La Cour européenne des droits de l'Homme a mis trois ans pour statuer sur ce dossier.  (Photo: CEDH)

La Cour européenne des droits de l'Homme a mis trois ans pour statuer sur ce dossier.  (Photo: CEDH)

5.635 euros: c’est le montant que le Luxembourg devra sans doute verser, pour frais et dépens, à Saint-Paul Luxembourg, éditeur de l’hebdomadaire lusophone Contacto, suite à un arrêt rendu, ce vendredi, par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH).

L’institution, basée à Strasbourg, s’est prononcée dans le cadre d’une affaire liée à un article paru en décembre 2008 et qui décrivait la situation de familles s’étant vu retirer la garde de leurs enfants. L’auteur de l’article traitait du cas d’un assistant social en charge de deux adolescents dont les identités étaient dévoilées.

Suite à une plainte pour diffamation et pour violation de la loi relative à la protection de la jeunesse, déposée par le Service central d’assistance sociale, le parquet avait ouvert, dès janvier 2009, une information judiciaire contre l’auteur de l’article. S’en était suivi, en mai 2009, une perquisition, dans les locaux de Saint-Paul, au cours de laquelle le journaliste a, de manière volontaire, remis aux policiers les documents et prises de notes ayant servi à la rédaction de l’article.

Trois mois pour faire appel

Mais le lendemain, Saint-Paul et le journaliste saisirent le tribunal afin de voir annulées l’ordonnance de perquisition et de saisie, ainsi que son exécution. En première instance, tout comme en appel, la justice luxembourgeoise rejeta cette demande. D’où la saisine, en avril 2010, de la Cour européenne des droits de l’Homme, les plaignants estimant que deux articles de la Convention européenne des Droits de l’Homme avaient été violés: l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) et l’article 10 (liberté d’expression), elle se plaint d’une violation de sa liberté d’expression.

Près de trois années plus tard, la CEDH a finalement donné raison à Contacto et à Saint-Paul. Une chambre de sept juges, présidée par Mark Villiger (Liechtenstein), a estimé, d’une part, que la perquisition et la saisie du matériel n’étaient pas nécessaires et étaient disproportionnées par rapport au but recherché (en l’occurrence l’identification du journaliste auteur de l’article) et, d’autre part, que le libellé de l’ordonnance de perquisition était rédigé de façon trop vaste et permettait aux policiers, par exemple, de rechercher les sources du journaliste. Or, l’intention première étant la seule identification du journaliste, la Cour a estimé, là encore, qu’il y avait disproportion dans la réalisation de cette perquisition et de cette saisie.

Cet arrêt n’est toutefois pas définitif, puisque l’affaire est susceptible, dans un délai de trois mois, d’être renvoyée devant la Grande chambre de la Cour. C’est cette dernière qui décide d’un éventuel examen approfondi de l’affaire (à l’issue duquel sera alors rendu un arrêt cette fois définitif), ou bien de clore le dossier sur l’arrêt rendu ce jour. Ce n’est ensuite que cet arrêt est transmis au comité des ministres du Conseil de l’Europe qui en surveille l’exécution.