L’avis de Ferdy Adam, Michel Geller et Serge De Cillia sur le risque possible d’une nouvelle crise financière. (Photo: Maison Moderne)

L’avis de Ferdy Adam, Michel Geller et Serge De Cillia sur le risque possible d’une nouvelle crise financière. (Photo: Maison Moderne)

«Des imprévus peuvent toujours arriver»

Ferdy Adam et Michel Geller, économistes à l’Institut national de la statistique et des études économiques (Statec)

Prédire une crise financière est impossible, et encore moins sur 10 ou 20 ans», lance Ferdy Adam, membre du comité de direction du Statec. Si le contraire était vrai, il ne s’agirait plus d’une crise. En revanche, le responsable de la «modélisation et des prévisions» explique que le Statec est sur le point de finaliser une étude censée «produire des prévisions des prochains ‘turning points’, c’est-à-dire quand l’économie atteint le bout de son cycle».

Je ne dirais vraiment pas qu’il faut s’attendre à une crise en 2018 ou 2019

Michel Geller, économiste à l’Institut national de la statistique et des études économiques (Statec)

Le responsable de l’étude, Michel Geller, estime d’ailleurs que l’Union européenne «se dirige» vers une fin de cycle économique. Il rassure néanmoins sur le fait que «les signes sont encore très faibles, donc je ne dirais vraiment pas qu’il faut s’attendre à une crise en 2018 ou 2019. Fin 2019, 2020, cela devient plus probable.» Dans le contexte de la zone euro, les responsables du Statec évoquent en outre l’inflation, qui n’a pas encore réellement augmenté, le chômage, qui ne vient que d’atteindre la moyenne de long terme, et les investissements, qui n’ont pas encore atteint un niveau élevé.

La reprise économique n’ayant que commencé à se porter elle-même, cela indiquerait que la phase de «boom» ne fait que commencer. «Dans cet état des choses, il est plutôt improbable qu’il se passe quelque chose d’imprévisible. Cela dit, des imprévus peuvent toujours arriver», ajoutent les économistes.

D’une manière générale, ces derniers estiment que lorsque l’économie va bien, il peut être utile de se doter d’une «force de frappe» pour que, lorsque la croissance chute, l’État puisse relancer l’économie.

«On est beaucoup plus stables qu’on ne l’était avant»

Serge De Cillia, CEO de l’Association des banques et banquiers Luxembourg (ABBL)

Un cycle économique se caractérise par des hauts et des bas, explique le CEO de l’ABBL. Outre le risque d’«accidents», qui peuvent être externes ou provenir de maisons mères, les éléments qui peuvent influencer le cycle sont la politique monétaire des banques centrales, les évolutions des portefeuilles sous gestion, le changement de comportement des clients et les risques de réputation, auxquels le Luxembourg serait toujours exposé. Cela dit, en termes de solidité du secteur bancaire, Serge de Cillia estime qu’elle a été renforcée depuis la dernière crise.

«Nous sommes extrêmement bien capitalisés», explique-t-il. En matière de solvabilité, les banques de la Place auraient des dotations en fonds propres à hauteur de 25% des bilans, et en 2016, 55% des bénéfices réalisés auraient été mis de côté. Pour résumer: «Non seulement nous avons davantage de fonds propres, mais en plus, la qualité des fonds propres est top.»

On a été prudents par le passé, mais nous n’avons pas tout fait.

Serge De Cillia, CEO de l’Association des banques et banquiers Luxembourg (ABBL)

S’y ajoutent toutes les mesures «imposées aux banques» en termes de compliance et de transparence fiscale. «On est beaucoup plus stable qu’on ne l’était avant», déclare le représentant des banques. En cas de hauts et de bas, Serge de Cillia estime qu’«il faut essayer d’anticiper un retour, et puis avoir suffisamment de coussins pour neutraliser l’impact négatif». Ce serait d’ailleurs «tout le talent des risk managers, qui est mis à contribution dans les bilans des banques et dans le comportement de notre personnel envers la clientèle». Et de conclure: «On a été prudents par le passé, mais nous n’avons pas tout fait. Désormais, le banquier luxembourgeois se caractérise toutefois par la prudence.» 

Retrouvez l’intégralité de l’interview de Serge De Cillia en cliquant ici.