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Contexte et définition

Le millénaire dernier, à l'ère de nouvelle économie, le e-marchand et le e-client ont cru un instant que les autoroutes de l'information seraient la voie nouvelle et substitutive pour faire se rejoindre le produit du premier et le besoin (quand il existait) du second.

Aujourd'hui, à l'ère de la Netéconomie, tout le monde se souvient qu'une autoroute n'est qu'un moyen de communication, certainement rapide, mais surtout utile pour connecter des acteurs regroupés en communautés d'intérêt, de compétences,?

Dans ce contexte mouvant, un acteur a mis son pragmatisme à profit pour confirmer son rôle essentiel d'intermédiaire et devenir un vecteur de différenciation fort, un atout concurrentiel aux niveaux commercial, industriel et financier: le logisticien.

La maxime de tout bon logisticien était «Le bon article, au bon endroit, au bon moment, au moindre coût et en bon état», elle se complète aujourd'hui de «La bonne information, au bon endroit, au bon moment et au meilleur rapport prix / service client et toujours - bien sûr - en bon état».

Le logisticien avait appris à maîtriser l'ensemble des flux et opérations physiques (ordonnancement, optimisation, traçabilité,?) et à coordonner l'ensemble des ressources (y compris l'informatique) nécessaires à la SATISFACTION de son client.

Il opérait depuis longtemps dans un environnement complexe sous contraintes économiques, sociales, juridiques, organisationnelles.

De plus, il était également détenteur d'une source de valeur qui allait devenir primordiale: l'information. Non seulement la connaissance des volumes en stock, des circuits d'approvisionnement, mais également des informations qualitatives et quantitatives concernant les fournisseurs, le produit, et surtout dans le contexte actuel' le client.

D'autre part, les grands systèmes d'information intégrés des entreprises, type Enterprise Ressource Planning (ERP), permettent de transmettre par échanges de données informatiques (EDI) l'information essentielle à la gestion des commandes, la facturation et, dans certains pays, la douane.

Ils ne sont cependant pas adaptés au suivi de la marchandise. Ce dernier est assuré dans la majorité des cas par les systèmes des prestataires logisticiens ou transporteurs.

Du transport à la distribution en passant par la production, la plupart des informations circulent en fait à l'extérieur de l'entreprise. Les prestataires de services logistiques se trouvent donc en position stratégique pour recueillir les données dont le client a besoin pour orienter son activité. Dans bien des cas, ils sont même les seuls à entrer en contact direct avec les clients!

Cette relation prend une importance d'autant plus grande que la part matérielle de la valeur des biens tend à diminuer. Vendant de plus en plus de «matière grise», le commerçant doit être de plus en plus capable de réagir rapidement aux demandes de ses clients, et même de les anticiper.

Après ce rapide survol du contexte, plutôt que de tenter de définir l'e-logistique au sens strict, je vous propose deux définitions de concepts liés.

L'eSupply chain s'étend du consommateur final jusqu'au fournisseur de composants en passant par les achats, l'approvisionnement, la production, le traitement des commandes, l'entreposage, la distribution et l'ensemble des relations qui lie tous les partenaires de la chaîne logistique globale (clients, fournisseurs internes et externes, sous-traitants, prestataires divers).

Il s'agit à la fois d'optimiser le niveau de service offert au client et le partage d'information au sein de l'organisation. Par exemple? les prévisions de ventes de planning, de nouveaux modes de collaboration interne et externe et les systèmes d'information pour piloter le processus global de la supply chain (l'eSupply chain).

L'e-fulfilment, c'est la délégation par un webmarchand de certaines opérations matérielles sur un prestataire externe (gestion, expédition et facturation des commandes).

Impacts organisationnels et informatiques

Le traitement et le partage de l'information ainsi que la capacité à générer des prestations à valeur ajoutée pour le client sont donc des éléments clés qui joueront un rôle primordial dans le commerce de demain.

En replaçant le client (final, interne ou entreprise) au c'ur du système et en procurant à l'information la cotation d'une matière précieuse, Internet a entraîné les professionnels de la logistique dans une dynamique d'amélioration: plus de services et plus d'informations.

Pour les acteurs de la logistique, il s'agit d'intégrer les technologies de l'Information et de la Communication pour:

- Utiliser les TIC pour améliorer leurs processus (internes ou faisant l'objet de leurs prestations) à des fins d'efficience, d'efficacité, de réactivité et de rentabilité.

- Intégrer les TIC dans leur offre de services en proposant en plus des traitements logistiques traditionnels une offre «systèmes d'informations»

Par rapport à ces points, je vous propose un rapide survol des grands axes de cette évolution:

- La logistique de flux (reposant sur la fiabilité des prévisions en amont et en aval) doit intégrer les besoins de plus en plus ciblés et difficilement prévisibles du client; elle devient une logistique de réactivité.

- Les commandes «réseaux», induisaient un stockage de masse, des livraisons de palettes, des commandes relativement homogènes et un nombre de lignes (articles différents) limité. Le e-commerce induit des commandes individuelles qui sont souvent des petits colis (type VPC), livrés directement de chez le fournisseur, nécessitant des opérations complémentaires de type «resplenishment», cross docking, regroupement)

- Les standards évoluent également, l'EDI (EDIFACT) et Internet (XML),

- Il faut aussi que le Supply Chain Management ne se limite pas à une logique orientée achats et approvisionnements mais intègre complètement la dimension logistique de livraison voire de destruction ou reclassement du produit.

- L'information détenue par le logisticien n'est pas uniquement exploitable dans les fonctions production ou distribution mais également dans le cadre du marketing (e-SCM, CRM,?),?

Quels sont les outils pour cela? Il existe trois grandes familles de logiciels à la disposition des logisticiens.

Logiciels d'optimisation de la chaîne logistique d'approvisionnement (Supply Chain Management, SCM)

Logiciels de planification (Supply Chain Planning, SCP): il en existe deux grandes familles. Tout d'abord les éditeurs historiques de PGI SAP avec APO (Advanced Planning and Optimization), Baan, JD Edwards. Ils proposent un modèle de données unique pour élaborer une simple chaîne logistique interne. Ensuite les nouveaux entrants: I25, Manu6, puis Synquest (approche financière du SCM), Aspen (industrie du process), Logility (Grande Distribution). Ils proposent des relations avec des partenaires et des clients disposant de leur propre système informatique.

Logiciels d'exécution logistique (Supply Chain Execution, SCE): ils permettent la gestion des systèmes de transport, des entrepôts et le pilotage définitif de la chaîne. La SCE regroupe l'ensemble des outils informatiques contribuant à maîtriser les flux relatifs aux opérations logistiques effectivement réalisées tout au long de la chaîne d'approvisionnement. Les outils d'exécution sont promis à un bel avenir. Avec le développement du e-commerce, le marché s'organise de plus en plus en mode pull (le client appelle le produit) et le principal enjeu devient l'exécution.

Logiciels de planification avancée (Advanced Planning Scheduled, APS): ces outils permettent à une entreprise de s'engager sur une date de livraison (Available To Promise, ATP) quand un client la sollicite en urgence.

Progiciels d'interconnexion des ERP (Network Requirement Planning, NRP) permettant un développement de partenariat étroit sur les prévisions. Ce qui permet de ne produire que ce qui est vendu.

Par rapport à ces différents points, il convient toutefois d'émettre un avertissement: en devenant à la fois l'expert du traitement physique et un fournisseur de prestations de services liées aux systèmes d'information, le e-logisticien propose une offre intégrée, pouvant couvrir l'amont et l'aval des processus des organisations clientes. Le risque de cloisonner le client dans un standard propriétaire et fermé existe.

À l'ère de l'interopérabilité des systèmes d'informations, le e-logisticien ne doit pas commettre l'erreur d'empêcher son client d'avoir une vision globale de sa logistique. En fait, le e-marchand de demain offrira sans doute un panel d'offres correspondant à des fournisseurs différents.

En effet, il existe des expertises géographiques, sectorielles, liées au produit traité ou au mode de transport qui empêcheront l'expertise universelle. Certains professionnels de la logistique se spécialisent d'ailleurs en tant qu'architecte de la prestation logistique. En connaissance des forces et faiblesses de chacun des experts, il combine les prestations.

Il est à noter que dans ce rôle d'architecte, le prestataire répond du fait de ses substitués et s'engage sur une obligation de résultats et propose souvent un Service Level Agreement.

En résumé, l'e-logisticien se reconnaît au sein de nos organisations par son pragmatisme, sa capacité à transformer des schémas d'échanges virtuels en réalités opérationnelles  mais également par sa capacité à conduire des actions d'amélioration des processus. Le tout avec un sens aigu du service client.

Bref, il est certainement un des garants essentiels de l'image de nos entreprises.

Ne le sous-estimons pas'