Sophie Pierini et Brigitte Pochon (PL & A) (Photo : Oliver Minaire)

Sophie Pierini et Brigitte Pochon (PL & A) (Photo : Oliver Minaire)

Les entreprises connaissent-elles toujours les règles régissant les relations collectives de travail ? Ne font-elles pas régulièrement des erreurs évitables ?

Brigitte Pochon : « De bonne foi, les entreprises commettent des erreurs ou des irrégularités au détriment des droits des salariés, mais parfois également en leur défaveur. Ainsi, le fait de méconnaître leurs droits et obligations en matière de relations collectives conduit les employeurs soit à une trop grande flexibilité envers leurs salariés, soit à réduire leurs propres droits. D’où l’importance de l’information des employeurs et des délégués sur ce sujet.

Les conventions collectives de travail sont-elles toujours bien construites ? Sont-elles adaptées à des temps économiques plus incertains ?

Sophie Perini : « Historiquement, la convention collective de travail (CCT) fut l’instrument de lutte et d’amélioration de la condition salariale. Cependant, à force de conférer de plus en plus de droits aux salariés, la CCT est devenue pour l’employeur un obstacle à l’exercice de ses droits et de son pouvoir de gestion de l’entreprise. En conséquence, on observe une inversion des rôles concernant les revendications relatives à la convention collective. Les employeurs n’étant plus maîtres de leur propre entreprise sont obligés de dénoncer la convention collective afin de renégocier leurs propres avantages et plus de flexibilité, alors qu’auparavant, ces revendications étaient faites par les salariés dans le but d’améliorer leurs conditions de travail.

Quels sont les conflits les plus courants dans le domaine des relations collectives de travail ?

BP & SP : « Le principal conflit d’intérêts entre l’employeur et les représentants du personnel concerne l’augmentation linéaire des salaires. Les délégués du personnel, souvent syndiqués, se font assister lors de la négociation de la CCT. Le syndicat revendique en principe l’instauration d’un système de rémunération linéaire, égalitariste et non égalitaire. Or, un tel système ne permet pas aux salariés méritants d’obtenir une rémunération variable en fonction de leurs évaluations. Ce qui a pour conséquence une perte de motivation ou de prise d’initiative de la part des salariés, qui ne se verront pas justement récompensés de leurs efforts. Les délégués du personnel, qui passent du temps à exercer leurs heures de délégation, agissent dans leur propre intérêt au détriment des salariés de l’entreprise, ce qui peut engendrer une frustration pour l’ensemble des salariés.

Les rapports entre employeurs et représentants des employés se sont-ils modifiés ces dernières années ?

BP : « Des relations tendues remplacent les relations paisibles des années de prospérité. En une période de crise où l’emploi doit être flexible eu égard au contexte économique, les relations deviennent difficiles entre l’employeur et la délégation. La législation protégeant les délégués du personnel contre le licenciement leur permet d’être ‘intouchables’, ce qui ne favorise pas le dialogue. Les protagonistes ayant des intérêts souvent opposés s’affrontent, mais dans une optique qui n’est pas forcément constructive pour le bon fonctionnement de l’entreprise. »