François Tesch  (Photo: Andrés Lejona)

François Tesch  (Photo: Andrés Lejona)

A la tête du principal groupe d’assurances luxembourgeois, dans la stricte continuité familiale (c’est son grand-père, du côté maternel, qui en fut un des fondateurs et son oncle, Marc Lambert, qui en a longuement assuré la présidence), François Tesch aurait pourtant très bien pu suivre une autre voie, celle du monde de l’architecture, dont la passion lui avait été inculquée par sa mère, «qui a passé sa vie à faire des plans, à construire, se souvient- il. Mais mon père trouvait que je n’étais pas doué pour le dessin, ce qui était vrai. Et à l’époque, il n’existait pas d’ordinateurs pour y remédier. Si je devais nourrir un regret, aujourd’hui, ce serait peut-être celui-là».

C’est finalement dans le secteur bancaire que M. Tesch entame sa carrière professionnelle, après quatre années d’étude à Aix-en-Provence. Il commença par deux stages chez Brown Brothers et Dresdner Bank. Une centaine de jours qui lui ont forgé une première certitude: il ne deviendrait jamais banquier. «J’associais davantage le monde économique à la production de biens visibles. Je ne me reconnaissais pas dans la finance pure». L’indécision aidant, le cursus universitaire fut alors complété par un MBA à l’INSEAD enchaîné avec un séjour outre-Atlantique. «Puisque je n’avais toujours pas choisi un secteur d’activités précis, je me suis dit qu’il fallait que j’aille aux Etats-Unis, privilégiant alors le côté géographique ».

Il passera alors trois ans à New York au département fusion/acquisitions du conglomérat W.R. Grace & Co (ressources naturelles, produits chimiques, produits de consommation…), puis près de deux ans à Paris au poste de directeur financier pour la division «produits chimiques spécialisés». Ce n’est qu’en 1983 qu’il retourne au pays, en tant que secrétaire général, «avec l’idée de développer les affaires familiales», se souvient-il. Et contrairement aux apparences, la voie n’était pas forcément toute tracée. «L’assurance était alors très réglementée et très traditionnelle, gérée par des juristes ou bien par des actuaires. Et moi, j’avais une formation économique. Mais le plaisir que j’ai eu était de pouvoir dire que l’assurance était une affaire comme les autres, et qu’on pouvait y faire des profits. Cette vision-là n’était pas du tout commune dans l’assurance».

Pourtant, l’évolution du contexte européen et le décloisonnement progressif du secteur de l’assurance ont conforté François Tesch dans son approche et l’ont aidé à développer le groupe Foyer comme «une entreprise à but lucratif, avec des actionnaires rémunérés pour leur mise, des clients à qui il faut proposer des produits innovants et des employés à qui il faut pouvoir donner des ouvertures de carrière et des rémunérations plus motivantes». Aujourd’hui, avec plus de 100.000 clients, c’est près d’un ménage luxembourgeois sur trois qui détient une assurance auprès du groupe Foyer.

Avec du recul

Soucieux d’assurer une diversification optimale du patrimoine familial, M. Tesch va également profiter de la cession des activités belges du groupe, au début des années 90, pour prendre une participation conséquente dans BIL-Participations, transformée en Luxempart (dont il est, aujourd’hui, administrateur délégué) et contribuer à l’essor d’une des structures d’investissement clés de l’économie luxembourgeoise. Le lancement de SES, la restructuration de Cegedel, l’essor de RTL Group, la création de l’opérateur de téléphonie mobile Vox: Luxempart y a joué un rôle clé à chaque fois et François Tesch n’y est pas étranger.

Fort de son parcours, placé sous le signe de la prudence («Je n’aime pas les mauvaises surprises et les événements qui me mettent le dos au mur. J’essaie donc de prévoir, d’anticiper et ne pas prendre des risques qui pourraient me mettre dans des situations difficiles. M. Tesch peut, désormais, savourer un certain recul qui l’a fait se détacher des contraintes de la gestion journalière des affaires. Un choix qui lui permet de davantage se consacrer aux questions d’ordre stratégique clés, avec des réflexions engagées sur le développement des activités de private banking du groupe Foyer et une adaptation du champ d’activités de Luxempart. Le tout dans un souci de continuité qui lui survivra.

D’ailleurs, la première étape a déjà plus ou moins été menée, avec le rachat par le groupe Foyer du groupe CapitalatWork et de l’apport de Foyer Patrimonium (l’entité du Groupe Foyer spécialisée en gestion privée et institutionnelle) à cette nouvelle filiale afin de créer un groupe leader dans le wealth management, gérant près de 4 milliards d’euros d’actifs et fort d’environ 130 collaborateurs répartis sur cinq pays. «Je me vois davantage comme un fédérateur, intéressé de savoir de quoi sera fait l’avenir. J’ai plus de plaisir à savoir que mes actions servent à développer ou à contribuer au développement du patrimoine du groupe que de partir vivre au soleil. Je n’ai pas encore dit mon dernier mot. Construire reste toujours l’objectif numéro 1. Je préfère les fondations solides au préfabriqué»…