Cette semaine à la Chambre, Pierre Gramegna devra mettre cartes sur table et dire si les rulings pourront aussi s'étendre aux impôts indirects.  (Photo: MinFin)

Cette semaine à la Chambre, Pierre Gramegna devra mettre cartes sur table et dire si les rulings pourront aussi s'étendre aux impôts indirects.  (Photo: MinFin)

«La Chambre de commerce se félicite de voir qu’il est proposé […] que la procédure des demandes anticipées s’applique tant aux personnes physiques qu’aux personnes morales»: c’est au détour de cette phrase exhumée de l’avis de l’organisation patronale sur le projet de règlement grand-ducal précisant la procédure pour obtenir des rulings qu’on apprend que le nouveau régime concernera aussi bien les entreprises que les particuliers. 

Le ministre des Finances ne s’est pas montré très expansif sur le champ d’application du régime d’encadrement des décisions anticipées qui entrera en vigueur au 1er janvier 2015, d’ailleurs il n’est nulle part (ni dans les articles ni dans l’exposé des motifs) mentionné explicitement qu’elles s’appliqueront aux personnes physiques. La référence est toutefois implicite à l’article 2 du texte que le gouvernement a soumis pour avis au Conseil d’État (qui n’a pas émis de réserves particulières) ainsi qu’aux organisations professionnelles. Il est ainsi prévu que les rulings relevant de la fiscalité des entreprises soient préalablement soumis pour avis à une commission des décisions anticipées avant d’être approuvés par le préposé du bureau d’imposition compétent. 

Comme tout ce qui n’est interdit est permis, il n’y a pas de raison de penser que les contribuables privés ne pourront pas aller négocier à l’avance, comme le font les entreprises, leurs impôts ou certaines transactions avec leur bureau d’imposition. D’ailleurs, le projet de règlement grand-ducal ne cantonne pas la fabrication des rulings au seul bureau 6 de l'Administration des contributions directes.

Quoi qu’il en soit, pour la communauté financière qui a sans doute inspiré la rédaction de l’avis de la Chambre de commerce, il ne fait pas de doute que les riches contribuables pourront désormais aller négocier avec le fisc leurs rescrits fiscaux.

Le patronat se demande d’ailleurs pourquoi la future commission des décisions anticipées, qu’il souhaiterait d’ailleurs voir rebaptisée en commission des rescrits fiscaux (CRF) – une abréviation déjà utilisée par la Cellule de renseignements financiers du Parquet, ce qui risque de prêter à confusion – ne traiterait que les cas relevant de la fiscalité des sociétés et pas celle des personnes physiques dans un souci d’application uniforme des décisions. «L’exigence d’application uniforme et égalitaire de la loi fiscale ne peut […] être restreinte aux entreprises (ou à certaines formes d’entreprises) de sorte qu’une demande portant sur la fiscalité des particuliers devrait […] également être soumise à l’examen de la CRF», souligne son avis.

Des recours pour les rescrits

La Chambre de commerce plaide également pour une extension de la procédure (donc un visa de la CDA/CRF) aux impôts indirects.

L’organisation patronale réclame aussi que le ministère des Finances cadre mieux dans le projet de règlement les règles de fonctionnement de la future commission (le nombre de ses membres, les règles de prise de décision et les délais endéans lesquels elle rendra ses décisions). Elle plaide aussi pour l’aménagement de recours contre les décisions de cette commission, alors que le gouvernement juge que les rescrits fiscaux, du fait de leur «caractère unilatéral», ne seront pas susceptibles de recours devant les juridictions administratives.

Alors que le projet de budget 2015 et le paquet d’avenir (qui doit réglementer les rulings) entrent dans la dernière ligne droite, la Chambre de commerce demande aux autorités de réécrire le projet de règlement qui viendra en complément de la loi pour «élargir certaines définitions, par exemple pour ne pas limiter les rescrits à la fiscalité des entreprises, ni aux questions de fiscalité directe.»

Pierre Gramegna devrait prendre position lors des débats à la Chambre des députés, alors que dans le même temps le ministre des Finances a discrètement abrogé, dans le projet de budget, une disposition qui lui permettait d’accorder, sur proposition de l’Administration des contributions directes et après le feu vert du conseil de gouvernement, de «déterminer forfaitairement l'impôt des personnes qui, venant de l'étranger, établissent leur domicile fiscal au Grand-Duché, et cela pour au maximum les 10 premières années de cet établissement».

Une disposition dont les ministres des Finances successifs avaient fait un usage parcimonieux.