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Au quotidien, les technologies de l’information et de la communication (TIC) ont envahi toutes les sphères de la société. Les entreprises, parfois réticentes au début, ont suivi la tendance. Et si leur degré de maturité «technologique» peut être très variable, l’utilisation de l’informatique est devenue une habitude. Par ailleurs, quand on sait que les entreprises les plus au fait en matière de TIC sont aussi les plus actives sur le terrain de l’innovation, on comprend mieux l’appel croissant au conseil en ce domaine. «Le mouvement est sensible. De plus en plus de sociétés repensent en profondeur la façon de servir les clients, d’inter­agir avec les fournisseurs ou sous-traitants, dans un contexte technologique de plus en plus complexe», résume Patrick Laurent, associé chez Deloitte.

Etoffer la cible

Au Luxembourg, les acteurs du conseil sont pour la plupart issus du secteur bancaire. C’est dans ce domaine exigeant qu’ils ont fait leurs armes et leurs preuves. Cette expérience peut aujourd’hui profiter à d’autres secteurs d’activité, clairement identifiés pour la plupart. «Depuis 2008, nous avons pris la décision stratégique d’étoffer notre cible, confie Frédéric Robin, en charge de la diversification chez Accenture. Nous avons identifié trois axes de développement: le secteur public, y compris les institutions européennes et le secteur de la santé, la communication et les nouvelles technologies et, enfin, le domaine industriel.» Au final, tout le monde ou presque est appelé à remettre en question sa façon de travailler et de gérer son affaire, en s’offrant les outils les mieux adaptés et les plus performants.

«Pour nous, le défi est de montrer à un directeur informatique ou à un CEO qu’il peut, grâce à un investissement bien réfléchi, obtenir un retour sur cet investissement dans l’année. Les dépenses TIC sont rarement obligatoires, mais bien souvent nécessaires», constate Serge Bertoldo, IT consulting leader chez PwC Luxembourg. L’informatique n’est plus un centre de coût, comme beaucoup le pensent, mais un outil de gestion et de décision qui permet de mieux diriger la barque et de prendre les bonnes décisions en temps voulu afin de dégager du bénéfice.

A ce titre, l’analyse des données peut servir le plus grand nombre. Et si les TIC sont longtemps restées une boîte noire pour beaucoup, le monde évolue. Tout comme le métier de consultant. «Un de nos principaux défis est de suivre cette évolution phénoménale, précise encore M. Bertoldo. La personne qui fait de l’IT va changer radicalement de sujet tous les cinq ans. Prenons l’exemple d’un mécanicien aujourd’hui. La première chose qu’il fait est de brancher un ordinateur qui lui donne une vue d’ensemble du véhicule et l’aide à solutionner les pannes éventuelles. Au même titre, ce qu’on attend d’un consultant, c’est qu’il puisse comprendre le métier de l’utilisateur, ses besoins et ses attentes, et offrir un outil performant et efficace.»

Le secteur industriel est largement demandeur d’un accompagnement au changement. Une démarche où l’optimisation des coûts, de l’efficience et de la qualité est au cœur du processus. «Une question à se poser est de savoir si le système informatique en place est en lien avec les besoins du client, note M. Laurent (Deloitte). Il est désormais primordial d’aider le chef d’entreprise à avoir une meilleure vision sur son activité. Les sujets à traiter sont relativement complexes. Ils incluent des volets technologiques et des volets métier très poussés.»

Face à une concurrence mondiale accrue, les industriels doivent se doter d’outils de gestion performants afin de rendre la chaîne de production plus efficace et l’interconnexion avec les sous-traitants et autres intervenants la plus optimale possible.

Produits génériques

«Jusqu’ici, les patrons n’ont jamais eu l’habitude de formaliser grand-chose, mais l’industrie monte en maturité sur la question des TIC, ajoute M. Laurent. Notre rôle est désormais de les accompagner sur le chemin du changement. Les pistes peuvent être diverses. On assiste d’ailleurs de plus en plus au recours à des services standardisés. On vit actuellement une prise de conscience. On se rend compte, par exemple, qu’outsourcer certains processus secon­daires n’altère pas la compétitivité ou l’efficacité d’une entreprise.» Certaines barrières tombent, petit à petit.

Cette ouverture aux solutions mutualisées performantes, Cetrel en fait l’expérience chaque jour qui passe. «Voici peu de temps encore, nous développions des projets spécifiques, client par client, constate Renaud Oury, vice president business line shared services. Désormais, on se base davantage sur des produits génériques. Cela permet notamment d’obtenir un résultat plus rapide à moindre coût. Le client a gagné en maturité. Il connaît ses besoins et attend de nous qu’on l’aide à y répondre.»

Créée par la place financière pour la place financière, Cetrel est un bel exemple d’une entreprise qui réfléchit à sa diversification. «Là où, voici quelques années, le consultant s’intéressait presque exclusivement au hardware et à l’infrastructure, nous nous positionnons de plus en plus au niveau des couches applicatives. L’offre en datacenters est très grande au Luxembourg. Les solutions de hosting sont nombreuses. Par contre, nous sommes peu à offrir de véritables solutions ERP. On rejoint l’évolution générale: là où le hosting concerne l’informaticien, l’outsourcing applicatif s’adresse aux métiers.»

C’est essentiellement autour des questions de l’archivage électronique et de la sécurisation des données que Cetrel est à même de développer des solutions vers de nouveaux secteurs. «En interne, l’archivage coûte très cher. De plus, Cetrel, de par son statut et son historique attaché au secteur bancaire, dispose d’une grande crédibilité sur le plan de la sécurité. La loi va évoluer, mais il est certain que l’industrie ou le secteur de l’assurance, pour lesquels les coûts de gestion du papier sont énormes, auront à l’avenir d’énormes avantages à utiliser l’e-archivage.»

Encore faut-il convaincre les patrons de sortir les archives de leur environnement pour les stocker dans les datacenters luxembourgeois. Mais le secteur a bon espoir. «Les initiatives réglementaires en cours dans le domaine de la dématérialisation vont aller de pair avec un déploiement de nouvelles solutions TIC, avec l’apparition de tiers ‘archiveurs’ qui vont s’occuper de la chaîne de valeur», prédit Patrick Laurent (Deloitte).

Quitter la préhistoire

Vis-à-vis de l’entreprise elle-même, la gestion de la virtualisation va constituer un tournant important. Le challenge se focalise autour de la question plus large de la protection des données, une question qui touche tant à l’organisationnel qu’aux technologies proprement dites. En la matière, le secteur de la santé et le secteur public de façon générale sont actuellement à un tournant de leur histoire. «Certaines communes en sont encore au stade de la préhistoire, constate Serge Bertoldo (PwC Luxembourg). A l’heure où une majorité de la population utilise Internet et les smartphones, les pouvoirs publics vont devoir rénover leurs systèmes d’information.»

Ce virage à 180 degrés, les hôpitaux luxembourgeois, par exemple, sont en train de le négocier. «Nous les accompagnons actuellement dans la mise en place d’un système RH mutualisé. Cela va de la définition du tronc commun et des processus jusqu’à l’implémentation du système sur le terrain, explique Frédéric Robin (Accenture). Le système des soins de santé est en pleine transformation, pas mal de choses vont devoir évoluer dans les années à venir. On parle notamment de la création du dossier patient partagé.»

Dans ce dossier, l’expertise internationale, dont peuvent se prévaloir bon nombre d’acteurs du marché, a été utile, puisque des équipes d’Accenture basées à Singapour ont déjà eu l’occasion de plancher sur ce système de dossiers patients partagés.

Cette ouverture vers l’extérieur constitue évidemment un avantage pour l’économie locale, qui n’a pas peur de s’inspirer des meilleures pratiques venues de l’étranger et de les adapter à sa sauce. La tendance globale est à la mutualisation des moyens au sein d’une société en évolution constante qui cherche à réduire ses coûts de fonctionnement, sans rien perdre en compétence ni spécialisation.

 

Evolution - Services mutualisés, expertise centralisée

Dans le domaine des prestations IT, la tendance globale est à la mutualisation des outils. «‘Quels sont vos services génériques?’ et ‘Comment peut-on les adapter à nos besoins?’ sont des questions récurrentes à l’heure actuelle», constate Renaud Oury (Cetrel). L’utilisation de plus en plus fréquente de services standardisés permet, en premier lieu, de réduire les coûts. Elle permet aussi de bénéficier de solutions éprouvées par le plus grand nombre, à l’échelle d’un pays ou de la planète pour certaines. Les grands prestataires informatiques disposent ainsi de centres de compétences partagés qui travaillent sur des problématiques bien définies et livrent leurs solutions en tenant compte des spécificités de chaque client. «L’idée est aussi de bénéficier de projets qui viennent de l’extérieur et de les adapter au contexte luxembourgeois, note Frédéric Robin (Accenture). Grâce à la facilité d’échange entre les différentes entités réparties à travers le monde, il est possible de s’appuyer sur de véritables usines de développement, aptes à mettre en œuvre des solutions plus rapidement.»

Développements - Sans oublier le secteur financier

S’ils cherchent à diversifier leur portefeuille client en s’ouvrant à de nouveaux secteurs, les professionnels de la consultance IT n’en oublient pas pour autant leurs premiers clients, à savoir les banques luxembourgeoises. «On pense parfois, à tort, que les besoins du secteur financier se restreignent, constate Serge Bertoldo (PwC). Or, les défis futurs sont nombreux. La presse internationale relate régulièrement les problèmes des banques confrontées à des hackers qui vont jusqu’à prendre le contrôle des opérations de home banking de certaines personnes. Cet aspect sécurité est un axe sur lequel nous devons absolument travailler à l’avenir.»
Sans compter que le monde évolue, que les paiements par l’intermédiaire d’un smartphone vont se généraliser et que d’autres questions vont en découler. Le public est en attente de solutions pratiques et faciles, les institutions bancaires ne pourront pas longtemps l’ignorer…