Stefan Van Geyt est Group CIO de KBP epb. (Photo: KBP epb)

Stefan Van Geyt est Group CIO de KBP epb. (Photo: KBP epb)

Avant de songer à la macro-économie internationale et aux tendances d’investissement pour 2014, il convient de réfléchir aux schémas historiques de croissance sur le plus long terme, couvrant ici ces 50 dernières années. Entre 1961 et 2012, le PIB réel mondial a augmenté chaque année – sauf en 2008, au plus fort de la grande récession – d’une moyenne annuelle de 3,6%. Sur le long terme, la contraction globale du marché est une évidence aberrante.

Pendant cette même période d’expansion, la région Asie-Pacifique a dépassé de loin le reste du monde: avec un PIB annuel moyen de 5,7% ces 50 dernières années, cette région a progressé plus que deux fois plus vite que l’Europe (2,5%) et bien plus vite que les Amériques (3,3%) et l’Afrique (3,8%). Depuis des décennies, l’Est est sur la pente ascendante.

Revenons maintenant à aujourd’hui.

Au vu de ces tendances historiques, c’est sans surprise que l’on annonce une croissance de l’économie mondiale en 2014. Le FMI estime actuellement cette croissance à 3,6%, comparé à environ 3% ces deux dernières années. Qui plus est, sur cette même période, l’écart de croissance entre les économies développées et émergentes va se réduire, principalement en raison de l’essor freiné sur des marchés comme la Chine, l’Inde et le Brésil. Une autre raison expliquant la réduction de cet écart est que la plus grande économie mondiale, les États-Unis, va connaître une croissance durable en raison de la confiance retrouvée des consommateurs et l’accélération de la production nationale de pétrole brut.

Des défis persistants

Les perspectives pour l’Europe sont plus tempérées. Alors que la récession à double creux est terminée, l’économie reste ralentie par les défis persistants dans la région, où les améliorations commencent seulement à se faire sentir. Par conséquent, la croissance de la zone euro ne devrait pas dépasser 1 à 1,5% en 2014, alors que le continent remporte à l’arraché sa lutte contre la récession. Par ailleurs, bien qu’une augmentation substantielle du nombre de crédits dans la zone euro semble peu probable, le pire semble passé.

La reprise au Japon, favorisée par un assouplissement de la politique monétaire, un plan de relance dynamisé et des réformes dans les secteurs clés, devrait continuer. Les mesures agressives «Abenomics» entraîneront une hausse sur le marché des actions du pays, mais cela ne sera pas sans conséquence sur la valeur du yen. Partout ailleurs en Asie-Pacifique, la Chine restera le moteur de la croissance mondiale (avec une augmentation de son PIB qui devrait atteindre 7%), mais elle devra rééquilibrer sa croissance vers la consommation.

À l’exception de la deuxième économie mondiale, les perspectives pour les marchés émergents restent incertaines. Le Brésil, en particulier, stagne et les prévisions pour le reste de l’Amérique latine restent encore médiocres. En parallèle, la plupart des marchés du Moyen-Orient luttent pour atteindre une stabilité macro-économique. Néanmoins, comme l’histoire nous l’a appris, nous demeurons fermement positifs quant à la conjoncture de 2014.

Priorité à l’action

Qu’est-ce que cela signifie pour les investisseurs tournés vers l’international?

En cette période de rendements positifs et malgré une croissance chétive du PIB, le haut niveau constant du ratio cours/bénéfices explique l’enthousiasme des investisseurs. Les valorisations ne sont plus une bonne affaire, mais il y a peu de raisons de croire que les tendances actuelles favorables du marché vont s’inverser, ce qui fait des actions la classe d’actifs la plus intéressante en 2014, surtout au vu des rendements faibles ou négatifs des autres classes d’actifs.

Suivant les perspectives macro-économiques globales, nous privilégions les marchés développés – notamment l’Europe, où les résultats sont sur le point de retrouver le chemin de la croissance après des années de dégradation – aux marchés émergents, exception faite de la Chine. En Extrême-Orient, le Japon restera toujours favori en matière d’investissements l’année prochaine.

Sur le front monétaire, le dollar US devrait se renforcer ces prochains mois. Nous assisterons aussi sans doute à une remarquable «décorrélation» pour les investisseurs traitant en euros.

Nous observons d’ores et déjà les premiers signes de collecte des fonds d’investissement en fonds d’action, après des années de collecte en fonds d’obligations. Les prévisions pour le marché des obligations sont divisées et pourraient être touchées par les résultats des tests de résistance de la Banque centrale européenne et le potentiel désengagement de la réserve fédérale américaine. Les taux longs en subiront une pression d’autant plus intense.

Un bon point de départ

Les investisseurs contemporains exigent un haut rendement des obligations à long terme, et ils privilégient le court terme; il semblerait que nous arrivions enfin au bout de 30 ans de marché haussier des obligations à long terme. C’est pourquoi les investisseurs sont susceptibles de se tourner encore vers les obligations de sociétés, à rendement élevé et convertible – ces dernières continuant leur phase d’expansion grâce à la reprise du marché boursier américain et l’opportunité inhérente de bénéficier d’une volatilité accrue des prix.

Entre temps, les mises en chantier aux États-Unis devraient dépasser le cap du million – soutenant ainsi la création d’emplois et le tableau général du marché immobilier. Voilà une raison pour laquelle l’immobilier – en tant que classe d’actifs alternative – peut s’avérer très attractif, même dans un contexte de taux à la hausse.

En 2014, alors que l’économie mondiale continue son progrès inexorable, le défi pour les investisseurs reste d’identifier les conséquences de cette croissance sur le marché. Certes, personne ne peut prévoir ces fluctuations avec certitude, mais nous sommes cependant convaincus qu’une vision à long terme constitue un bon point de départ.

Investissement

Oublier les marchés émergents?

Depuis de nombreuses années, les marchés émergents étaient vus comme une composante indispensable d’une allocation d’actifs efficace dans des portefeuilles diversifiés sur le plan international. Mais les performances n’ayant plus été au rendez-vous ces dernières années, peu nombreux sont les spécialistes prêts à expliquer ce qui s’est révélé constituer des erreurs de prévision. De façon générale, les caractéristiques économiques de ces pays – aux perspectives de croissance supérieures à celles des marchés développés, aux finances publiques plus équilibrées – continuent à se combiner à des propriétés de gestion de portefeuille (comme une plus faible corrélation entre marchés) pour les rendre intéressants en termes de diversification au moins à moyen ou long terme.

Certes, les mouvements les plus récents des bourses émergentes incitent à revoir des problématiques que les experts avaient fini par ignorer. En premier lieu, l’espoir d’une forte «décorrélation» entre ces nouveaux et les anciens marchés s’est évaporé. La plupart des marchés émergents sont, en effet, fortement dépendants de sources de financement externe, surtout d’un point de vue de flux de capitaux dits spéculatifs. Il suffit que les acteurs américains ou européens décident, pour une raison ou une autre, de se reconcentrer sur leurs marchés domestiques respectifs pour que les performances des marchés de capitaux émergents se détériorent significativement.

En second lieu, considérer les marchés émergents comme un ensemble homogène dans lequel on pourrait effectuer des investissements de façon aléatoire n’est évidemment pas non plus une approche justifiable. Les pays individuels réunis sous une dénomination commune n’ont en réalité pas souvent de nombreuses caractéristiques en commun. S’étendant du nord au sud et de l’est à l’ouest de la planète, présents tant en Afrique, en Europe, en Orient et en Asie, ces pays se distinguent par la qualité de leur gestion macroéconomique et politique, leurs structures de production, de consommation ou d’investissement, leur degré d’ouverture au commerce international, leur organisation du travail ou encore leurs systèmes bancaires et financiers. Investir sans connaître l’ensemble des ces différences est d’autant plus risqué que l’absence fréquente d’efficience sur ces marchés conduit tout aléa dans le choix d’un pays à un possible désastre financier.

Nous restons pour le moyen et long termes confiants dans certains pays émergents. Si le scénario de consensus de stabilisation, voire de reprise économique mondiale, se concrétise, les risques d’effondrements des pays émergents s’éloignent. Il ne convient donc pas de jeter tous ces pays dans un même panier et de jeter le panier aux oubliettes.

Extrait de la chronique financière d’Yves Wagner (directeur chez BCEE – Asset Management), publiée sur paperJam.lu le 13/02/2014

Lexique

Chaque mois, propose des définitions de termes économiques et financiers. Des mots, des expressions que l’on entend souvent et dont on croit connaître le sens… Mais pas toujours.

Hedge funds

Ce sont des fonds de placement à risque ouvert, le plus souvent à un nombre limité d’investisseurs qui exigent un rendement élevé moyennant un investissement minimal initial important. Les investissements dans les hedge funds sont peu liquids, assortis d’une exigence d’indisponibilité des fonds pendant au moins un an. Ces fonds investissent dans tous types d’actifs. Complexes, ils ont régulièrement recours à des techniques de spéculation (produits dérivés, vente à découvert…) sur l’évolution des marchés. Les hedge funds, acteurs importants des marchés, y réalisent une part significative des transactions.

Gearing

C’est l’appellation d’un ratio qui met en relation l’endettement net et les fonds propres d’une entreprise. Le gearing est en général exprimé en pourcentage. Ainsi, une entreprise avec un gearing de 45% a un niveau d’endettement correspondant à 45% de ses capitaux propres. Ce ratio permet d’apprécier la solidité financière d’une société.

Venture capital

Le venture capital ou capital-risque est une des formes que peut prendre le capital investissement. Il s’agit d’un capital apporté par une société spécialisée à un projet innovant, au démarrage d’une société nouvelle (start-up), en accompagnement de l’expansion d’une entreprise à fort potentiel. Ou d’un processus de reprise, cession ou transmission. Dans ce type d’opération, l’apporteur de capitaux accepte de prendre un risque important dans l’espoir de réaliser à terme une plus-value proportionnelle au risque encouru. En général, les sociétés de capital-risque assurent un suivi actif de leur participation pendant trois ans, sachant que la prise de participation reste minoritaire et temporaire (cinq à sept ans). Le choix des projets financés est motivé par des critères différents selon chaque structure. Certaines sociétés de capital-risque privilégient les projets créateurs d’emploi, d’autres se concentrent sur la dimension régionale ou sur des secteurs spécifiques.