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Alors que se profile la présentation du projet d'intégration du nouveau géant sidérurgique, Mittal Steel devra patienter encore un peu pour s'approprier l'intégralité du capital d'Arcelor.

Lakshmi Mittal est un homme patient. Il a déjà dû attendre près de six mois pour parvenir à ses fins et recevoir le feu vert d'Arcelor pour un mariage de raison à des conditions, certes, sensiblement plus élevées que celles initialement escomptées. Désormais, il lui faudra encore attendre jusqu'au 17 novembre, au plus tard, pour que le mariage soit entièrement consommé. Au terme des deux premières phases de l'offre publique lancée début juillet, et clôturée le 17 août, "seuls" 93,72% du capital (et 93,80% des droits de vote) d'Arcelor ont changé de mains, Mittal Steel détenant 607.278.965 actions et 19.916.184 obligations convertibles Arcelor.

C"est, évidemment, un succès, mais ce n'est pas le plébiscite absolu dont l'homme d'affaires indien rêvait certainement. Car l'article 15(2) de la toute récente loi du 19 mai 2006 concernant les offres publiques d'acquisition prévoit un seuil de 95% (en capital et en droits de vote) à partir duquel l'acquéreur peut exiger, de la part des détenteurs des titres restants, de lui vendre ces titres "pour un juste prix".

Ce "juste prix" de l'action Arcelor a été fixé à 40,40 euros, soit près du double de la valeur du titre le 27 janvier dernier, à l'aube de l'annonce des intentions de Mittal Steel, alors que l'offre initiale proposait un savant mélange entre du cash et des actions.

C"est également à ce même prix de 40,40 euros que les actionnaires d'Arcelor ont, à l'heure actuelle, a possibilité d'exiger de Mittal Steel qu'il leur rachète leurs titres. Cette période est prévue, selon la même loi du 19 mai, de durer trois mois après la clôture de l'offre initiale (c'est-à-dire le 17 août dernier). Cela nous amène donc, au plus tard, au 17 novembre prochain, étant entendu que si, entre temps, la barre des 95% est atteinte, Mittal Steel pourra user de son droit au retrait obligatoire et exiger de tous les actionnaires restants qu'ils lui vendent leurs actions pour ce prix de 40,40 euros.

Le champ libre avant 2008?

Pendant que se règle cet aspect, somme toute relativement anecdotique, la structure managériale de ce qui s"appellera bientôt Arcelor Mittal se met en place. Comme prévu, le Français Guy Dollé, ardent combattant de la fusion annoncée, ne figure plus au casting. Ce qui semblait moins prévu, en revanche, c'est que ce soit Roland Junck qui se retrouve en haut de l'affiche, là où tout le monde attendait plutôt Michel Wurth.

âgé de 50 ans, le nouveau CEO a un profil résolument industriel (voir aussi page 111). Cela tombe finalement plutôt bien, car l'intégration industrielle des deux groupes, riches de quelque 320.000 salariés et soixante usines, constituera la clé de voûte de la réussite de la fusion, bien plus que l'aspect financier, spécialité de Michel Wurth. Ce dernier conserve évidemment sa place au sein de la nouvelle équipe de direction composée de six membres, mais voit son périmètre de responsabilités limité aux seuls produits plats en Europe.

La direction financière, en effet, a été confiée à Aditya Mittal (le fils de Lakshmi). âgé de 30 ans, il occupe ces mêmes fonctions, depuis 2004, chez Mittal Steel et aura en charge, de surcroît, les produits plats pour l'Amérique. En attendant mieux, plus tard, les gènes de la patience étant évidemment transmissibles. Le siège de numéro un' "Cela me plairait, bien sûr, mais ce ne serait pas approprié, compte tenu de mon âge et de mon expérience. Je dois d'abord apprendre à bien connaître le fonctionnement du nouveau groupe", avait-il indiqué, le 26 juin dernier, lors de la publication des bans.

Son père, lui, gardera évidemment un oeil sur tout ce beau monde, puisqu'il prend la tête du conseil d'administration, aux côtés de Joseph Kinsch, dont le mandat doit prendre fin en 2008. Rien ne dit, cependant, que le patriarche luxembourgeois, entré à l'Arbed en 1960, ira au terme de son ultime mandat, ce qui laisserait alors le champ entièrement libre à Lakshmi Mittal. Un autre membre de la famille Mittal, Vanisha, 25 ans - la fille de Lakshmi - siège également au conseil d'administration, tout comme cela était le cas au sein du groupe Mittal. La nouvelle direction d'Arcelor Mittal s"est immédiatement mise au travail et l'on devrait connaître, à la fin du mois de septembre, les premières annonces concernant la mise en oeuvre concrète de l'intégration industrielle des deux groupes.