Virginie Aubin se trouve à la tête d'un service jeune mais important dans une entreprise où les profils sont aussi divers que complémentaires. (Photo: Annabelle Denham)

Virginie Aubin se trouve à la tête d'un service jeune mais important dans une entreprise où les profils sont aussi divers que complémentaires. (Photo: Annabelle Denham)

Madame Aubin, vous êtes directrice des ressources humaines chez Autopolis depuis 2012. Comment voyiez-vous votre fonction avant de l’occuper? Et comment l’envisagez-vous aujourd’hui?

«À l’époque, chez DCL Group, j’ai constaté que si le personnel n’était pas pris en main, cela pouvait rapidement virer à l’anarchie. Chacun a besoin de repères, d’une vision claire quant à sa position et ses missions au sein de la société. Quand mon ancien employeur m’a donné la chance de créer les RH au sein de DCL Group en 2007, c’était l’occasion pour moi de devenir ce point de repère. Une fois active dans ma nouvelle mission, j’ai compris que j’avais également une fonction de support stratégique à mener envers la direction générale et qu’il fallait exercer un contrôle permanent de la bonne application des règles légales en interne. Étant quotidiennement en contact avec tout le personnel, j’ai fini petit à petit à le considérer un peu comme mes enfants. Certes nous ‘choisissons’ de travailler ensemble, mais néanmoins, il faut exposer les règles à suivre dès son arrivée et les rappeler de temps à autre. Il faut également le former, le recadrer, voire le sanctionner en cas d’erreur. À l’inverse, pour saluer son travail, on le récompense par des primes par exemple, ce qui permet de le garder motivé. Pour finir, j’ajouterais qu’il faut être constamment à l’écoute de son personnel et savoir déceler ce qui ne va pas, même si ce n’est pas exprimé oralement.

Pourquoi avez-vous quitté le milieu de l’internet pour celui de l’automobile?

«Quand on m’a contactée pour me proposer un poste de DRH chez Autopolis, cela faisait neuf ans que j’exerçais dans le secteur informatique et je n’avais pas prévu de changer de cap. Une fois la description de la fonction exposée, qui se voulait généraliste et variée comme je l’aime, ce n’est qu’après avoir fait plus ample connaissance avec Ed Goedert et Marc Devillet que j’ai décidé de franchir le pas. D’une part, nous partageons la même vision du management du personnel et d’autre part, faire partie de cette direction charismatique m’a plus que motivée à relever ce challenge.

N’avez-vous pas eu peur de repartir à zéro?

«Le pari était risqué! En milieu de carrière, je quittais un poste confortable dans lequel mon quotidien était rodé pour tout recommencer depuis le début, avec la particularité de découvrir le monde ‘ouvrier’ totalement inconnu jusque-là. Mais ma passion pour les voitures a pris le dessus et je savais que j’arrivais dans une structure qui était déjà bien gérée. Nouveau membre de la direction, il a fallu que j’instaure un climat de confiance aussi bien du côté du personnel que de la direction elle-même. Je n’ai érigé aucune barrière ni enfilé aucun masque. J’ai tout simplement expliqué à mes collaborateurs que j’avais un titre avec des responsabilités, comme tout employé a sa fonction, à cette différence que la mienne pouvait être répressive.

Quelles actions avez-vous pu mettre en place pour améliorer les RH?

«Dès mon arrivée, nous avons participé au label Great Place to Work, qui est donné aux sociétés dans lesquelles il fait bon travailler. Cette mission a facilité mon intégration. À travers la partie audit, j’ai pu découvrir assez rapidement les procédures existantes. Le questionnaire visant à interroger les salariés sur leur vision d’Autopolis dans leur quotidien a, quant à lui, révélé les points sur lesquels nous devions travailler en priorité. J’ai commencé au printemps 2013 par la mise en place d’évaluations des performances pour tout le personnel. Puis, cette année, j’ai repris la gestion des salaires en interne ainsi que toute la partie administrative liée à la gestion du personnel. Ceci a renforcé les échanges avec mes collaborateurs. Ils reçoivent des réponses claires et immédiates à toute question d’ordre salarial ou en relation avec le domaine social. Un règlement d’ordre intérieur a également été instauré et nous travaillons actuellement à la mise en place d’une plateforme de partage de données pour offrir une meilleure visibilité des informations et communiquer sur toute sorte de changement.

Vous gérez 262 personnes. Avez-vous une idée de la façon dont les employés envisagent leur avenir chez Autopolis?

«Au travers de l’enquête de satisfaction menée début 2013 auprès des salariés, je peux affirmer qu’une grande majorité de nos collaborateurs est fière de travailler pour Autopolis. Elle a une grande confiance dans le management et, de par sa passion, un profond respect du métier malgré des conditions de travail parfois contraignantes pour certains, autant d’un point de vue physique qu’en termes d’horaire. Il arrive que certains salariés expriment leur intérêt pour les postes vacants internes. Nous essayons d’y répondre autant que possible.

Et qu’envisagez-vous pour 2015?

«Je suis chez Autopolis depuis à peine deux ans, il faut le temps de comprendre le fonctionnement d’une entreprise avant de proposer des idées plus poussées. Pour 2015, je veillerai à consolider ce qui a été mis en place et à en contrôler la bonne application. J’aimerais particulièrement m’investir auprès des jeunes et des établissements scolaires pour leur faire découvrir nos métiers qui sont bien souvent méconnus.

En 2013, vous avez travaillé activement à la mise en place d’une navette pour faciliter la mobilité des employés et des clients vers la zone de Bourmicht…

«L’IMS m’a en effet proposé de participer à un comité de pilotage de la zone de Bourmicht autour, notamment, de la problématique de la mobilité. Après de nombreuses discussions avec différents acteurs de la zone et le bourgmestre de Strassen, Autopolis a pris en charge la mise en place d’une navette entre la zone et la gare de Luxembourg pendant les heures de pointe. Ce nouveau service, proposé à 2 euros le trajet, répondait à une demande grandissante de notre clientèle. Cela nous a coûté beaucoup d’argent, mais la satisfaction de nos clients est notre priorité. Finalement, ce projet a débouché sur la création d’une ligne de bus. Désormais, certains de nos employés se déplacent en bus, ce qui améliore aussi leur qualité de vie.

Vous êtes arrivée au Luxembourg à l’âge de huit ans. Que représentent les langues pour vous?

«Mes grands-parents maternels sont d’origine alsacienne. Dès mon plus jeune âge, j’ai été confrontée à une langue germanique. Pour autant, apprendre le luxembourgeois n’a pas été chose facile. Ayant fréquenté, dès mon arrivée au Grand-Duché, les écoles luxembourgeoises, j’ai tout de même mis cinq ans à parler couramment la langue… Nous arrivions dans un pays étranger, c’était à nous de faire l’effort de nous intégrer. Je ne remercierai jamais assez ma maman de m’y avoir contrainte, car cela m’a ouvert beaucoup de portes, notamment sur le plan professionnel. Mes débuts chez Made by Sam’s m’ont permis de côtoyer de grands décideurs de la Place avec lesquels j’avais plaisir à échanger dans quatre langues. Chez DCL Group également j’avais affaire à beaucoup d’interlocuteurs internationaux. Maîtriser autant de langues facilite mes échanges et mon aisance relationnelle également lors de représentations extérieures. Autopolis regroupe plusieurs nationalités. Lors des recrutements, ou bien pour désamorcer certaines situations, je parle la langue qui convient. J’aimerais me mettre prochainement au portugais... Il suffit de ne pas avoir peur de parler ou de faire des erreurs pour apprendre une langue.

Autopolis compte une armée d’apprentis… et d’ouvriers. Deux profils différents ou complémentaires?

«Nous employons différents profils d’ouvriers. Nous avons des mécaniciens, des magasiniers, des préparateurs, des nettoyeurs, des carrossiers, des débosseleurs et des peintres. Pour tous ces métiers nous formons également une vingtaine de jeunes apprentis sur une durée de deux à trois ans. Ce sont des profils différents et à la fois complémentaires. Différents dans la mesure où un apprenti reste à former tant au métier qu’à la culture d’entreprise. Il lui faut un temps d’adaptation au rythme de travail ainsi qu’aux horaires. Nous avons la responsabilité de lui apprendre la notion d’engagement, tant envers son employeur qu’envers nos clients. Complémentaires dans le sens où les anciens transmettent aux juniors un savoir-faire et des astuces qu’ils ont appris tout au long de leur carrière. Un apprenti quant à lui peut apporter une vision et des techniques nouvelles. Nos apprentis sont nos ouvriers de demain.

Quelle est votre plus belle arme pour réussir dans votre fonction dans un milieu essentiellement masculin?

«Tout DRH doit être respectueux de son environnement, savoir écouter, être empathique, savoir analyser et agir. Il faut impérativement posséder un ‘courage’ managérial. Ce n’est pas tout de donner des directives, mais encore faut-il être juste, exposer des critiques objectives et prendre des décisions. Il faut assurer le secret professionnel, savoir défendre ses valeurs et une culture d’entreprise. En tant que femme, il faut une force de caractère inébranlable pour s’imposer dans un monde d’hommes et résister au charme dont certains pourraient user pour arriver à leurs fins. En tant que pilier, je ne dois montrer aucune faiblesse. Si je devais donner un conseil à ceux qui veulent se lancer dans ce métier, ce serait de se former également à la psychologie afin
de mieux comprendre les autres et savoir garder un certain détachement face à certaines situations compliquées que l’on peut être amené à gérer.»

Parcours
Un parcours diversifié
Dès son plus jeune âge, Virginie Aubin se destine au métier de psychologue.
«Mon souhait était d’aider les gens.» Finalement, elle emprunte la route du droit offrant davantage de débouchés professionnels, avant de se rendre compte que cette option était trop éloignée de ses aspirations profondes. Elle débute alors sa carrière en 1999 en tant qu’assistante de direction au sein des agences de communication Made by Sam’s puis Grey Worldwide (en 2001), avant de rejoindre le monde de l’Internet. En 2004, elle intègre Datacenter Luxembourg. Au bout de deux ans, Virginie Aubin se forme pour prendre en main la gestion des RH et créer ce nouveau département. Elle est alors promue head of HR pour DCL Group (dont fait partie Datacenter Luxembourg). Pendant cinq ans, elle gère près de 150 personnes et devient une DRH généraliste. En 2012, la Française, grande pratiquante de la course à pied, repart à zéro pour créer le service des RH chez Autopolis. À l’aube de ses 40 ans, elle avoue: «J’ai beaucoup de chance de pouvoir rouler dans de belles voitures et participer à des courses automobiles… Je suis devenue une passionnée de mon métier au travers d’Autopolis.»