Paperjam.lu

 

Au Luxembourg, on affirme haut et fort être « fier de promouvoir l’ICT ». L’agence de promotion Luxembourg for Business en a même fait l’un de ses slogans : « Proud to promote ICT ». Autour de l’organe de promotion de l’État, les acteurs du secteur informatique se fédèrent pour présenter au monde entier le Luxembourg et ses infrastructures de pointe. Objectif : attirer de nouveaux acteurs internationaux au Grand-Duché.

Il faut dire qu’ils sont nombreux, au Luxembourg, à œuvrer dans le secteur. « On a comptabilisé environ 1.700 sociétés, pour 13.000 employés », précise Jean-Paul Hengen, Luxembourg ICT Cluster manager. Ce petit monde s’inscrit dans une large palette de métiers et d’entreprises de tailles variées.

Trop d’associations ?

Aussi, Luxembourg for Business n’est pas le seul organe à rassembler des acteurs du secteur pour des missions de promotion à l’étranger. Loin s’en faut. Tous se regroupent au sein de différentes associations et fédérations patronales pour faire entendre leurs intérêts. Parmi ces nombreuses associations, fédératrices d’acteurs du secteur, on citera Fedil-ICT, l’Apsi, FDI, EuroCloud, ou encore Luxembourg ICT Cluster.

Il arrive qu’une même société soit membre de plusieurs de ces associations. Elles ne sont, en outre, pas les seules à aborder les enjeux relatifs aux systèmes d’information et de communication. D’autres associations sectorielles, comme l’Association des PSF de support, l’ABBL (Association des Banques et Banquiers, Luxembourg), Amcham (American Chamber of Commerce) ou encore la British Chamber of Commerce, abordent régulièrement, au cœur de leurs événements, des thématiques liées à l’informatique. Si on y ajoute encore l’ICT Cluster, au sein de Luxinnovation, on est en droit de se demander si cela ne fait pas un peu beaucoup, pour le seul petit pays qu’est le Luxembourg.
« Historiquement, chaque association s’est développée autour de thématiques spécifiques, autour d’enjeux et d’intérêts bien particuliers », explique Jean Diederich, associé chez Kurt Salmon et président de l’Apsi (Association des professionnels de la société de l’information). « Le développement de notre association, par exemple, s’inscrit dans le cadre de la Confédération Luxembourgeoise du Commerce. Nos membres sont avant tout des sociétés du monde du conseil ou du commerce. Les thématiques que nous abordons ont souvent été développées à partir des problématiques et enjeux business, comme le paiement électronique. Cette année, nous aborderons l’ICT 2.0 ou comment de nouveaux business peuvent naître d’innovations technologiques. »

Fedil-ICT, ou encore la FDI (Fédération des Intégrateurs) sont deux autres associations qui s’adressent, pour chacune d’elles, à une cible particulière. C’est dans le cadre d’un berceau industriel qu’est née la Fedil-ICT, dont l’objectif premier était de promouvoir le rôle des CIO au cœur des entreprises industrielles, afin d’améliorer leurs performances. « À mesure que notre action a porté ses fruits, nous avons abordé de nouveaux thèmes, comme les questions de sécurité informatique autour desquelles nous sensibilisons nos membres, la gestion des infrastructures ou l’optimisation des processus », commente Gérard Hoffmann, CEO de Telindus Luxembourg et président de Fedil-ICT. « Petit à petit, nous avons pu mieux informer les entreprises d’un secteur, parfois peu conscientes, des enjeux en matière informatique et aller toujours plus loin dans les conseils et le partage d’expériences. »

Fedil-ICT a aussi élargi sa cible et fédère désormais des acteurs de taille importante, comme les opérateurs de télécommunication et gestionnaires d’infrastructures ICT, les intégrateurs, les prestataires de services ICT ainsi que de l’e-business.

La FDI, de son côté, fédère les intégrateurs, les installateurs d’équipements audiovisuels et de sécurité. Cette fédération, elle, s’inscrit dans le cadre de la Chambre des Métiers. « Aujourd’hui, notre objectif est avant tout de représenter les intérêts des intégrateurs et de promouvoir ces métiers, pour lesquels on peine à trouver de la main-d’œuvre », explique Nico Binsfeld, CEO de Netcore PSF et président de la FDI. « Les enjeux sont nombreux. De nos jours, le secteur ICT évolue fortement, avec un impact important sur nos métiers. Si notre fédération n’a pas fortement été mise en lumière ces derniers temps, elle connaît à présent un nouveau dynamisme. »

Des intérêts communs

Si toutes ces associations abordent des thématiques propres à leurs activités, elles sont aussi sensibles à des enjeux et problématiques plus générales. Toutes, en effet, sont concernées par les évolutions technologiques majeures, comme l’émergence du cloud computing (lire à ce sujet l’article en page 60). Aussi, tous les acteurs concernés suivent avec intérêt le développement et le positionnement de la place au niveau ICT.

Jusqu’à très récemment, toutes ces associations abordaient les différentes thématiques relatives à ces enjeux communs. Avec, pour conséquence, une multiplication des conférences, events et autres workshops sur des thématiques identiques, parfois à quelques jours d’intervalle, et dans lesquels les mêmes acteurs se croisaient régulièrement. « L’impression que nous nous dispersions était réelle, reconnaît Gérard Hoffmann. Nous avions aussi le sentiment de perdre du temps et de l’énergie. C’est la raison pour laquelle nous, l’Apsi et Fedil-ICT, avons voulu créer la plate-forme ICTLuxembourg. L’objectif, au cœur de cette jeune association, est de pouvoir s’appuyer sur les ressources de plusieurs fédérations patronales, représentatives du secteur ICT, pour travailler sur des enjeux communs en vue d’établir un lobbying plus efficient, autour de questions essentielles pour l’ensemble du secteur et de proposer des événements de meilleure qualité. »

Autrement dit, l’enjeu est de créer une fédération des fédérations. EuroCloud Luxembourg, l’Association des PSF de Support ou encore l’ABBL, ont tout de suite adhéré au projet de l’Apsi et de Fedil-ICT et figurent parmi les membres fondateurs de l’association. ICTLuxembourg devrait être rejointe, d’ici la fin de l’année, par la FDI qui a montré un vif intérêt pour le regroupement. « Plutôt que de laisser chacun jouer son rôle de lobbyiste dans son coin, nous pensons en effet plus opportun de pouvoir parler d’une même voix, afin d’avoir plus de poids, commente Nico Binsfeld. D’autre part, il est plus pertinent de pouvoir présenter un agenda commun, pour proposer des événements de qualité, avec des intervenants de premier choix. C’est la raison pour laquelle nous avons demandé à pouvoir rejoindre ICTLuxembourg. »

Chacune des associations, dans ce cadre, garde son identité propre et une totale autonomie, pour continuer à travailler sur des thématiques qui lui sont spécifiques. Mais toutes rassemblent leurs ressources pour travailler ensemble, sur divers sujets relatifs à des intérêts communs, ceci sous la coordination d’un secrétaire général.
Identité préservée

Parmi eux, la promotion des métiers et des compétences ICT, le cadre réglementaire et fiscal du secteur au Luxembourg et le positionnement de la Place à l’étranger. « Avec ICTLuxembourg, chaque association est confirmée dans son rôle propre et nous pouvons, de manière plus efficace, défendre des positions communes auprès des autorités, pour un meilleur développement de la place dans l’intérêt de chacun », explique Jean Diederich.

Aujourd’hui, ICTLuxembourg, organe représentatif de la plupart des acteurs de la Place, est devenu l’interlocuteur privilégié des autorités. L’ensemble des acteurs, dès lors, parle d’une même voix autour des questions relatives au cadre législatif, comme celles qui concernent la loi sur l’archivage électronique par exemple. Cela permet d’avancer plus vite et mieux. « ICTLuxembourg existe désormais depuis deux ans. Ce laps de temps a été nécessaire pour nous aligner, développer la confiance entre les différents acteurs, informer nos membres des changements opérés. Force est de constater qu’aujourd’hui, même les plus sceptiques ont adhéré à notre idée », explique M. Diederich. Le constat a été assez immédiat : sur les enjeux essentiels, les différentes fédérations n’ont pas eu de mal à dégager un discours commun.

Pour la promotion de la Place à l’étranger, la plate-forme ICTLuxembourg prend tout son sens et l’agence de promotion Luxembourg for Business « Proud to promote ICT » la considère à présent comme partenaire. « La Place s’internationalise. C’est une bonne chose pour le développement futur. Mais il faut redoubler d’efforts pour, désormais, promouvoir les atouts du Luxembourg au plus grand nombre. Toutefois, avant la mise en œuvre d’ICTLuxembourg, la présence d’une multitude d’associations rendait la chose plus compliquée à mettre en pratique. Pour nos interlocuteurs à l’étranger, qui parfois ne savaient même pas où se situait précisément Luxembourg, cela pouvait paraître extrêmement flou et complexe, assure Gérard Hoffmann. Sous une même bannière, avec un logo unique et clair et un partenariat fort avec les autorités publiques, les acteurs promeuvent la Place de manière cohérente, et nous avons ainsi gagné en visibilité. »

Mieux dialoguer avec la recherche

La création d’ICTLuxembourg facilite aussi le dialogue, dans le cadre de la mission du cluster ICT de Luxinnovation. « Notre rôle est d’initier des projets innovants au sein du secteur ICT au Luxembourg, précise Jean-Paul Hengen, Luxembourg ICT Cluster manager. Pour cela, nous rassemblons les acteurs des secteurs privé, public et de la recherche, avec les centres de recherche publics et l’Université, en vue d’avancer dans cet objectif. »

L’ICT Cluster a donc avant tout un rôle de moteur de l’innovation pour tout un secteur. Dans cette optique, il met en relation les différents acteurs dans des groupes de travail sur des thématiques spécifiques, définis par un steering committee rassemblant l’ensemble des acteurs. « Au cœur de notre mission, il faut pouvoir rassembler des techniciens, mais pas seulement, explique Jean-Paul Hengen. Dans la mesure où l’ICT n’est pas une fin en soi, mais un outil, il doit permettre de faciliter la vie aux uns et aux autres. Dès lors, il faut avoir une vue sur les enjeux, mais aussi sur les besoins des utilisateurs. À ce niveau, la présence des acteurs de terrain, aux côtés des chercheurs, est importante. Aujourd’hui, l’avantage est que les acteurs du secteur privé sont représentés dans leur ensemble par les membres d’ICTLuxembourg. »

Avec un seul interlocuteur, il est plus facile d’avancer sur les diverses politiques à mettre en œuvre. Les différents groupes de travail ont été mis en place autour des thématiques « ICT for a healthy and ageing population », « ICT for green », « e-paiement & e-voicing » et « Location Based Services ». Ces groupes, qui se réunissent tous les trois mois environ, ont pour objectif d’initier des rencontres, des discussions avec l’espoir de mieux mettre en phase les projets de recherche et les attentes du privé ou du public. Elles pourront déboucher sur des projets innovants, portés par les acteurs qui y prennent part. « L’enjeu, s’il n’est pas de défendre les intérêts des uns et des autres, est bien de fédérer les acteurs pour stimuler le business en s’appuyant sur les technologies nouvelles et l’innovation, ajoute Jean-Paul Hengen. L’objectif, derrière, est de pouvoir développer des dossiers qui pourront bénéficier des aides inscrites dans la législation relative à la recherche, au développement et à l’innovation. »