L'éducation financière doit démarrer dès le plus jeune âge. Depuis deux ans, la Semaine de l'argent touche plusieurs centaines d'écoliers. (Photo: Mike Zenari)

L'éducation financière doit démarrer dès le plus jeune âge. Depuis deux ans, la Semaine de l'argent touche plusieurs centaines d'écoliers. (Photo: Mike Zenari)

L’étude Financial literacy around the world, menée par l’agence Standard & Poor’s, révèle un manque préoccupant de compréhension des concepts financiers tels que l’inflation, les taux d’intérêt et la diversification du risque. Mené par questionnaire auprès de 150.000 adultes issus de 140 pays en 2014, le rapport révèle un niveau global de 33% «d’alphabétisation financière». En d’autres termes, 3,5 milliards d'adultes ne disposent pas des connaissances requises pour prendre les bonnes décisions. À l’échelle du continent européen, les niveaux varient entre 65% en Suède et au Danemark et 22% en Roumanie. Au Grand-Duché, le score s’approche des 53%, soit 1% de plus que la moyenne européenne, en dépit d’une place financière vibrante.

Dans ce contexte, l’éducation financière apparaît comme l’une des réponses à apporter. «Équiper chaque citoyen d’un bagage théorique de base pour lui permettre de gérer ses revenus et ses risques de manière efficace et responsable», telle est la définition de l’OCDE, moteur en la matière. «Les décisions financières jouent un rôle central dans nos vies à tous, qu’il s’agisse de gérer son argent de poche, d’ouvrir un compte bancaire, obtenir un prêt pour une maison ou financer sa retraite», introduit Danièle Berna-Ost, secrétaire générale de la CSSF. «De plus en plus complexes et variés, les produits financiers rendent cette vulgarisation toujours plus importante.»

Dans la foulée de la crise de 2008, la thématique intéresse bon nombre d’institutions internationales, dont la Banque mondiale, le G20, la Commission européenne, ou l’Efama (European fund and asset management association), ainsi qu’une cinquantaine d’États. Les fils rouges sont, à chaque fois, la vigilance financière, la promotion d’un comportement financier durable, la lutte contre le surendettement et la protection du consommateur.

Au Luxembourg, un Comité pour la protection du consommateur financier naissait en 2012 dans le giron de la CSSF. Une de ses missions premières a été de convoquer un groupe de travail d’une vingtaine de partenaires familiers de la thématique, de l’ABBL à l’Alfi, en passant par l’Université du Luxembourg, la Ligue médico-sociale ou encore l’Union des consommateurs luxembourgeois.

Semaine de l’argent créée par l’ABBL en 2015, interventions des Jonk Entrepreneuren dans les classes ou le blog Understanding Investing rédigé par l’Alfi, les initiatives essaiment déjà. «Nous n’avons pas souhaité réinventer la roue, mais valoriser l’existant et rassembler toutes les initiatives», souligne Patrick Hommel, conseiller de direction à la CSSF. «Pour qu’une stratégie nationale prenne, il faut qu’elle touche toute la population.»

La seconde étape a été de plancher sur un document de travail proposant différents angles d’attaque. Chose faite après huit mois de réunions. Quatre grandes cibles ont été identifiées: les élèves de l’enseignement fondamental, ceux de l’école secondaire, les jeunes actifs et étudiants, et les adultes.

En parler à l'école

Influencé par les recommandations de l’OCDE, le projet national envisage notamment l’introduction d’un cours dédié dans tous les cursus, ainsi que la mesure des connaissances financières dans les enquêtes Pisa, pas encore évaluées au Luxembourg.

«L’éducation financière traite de nombreux concepts de la vie quotidienne. C’est un exercice de longue haleine», poursuit Danièle Berna-Ost. «Les jeunes, futurs citoyens, sont un maillon essentiel de la chaîne. Leur apprendre à gérer un budget, ce qu’est l’épargne ou des taux d’intérêt est déterminant pour leur vie future. Ils n’ont pas tous accès à ces connaissances à la maison. En intégrant un cours dans tous les parcours scolaires et en faisant la promotion d’un comportement financier responsable, on donnerait les mêmes armes à tous les élèves. Pour prendre un exemple, le problème du surendettement est loin de n’être que théorique au Luxembourg. Il faut en parler dans les classes et en expliquer les conséquences dès le plus jeune âge.»

La stratégie luxembourgeoise s’est aussi inspirée d’initiatives d’autres pays membres de l’UE plus avancés sur ce terrain, comme les Pays-Bas ou les pays scandinaves.

«Un matériel européen très étoffé existe. Plein de bonnes idées peuvent être adaptées au contexte local», souligne encore la secrétaire générale de la CSSF. Remis au ministère de l’Économie en octobre 2015, le document d’une trentaine de pages devrait être transposé en plan d’action prévoyant des échéances claires une fois validé.