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Romain Bausch (SES) : « Une reconnaissance de l’importance que le Luxembourg revêt aux yeux de l’Agence spatiale européenne. » 

Le CEO de SES se réjouit de l’accession du Luxembourg à la coprésidence de l’ESA (Agence spatiale européenne), alors que des décisions stratégiques majeures vont être prises prochainement, notamment sur le dossier du nouveau lanceur européen dans lequel le Grand-Duché pourrait, une nouvelle fois, jouer les médiateurs entre la France et l’Allemagne.

Monsieur Bausch, le Luxembourg sera, à compter de ce mercredi, coprésident de l'Agence spatiale européenne (ESA) avec la Suisse. Que peut apporter le Grand-Duché dans cette position ?

« Il faut d’abord voir combien il est remarquable que le pays accède déjà à cette coprésidence, alors qu’il n’est membre de l’ESA que depuis 2005. C’est une reconnaissance de la contribution du pays dans ce domaine, et de l’importance que le Luxembourg revêt aux yeux de l’Agence.

L’un des dossiers les plus importants concernera le choix du lanceur qui devra succéder à Ariane V. Il c’est un moment crucial de l’ESA, en ce qui concerne le positionnement de l’Europe dans le domaine des lanceurs. Politiquement, comme cela semble être difficile de trouver un accord entre la France et l’Allemagne sur le sujet, peut-être le Luxembourg sera-t-il en mesure de jouer les médiateurs.

Le défi majeur est qu’il faut s’engager aujourd’hui sur la voie d’une nouvelle génération de lanceur, qui ne sera opérationnelle que dans dix ans, au mieux.

Dans le même temps, les Américains viennent de mettre au point, avec SpaceX, un tout nouveau lanceur Dragon. Est-ce à dire qu’ils ont une longueur d’avance sur l’Europe ?

« Ce n’est pas tellement la technologie utilisée par SpaceX qui est remarquable, mais son processus de production. Pour schématiser à l’extrême, la matière première arrive d’un côté du hall de production et le lanceur sort de l’autre côté. Il s’agit là de l’un des gros problèmes de l’industrie européenne pour construire son lanceur. Selon le principe du juste retour industriel, tous les grands pays veulent participer : la France en veut un bout, l’Allemagne, l’Espagne aussi… Le processus est loin d’être optimal, et génère des problèmes de coûts difficiles à compenser.

Chez SES, nous sommes le premier des principaux opérateurs à avoir noué un partenariat avec SpaceX. Nous avions conclu un premier contrat en mars 2011 et nous avons, en septembre dernier, signé pour trois lancements supplémentaires. Cela nous permet de diversifier nos risques.

Est-ce que SES va pouvoir, directement, tirer profit de la coprésidence luxembourgeoise de l’ESA ?

« Nous avons déjà, depuis de longues années, d’excellentes relations de qualité avec l’ESA. Mais cela se passe au niveau de la direction générale, et non pas au niveau du conseil des ministres de l’agence. Avec M. Biltgen (ministre des Communications, et co-président de l’ESA), nous disposons évidemment d’un point d’entrée supplémentaire par rapport à nos contacts traditionnels.

Par ailleurs, SES continue évidemment de travailler avec l’agence sur un certain nombre de projets. L’un d’entre eux consiste dans le développement de satellites de moyenne taille, à propulsion tout électrique. C’est une technologie qui se développe et qui, en combinaison avec le bon choix de lanceurs, peut considérablement réduire les coûts d’investissent dans un programme de satellites. Il est évidemment très important qu’il y ait, à côté des solutions américaines, des solutions européennes.

Les premiers prototypes devraient être disponibles d’ici à deux ou trois ans, et il s’agira ensuite de savoir dans quelle mesure nous allons nous engager financièrement, pour entrer ensuite en phase d’acquisition. »