté de faire bouger les choses et la position pour le faire». Est-ce à travers lui que viendra le déclic tant attendu?