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 (Photo : Fideliity International)

La grande interrogation pour 2018

Qu’est-ce qui se passera lorsque les banques centrales feront marche arrière est la grande interrogation pour 2018. Certains estiment que l’impact sera limité dans la mesure où la demande des investisseurs sera suffisante afin de compenser les achats manquants. Le risque est de voir les investisseurs paniquer, par crainte de taux d’intérêt plus élevés que prévu ou simplement parce que les banques centrales ne sont plus là pour soutenir les actifs risqués. Au minimum, la fin de l’assouplissement quantitatif a toutes les chances de mettre à l’épreuve l’approche consistant à tirer avantage des replis pour procéder à des achats, surtout sur les marchés obligataires tels que celui des obligations Investment Grade américaines.

Les inquiétudes sont-elles injustifiées? Les banques centrales pourraient tout simplement intervenir à nouveau, comme l’a d’ailleurs promis Mario Draghi si cela s’avère nécessaire. Toutefois, cela présuppose que l’inflation, restée en sommeil depuis la crise financière, ne vienne pas entraver la politique monétaire. En effet, cela ne fait que 18 mois que les craintes déflationnistes atteignaient leur paroxysme, que le rendement de l’emprunt d’État allemand à 10 ans tombait à -0,3% et qu’un tiers de tous les emprunts d’État au niveau mondial offrait des rendements négatifs.

Changement de régime?

La possibilité d’un changement de régime ne doit pas être balayée d’un revers de la main. Les banques centrales pratiquent des politiques accommodantes depuis très longtemps. Les marchés du travail sont désormais tendus dans la quasi-totalité des grandes économies et les principales exceptions sont concentrées dans la zone euro. À un certain moment, les employés vont se sentir suffisamment rassurés pour réclamer des augmentations de salaire. La croissance des salaires s’est manifestée à des taux de chômage plus élevés dans le passé, mais cela ne signifie pas pour autant qu’elle ne fera jamais son retour. Quand cela sera le cas, elle pourrait rapidement s’accélérer et, ce faisant, nettement réduire la marge de manœuvre des banques centrales.

Outre les pressions haussières sur l’inflation, certaines des larges forces déflationnistes observées ces dernières années sont également en train de disparaître. Par exemple, la baisse de 50% du prix du pétrole en 2014 ne pourrait se réitérer sans causer de considérables dommages à l’industrie pétrolière. Plus globalement, la déflation au sein des biens de consommation due à l’intégration de la Chine et d’autres économies émergentes a désormais en grande partie pris fin et ce n’est pas l’intégration d’autres économies qui remettra en cause cette situation.

Les risques déflationnistes structurels sont exagérés

Je pense également que certains des arguments structurels à l’égard de la déflation sont exagérés. Internet en est un bon exemple puisqu’il est affirmé que la capacité à comparer les prix a pour effet d’exercer des pressions sur les fabricants et réduit les marges. Cela peut être vrai, mais Internet a également coïncidé avec une période de faible inflation dans le monde entier. Ce faisant, son impact déflationniste a ainsi possiblement été exagéré par les circonstances. Si les fabricants doivent faire face à des pressions haussières sur les coûts, les prix pourraient alors ne pas se révéler aussi figés que dans le passé, Internet rendant très facile pour les fabricants d’augmenter les prix. Et si tous les fabricants sont confrontés à des pressions haussières sur les coûts, en raison de l’augmentation des salaires ou des prix des matières premières, ils auront alors tous une bonne raison d’augmenter les prix. La transparence des prix pourrait bien ne pas toujours agir en faveur des consommateurs.

L’inflation représente un risque entourant mes prévisions, plutôt qu’un scénario central. Mais, compte tenu de l’énorme impact qu’elle pourrait avoir sur les marchés, les investisseurs devraient envisager de doter leurs portefeuilles d’une certaine protection contre l’inflation. Les prêts à taux variable constituent une bonne option en la matière; ils n’ont généré que des plus-values relativement modérées en 2017 et offrent des rendements stables. Outre la protection contre l’inflation, je conserverais également une surpondération des actions, tout en la réduisant néanmoins à mesure que s’écoule l’année.

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