Gabriel Bleser : « L’important est de proposer des produits pointus, à haute valeur ajoutée. » (Photo : David Laurent / Wili)

Gabriel Bleser : « L’important est de proposer des produits pointus, à haute valeur ajoutée. » (Photo : David Laurent / Wili)

Monsieur Bleser, après plusieurs expériences dans des cabinets d’avocats, vous avez choisi d’intégrer l’équipe de Legitech. Pourquoi ce choix ?

« J’ai un CV un peu atypique. Après un passage dans un cabinet d’avocats, j’ai aidé à mettre en place l’autorité de la concurrence et j’ai été nommé premier rapporteur général de l’Inspection de la concurrence au ministère de l’Économie et du Commerce extérieur. J’ai ensuite décidé de retourner dans le secteur des cabinets pour m’occuper du droit de la concurrence, puis du marketing et du business development. Au vu de ces différentes expériences, je suis resté intéressé par l’expérience de l’entreprise. J’ai donc été tenté de rejoindre l’équipe de Nicolas Henckes que je considère comme un entrepreneur ambitieux et clairvoyant.

Quelles sont vos fonctions au sein de Legitech ?

« Je suis responsable de l’édition pour l’ensemble de nos publications ainsi que de notre business center baptisé « Legicenter ». Je m’occupe aussi du marketing des produits et de la gestion des ressources humaines. Je vais aussi être amené à contribuer à notre magazine « Legimag » au travers d’articles. Je suis intéressé par la variété de ma mission qui me permet de participer aux décisions de l’entreprise en tant que membre du comité de direction.

Pourquoi vous passionner pour la concurrence ?

« C’est une matière très vivace et qui touche directement à l’économie. Il ne s’agit pas uniquement de droit, mais aussi d’économie. Cela implique donc de s’intéresser au fonctionnement des marchés et des entreprises pour chaque dossier. J’ai d’ailleurs créé l’Association pour l’étude du droit de la concurrence, qui va être relancée prochainement et qui a contribué activement à mettre en place la nouvelle loi relative à la concurrence.

Qui sont les clients de Legitech ?

« Nous nous adressons bien entendu aux cabinets d’avocats, mais aussi aux big four, aux fiduciaires, aux banques, aux administrations et ministères ainsi qu’aux entreprises, et dans une moindre mesure aux particuliers. Ambitionnez-vous de conquérir des marchés à l’international ? « Avec la mise en place d’un comité de direction au sein de Legitech, Nicolas Henckes est désormais chargé du développement à l’international, dont de nouvelles collaborations. Je suis pour ma part responsable de l’aspect national.

Quels sont les défis dans le champ de l’édition ?

« Nous voulons suivre les tendances et anticiper les besoins de nos clients. Nous nous dirigeons donc de plus en plus vers des contenus dématérialisés grâce à nos bases de données en droit qui nous permettent de prendre cette direction. Nous entendons également développer des partenariats avec des auteurs pour composer de nouveaux ouvrages. Nous contribuons aussi à développer la doctrine luxembourgeoise par les Cahiers du droit luxembourgeois où il est possible de publier des articles, ce qui offre en plus une visibilité intéressante aux contributeurs.

Contrairement à l’édition grand public, votre niche semble bien se porter. Partagez-vous cet avis ?

« L’important pour que la recette fonctionne est de proposer des produits pointus, à haute valeur ajoutée. Il faut suivre à la fois les avancées technologiques et les changements au sein du monde des avocats, qui connaît et va connaître de profondes évolutions. Celui-ci va en effet être de plus en plus soumis à une pression sur les marges des honoraires, même dans les grands cabinets. Cela peut signifier un besoin potentiel de leur part de services en mode outsourcing, pour mieux maîtriser les coûts. Nous pourrions ainsi proposer des solutions sur-mesure pour aider les cabinets à maîtriser ces paramètres. Nous avons des projets en gestation à ce niveau.

Quelle est la philosophie du « Legicenter » ?

« Il s’agit d’un centre d’affaires, lancé au printemps 2012, dédié aux avocats. L’idée est de proposer des formules très flexibles, à des prix attractifs, tout en garantissant la conformité aux règles déontologiques du barreau. Nous comptons faire croître cette activité, le plus grand frein étant d’un côté un certain blocage psychologique dû à notre localisation à Bertrange. De l’autre côté, certains avocats un peu réactionnaires du barreau estiment apparemment que nous ne respectons pas la déontologie, et font de la propagande contre nous. Ceci est bien évidemment faux ! Et finalement, même s’il est désormais possible pour un avocat de s’établir en dehors de Luxembourg-Ville, le prestige du nom subsiste. Nous considérons par ailleurs notre business center comme une solution transitoire pour des spin-off de cabinets qui sont dans l’attente de trouver leurs propres bâtiments. Si les cabinets doivent réduire leurs coûts à l’avenir, cela devrait d’ailleurs aussi passer par une maîtrise de la location des bâtiments. Car les coûts se répercutent in fine sur les honoraires que le client est de moins en moins enclin à payer à un prix élevé. Ce business center est donc aussi un autre outil pour les avocats leur permettant d’anticiper les difficultés à venir, parmi lesquelles la pression sur les prix ou l’arrivée de nouveaux acteurs.

Quels sont les atouts qui ont permis à Legitech de se positionner au niveau national ?

« Avant d’intégrer la société, je considérais déjà que sa marque était une garantie de sérieux. L’accès online est aussi un atout important vis-à-vis d’autres concurrents qui continuent d’utiliser principalement le papier. Cet état d’esprit implique une innovation constante.

Quels sont vos prochains projets ?

« Nous réfléchissons à différents services que nous pourrions proposer aux cabinets pour maintenir leur profitabilité tout en bénéficiant d’un support de qualité. Cela pourrait passer, par exemple, par des applications pour supports mobiles. Nous voulons aussi développer notre blog pour participer à l’échange d’idées et à l’avancée de la doctrine via des articles. Ceux-ci peuvent et sont déjà en partie rédigés par des contributeurs externes.

Les avocats sont-ils prêts à partager leur point de vue de cette manière ?

« Absolument, cela leur permet de disposer d’une visibilité supplémentaire tout en suscitant la réflexion au travers d’une forme très courte. Cela peut entraîner des discussions, que nous voulons aussi accroître sur les réseaux sociaux via lesquels nous sommes aussi actifs. Le marché devient de plus en plus concurrentiel et c’est un excellent moyen pour de petites structures d’être trouvées sur Internet !

Les ouvrages numériques sont-ils davantage consultés par les plus jeunes avocats ?

« Oui, tout à fait. Je dois reconnaître que je me considère plutôt comme un vieux de ce point de vue comme j’aime encore tenir en mains un livre… Mais j’y travaille ! Chez les juristes, l’ancienne génération utilise naturellement les ouvrages en version papier, mais les choses évoluent.

Que vous ont appris vos expériences précédentes ?

« D’une manière générale, le plus grand défi est de gérer un cabinet via un management global, qu’il s’agisse des ressources humaines, des finances, du marketing, des prix… Or on n’apprend pas cela en tant qu’avocat. Il faut donc recourir à des services internes ou externes pour y parvenir. Un des autres grands défis des cabinets est la gestion de la communication, tant interne qu’externe.

Qui sont vos principaux concurrents ?

« Avec le type de solution que nous proposons, nous n’avons pas de véritable concurrent direct local. Mais nous devons continuer à effectuer la promotion de nos produits pour qu’un maximum d’acteurs puisse avoir accès à nos bases de données.

Comment se gère une base de données juridique ?

« Avec les trois bases que nous développons, nous avons des partenariats exclusifs avec des cabinets qui les alimentent et transmettent les jurisprudences. Ces exclusivités n’empêchent toutefois pas que d’autres auteurs publient des ouvrages dans les domaines couverts par nos trois bases de données actuelles. Nous sommes d’ailleurs ouverts à d’autres cabinets qui voudraient couvrir une matière spécifique et envisager un partenariat avec nous pour la création d’une nouvelle base de données thématique.

Quels sont les profils que vous recherchez ?

« Nous cherchons régulièrement des juristes pour développer nos activités, en particulier les départements éditions et documentation. Les juristes qui nous rejoignent sont attirés par un cadre de travail agréable et une fonction permettant d’aborder des sujets variés. L’équipe est aussi très jeune et dynamique, ce qui favorise l’entreprenariat. Je suis d’ailleurs amené à me comporter comme un entrepreneur. »