Hyosung avait déjà repris, fin 2006, la Fabric Plant de Goodyear à Colmar-Berg. (Photo: Olivier Minaire/archives)

Hyosung avait déjà repris, fin 2006, la Fabric Plant de Goodyear à Colmar-Berg. (Photo: Olivier Minaire/archives)

Goodyear est incontournable au Luxembourg depuis 60 ans. Une deuxième unité de production de Colmar-Berg passe sous étendard coréen. Les syndicats s’interrogent. La stratégie du géant américain se recentre.

Le comité mixte d’entreprise, jeudi, et les salariés, ce vendredi, en ont été officiellement avertis: la Goodyear Wire Plant de Bissen passera bien sous la bannière sud-coréenne de Hyosung Corporation (voir communiqué ci-dessous).

L’usine va changer de mains, selon une transaction signée aux Etats-Unis et probablement finalisée cet automne. L’option Hyosung Corporation, citée dans l’opération de reprise depuis environ 18 mois, se confirme donc, comme cela semblait logique au vu des liens déjà tissés entre le groupe asiatique et la multinationale américaine.

Hyosung avait déjà repris, fin 2006, la Fabric Plant de Goodyear à Colmar-Berg. «La question de la survie à moyen et long termes reste ouverte», estime le LCGB, syndicat majoritaire, dans un communiqué diffusé ce vendredi 10 juin, en parallèle à l’annonce officielle de Goodyear. «Des investissements significatifs donneraient un bon signal.»

Transfert d’entreprise

A priori, les 296 salariés actuels du site peuvent être rassurés. Comme le confirme Jean-Paul Bruck, porte-parole de Goodyear au Luxembourg, «rien ne bouge pour les salariés, qui changent simplement de patron». On est bien dans le cadre légal du simple transfert d’entreprise, articulé sur le maintien de l’activité principale. Le LCGB exclut de fait également tous licenciements ou baisses de salaires. «La convention collective a encore plus d’une année devant elle. Elle restera applicable sous sa forme actuelle, y précise-t-on. Et la délégation sera reprise dans sa composition actuelle.»

Le LCGB émet cependant quelques craintes pour l’avenir, pour la garantie d’emploi, pour les investissements, pour les emplois liés à la sous-traitance. Le syndicat s’interroge notamment sur le contenu de l’accord entre Goodyear et Hyosung quant à d’éventuelles charges minimales pour l’usine luxembourgeoise.

Moins de 10%

Goodyear est incontournable au Luxembourg, depuis 1949. De sa base de Colmar-Berg, le géant américain a tissé une toile industrielle forte. Dans les années 50, 60 et 70, le groupe a multiplié les sites (Tire Plant, Technical Center, Fabric Plant, Mold Plant, circuit d’essai, Wire Plant), dans une logique de maîtrise du processus de fabrication et de test des pneus (tréfilerie pour la structure, entoilage, moulage…).

Sur base de sa holding luxembourgeoise (1986), le pool européen a poursuivi les investissements au Luxembourg, notamment dans des unités de pneus pour poids lourds ainsi que dans un centre informatique, installé une joint venture avec Dunlop (en 1999) puis inauguré des laboratoires de recherche et développement.

En 2004, le groupe Goodyear représentait quelque 3.500 emplois dans le pays. Il y en a encore plus de 3.200 aujourd’hui. Les 300 personnes de Bissen représentent moins de 10% de cet ancrage multinational.

Stratégie réorientée

La Wire Plant, «qui reste un site de production très important pour l’Europe notamment et qui a des commandes allant même au-delà de ses capacités actuelles» souligne M. Bruck, et ses 300 salariés représentent aussi la moitié des forces que Goodyear cède au groupe coréen Hyosung (l’autre moitié étant les sites de Caroline du Nord).

Chez Goodyear, on explique cela par une «réorientation de la stratégie vers un métier de base». L’activité «sidérurgique» - la fabrication des fils d’acier - ainsi que l’entoilage ont été vendus, au groupe coréen dans les deux cas.

Goodyear, sous son nom, conserve encore un poids certain au Grand-Duché. Même si, quand on consulte le site mondial de la multinationale, le Luxembourg manque à l’appel parmi une galaxie d’ancrages et de liens planétaires… «Une erreur malencontreuse, admet-on à Colmar-Berg, que nous avons déjà signalée. Mais cela ne doit pas faire peur. Nous sommes là et bien là!»