Pour l’ouverture de la conférence intitulée «Message d’Alep: demain sera trop tard pour nous», une courte vidéo est projetée. On y voit une dizaine d’enfants, filmés dans une cave d’Alep, qui demandent pourquoi personne ne vient les aider. «Ça me fait mal au cœur de les entendre», commence Brita Hagi Hasan, le président du conseil local de la partie est d’Alep. Fatigué et las de décrire encore et encore l’horreur que vivent ses compatriotes, il enchaîne: «On dirait qu’Alep ne fait pas partie du monde, qu’elle se trouve sur une autre planète et que la communauté internationale n’est pas au courant.»

Suivent les descriptions de la situation actuelle dans la ville. «Les bombardements ont continué la nuit dernière, les cadavres jonchent le sol, ils sont partout dans les rues et on n’a pas le temps de les enterrer. 90% des blessés ne peuvent pas être soignés», raconte-t-il.

Ce qui se passe là-bas, à seulement quatre heures de chez nous, est inacceptable.

Dr Raphaël Pitti, spécialiste en médecine de guerre

Alep, l’un des joyaux de la Syrie, comptait avant la guerre civile deux millions d’habitants. Ils ne sont aujourd’hui plus que 50.000. Pris au piège entre les bombardements du régime de Bachar al-Assad et de son allié russe d’un côté, et les rebelles qui tiennent encore la ville de l’autre, ils attendent de partir… ou de mourir. Il n’y a plus d’eau potable, plus de vivres et même les hôpitaux sont visés par les bombardements. «On ampute les enfants sans les anesthésier», ajoute Brita Hagi Hasan.

À ses côtés, le docteur Raphaël Pitti, spécialiste français en médecine de guerre et engagé aux côtés des médecins syriens. «Ce qui se passe là-bas, à seulement quatre heures de chez nous, est inacceptable. Nous le voyons et nous laissons faire. Le droit international humanitaire, l’Onu, l’Europe… toutes ces grandes créations pour la paix du 20e siècle sont mortes à Alep», lâche le médecin.

Arrêtez la guerre! Arrêtez la guerre!

De jeunes Syriens réunis devant le Mudam

Puis il s’adresse à la Grande-Duchesse, qui fait partie du public: «Vous avez l’obligation morale de mobiliser votre gouvernement. Le Luxembourg peut porter l’ultimatum humanitaire que nous demanderons demain (ce jeudi, ndlr) au Conseil européen.» À la fin de la conférence, celle-ci se lève et dit: «J’ai honte et je souffre avec vous. Je me coucherai ce soir avec l’image de ces enfants.»

Dehors, un petit groupe d’une dizaine de jeunes Syriens s’est formé devant l’entrée du Mudam. Ils portent un drapeau syrien et crient à pleins poumons: «Arrêtez la guerre! Arrêtez la guerre!»