À chaque entreprise son histoire, à chaque entreprise son modèle. Ce qui vaut pour les multinationales est d’autant plus vrai pour les entreprises familiales locales où se mêlent les sentiments et beaucoup d’émotions partagées.
Les témoignages portés sur scène, lors d’une soirée 10x6 consacrée au passage de génération en génération et organisée ce mercredi au Tramsschapp, l’ont confirmé. Discutée, planifiée, couchée sur papier, la succession prend parfois une tournure inattendue lorsque la maladie frappe la génération précédente. C’est une nouvelle organisation qui peut alors se mettre en place, le cas échéant avec l’arrivée de membres externes à la famille au sein de la direction, comme ce fut le cas progressivement depuis 2012 au sein de la société de participation Rodenbourg, représentée hier soir par Frank, issu de la troisième génération.
Cette même année, la maison de torréfaction Knopes, née de l’autre côté de la frontière belge, a débuté son implantation au Luxembourg, sous l’impulsion de Fabien, représentant la quatrième génération: «Ce projet d’implantation au Luxembourg m’a aidé à tenir, car il représente un travail de mémoire.»
«Créer du consensus»
Qu’il s’agisse d’orthodontie (secteur représenté par Germain Becker, Becker & Associés) ou du domaine du luxe évoqué par Nicolas Graas (Hermès Luxembourg), la communication est apparue comme déterminante au fil de la soirée pour régler les problèmes de succession et assurer la pérennité de l’aventure familiale.
«Plus que la charte de gouvernance, c’est le processus et la communication qui sont importants», a confirmé Fernand Ernster, patron et propriétaire de la librairie éponyme qui a récemment célébré ses 125 ans d’existence. «Il faut d’abord créer du consensus au sein de la famille.»
Représentant quelque 70% des PME du pays, les dirigeants opérationnels éprouvent de plus en plus le besoin de recourir au regard extérieur d’experts pour gérer leur transmission, comme l’ont montré les témoignages d’Alexis Meeùs (Banque Degroof) et Alain Meunier (PwC Luxembourg).
«Des entreprises pas comme les autres»
Pour Paul Wilwertz, family practice advisor à la Banque de Luxembourg, «les entreprises familiales ne sont pas des entreprises comme les autres». «La succession est un transfert des rôles et un transfert des pouvoirs.»
Et pour exercer ces pouvoirs ou fonctions, les nouvelles générations ne se contentent plus de suivre la lignée familiale, mais effectuent des parcours initiatiques, souvent dans d’autres maisons.
Après avoir rejoint en 2012 l’entreprise de coiffure fondée par son père Jean-Marie en 1982, Laura Ferber a souhaité partir à l’étranger un an plus tard, consciente qu’elle devait accomplir d’autres expériences. Depuis cinq mois, elle est de retour pour développer de nouvelles idées, dont un mode de management participatif.
«Lors du processus de transmission, une des problématiques est la question de la légitimité», a précisé Antoine Clasen (Caves Bernard Massard) qui a pour sa part fait ses armes en Belgique avant de rejoindre l’entreprise familiale.
Plus que des questions de transmission de structures et de patrimoine, la soirée d’hier a aussi mis sur le devant de la scène les valeurs défendues par les entreprises familiales, revendiquées haut et fort par Carlo Cravat, gérant du Grand Hôtel Cravat et représentant de la quatrième génération.
«Nous sommes les garants d’une qualité et d’un dynamisme qui ne se retrouvent que très rarement dans les entreprises globalisées. Les clients aiment cela et nous le montrent tous les jours.»
La prochaine soirée 10x6 sera dédiée au fonds (d’investissement), sous toutes ses formes. Elle sera organisée le 29 avril.