Madame Brömmel, le Centre d'information et de documentation des femmes (Cid-Femmes) lance un appel pour constituer une base de données répertoriant des expertes, appelée Expertisa. Pourquoi cette initiative?
«Un media monitoring mené en 2010-2011 a montré que les femmes occupaient très peu de place dans les médias en tant qu'expertes ou dans les conférences-débats en tant qu'intervenantes. L'étude a aussi établi que la représentation qualitative des femmes, souvent sollicitées pour des sujets stéréotypés comme la beauté ou les soins, ne correspondait ni à la réalité, ni à la demande des consommateurs.
Cette façon connotée et dévalorisante de nous représenter, même les hommes interrogés la déplorent! En tant qu'ONG, le Cid-Femmes a cherché une solution pour mieux mettre les femmes en avant en créant une base de données facilement consultable.
Votre démarche se propose donc de faciliter les contacts et de créer des aubaines?
«Les journalistes travaillent parfois dans l'urgence: nous les aidons à étoffer leurs réseaux en se focalisant sur l'aspect expertise, justement parce que les femmes sont sous-évaluées et qu'au statut d'expert est attribué une certaine valeur.
Comment votre site internet, va-t-il fonctionner?
«Il va servir de plateforme d'échanges de données et de contacts à partir d'octobre. Il sera visible par tous: nous visons les médias, mais aussi les organisateurs de débats, de tables rondes, de sessions de formation, tout un public auprès duquel nous mènerons une promotion active.
En attendant, nous sommes dans la phase qui consiste à répertorier le plus d'expertes possible: nous avons recensé 450 personnes, et nous leur proposons de figurer sur notre site. Si 150 nous rejoignent, ce sera un bon début, car il nous faut convaincre que partager son savoir et étendre ses réseaux peuvent s'avérer utile et valorisant, donner une image réaliste et moderne du rôle de la femme dans la société.
Votre initiative s'inscrit dans un débat plus large que la représentation des femmes dans les seuls médias. Où en est le Luxembourg sur la question de l'égalité entre les femmes et les hommes?
«Les médias sont le reflet de la société et contribuent à la constitution d'une réalité: ils ont toute leur importance dans la lutte pour l'égalité. Cette question n'a donc rien de dérisoire. Pour le reste, si l'écart salarial entre hommes et femmes diminue, il reste beaucoup de chemin pour parvenir à l'égalité et le marché de l'emploi est le domaine où subsiste la plus grosse différence.
Expertisa peut-elle être rapprochée avec d’autres démarches telles le Female Board Pool lancée par Rita Knott?
«Nous sommes en contact avec Mme Knott: lier les projets est important, même si le Female Board Pool aborde la question des responsabilités au sein d'un conseil d'administration et nous, l'intervention des femmes dans les médias.
D'ailleurs, pour établir notre première liste de 450 contacts à solliciter pour figurer dans notre répertoire, nous avons notamment puisé dans le dernier Top 100 des décideurs économiques les plus influents réalisé par paperJam.
Le combat mené au niveau européen par la commissaire luxembourgeoise Viviane Reding a-t-il permis au pays d'avancer?
«La politique européenne en matière d'égalité des chances a un impact et nous n'en serions pas là, au Luxembourg, sans la politique européenne. En revanche, je constate que la ministre de l'Égalité des chances (Françoise Hetto-Gaasch) appartient au même parti politique (le CSV) que Viviane Reding, mais que sur la question des quotas dans les instances dirigeantes des entreprises, leurs visions sont opposées...»