Et si la Grèce sortait de la zone euro, comme les marchés financiers semblent l’anticiper partiellement ? Quelles seraient les conséquences pour les autres Etats membres dont le Luxembourg? Standard & Poor’s (S&P) a tenté de répondre à cette question dans une étude, même si l’hypothèse n’est pas, selon l’agence de notation la plus vraisemblable.
« Une sortie de la Grèce de la zone euro n’est pas notre scénario central. Nous estimons cependant ce risque à au moins un sur trois. Il y a un risque que le gouvernement issu des élections du 17 juin prochain soit opposé à la mise en œuvre du programme de la Troïka (UE, FMI, BCE). Parallèlement, la non-conformité aux conditions du programme pourrait entraîner la cessation des versements à la Grèce. L’interruption du soutien financier de la Troïka conduirait probablement à un nouveau défaut de la Grèce selon nos critères. Par ailleurs, il est possible que la contraction de l’économie grecque s’accélère et que l’accès des banques grecques à la liquidité se détériore….Selon nous, une sortie de la zone euro résulterait d’une décision politique grecque », explique S&P.
Les conséquences pour le Luxembourg et les créanciers qui y sont domiciliés pourraient donc être lourdes.
Le FMI…déjà
Dans son rapport annuel publié mi-mai, le FMI (Fonds Monétaire International) estimait déjà qu’une intensification de la crise de la zone euro ou « un accident politique », comme une sortie de la Grèce de la zone euro, aurait des répercussions importantes sur le Grand-Duché au travers des canaux économiques et financiers.
Selon S&P, le coût direct d’une perte totale pour les Etats de la zone euro atteindrait 0,5 % du PIB chacun. Néanmoins, « le coût économique indirect et , potentiellement, de la nécessité de soutenir les banques domestiques pourrait être supérieur »
Etablie au Luxembourg, la BEI (Banque Européenne d’Investissement) serait également affectée par cet évènement, au moins dans sa capacité à se refinancer : « La BEI est le créancier supranational noté dont l’exposition à la Grèce est la plus importante. Un défaut grec pourrait induire des pressions sur son AAA », estime l’agence, sans affirmer explicitement que la note de l’émetteur supra-national pourrait être dégradée.
Effets sur les résultats budgétaires
L’impact direct devrait être moins lourd pour le FESF (Fonds Européen de Stabilité Financière), car sa qualité de crédit dépend uniquement de celle de ses garants. Néanmoins, « Le FESF n’a pas de statut créancier privilégié et pourrait également subir des pertes importantes , que les Etats garants devraient supporter au prorata de leur participation à la BCE. En cas d’appel en garantie, les engagements hors-bilan des pays concernés pourraient alors se concrétiser et venir alourdir leur endettement net. Selon nos critères, si cette augmentation de la dette conduisait à une détérioration du facteur budgétaire, cela pourrait avoir un effet négatif sur leur notation ».
Enfin, S&P a identifié un impact lié à l’exposition de la BCE (Banque Centrale Européenne) et de l’Eurosystème (Banques centrales nationales) : « L’Eurosystème affiche une exposition à la Grèce dépassant les 200 milliards d’euros. C’est légèrement plus de 2 % du PIB de la zone euro , et plus du quart des emprunts bruts de la zone euro pour 2012. Les pertes subies par la BCE devraient être partagées par les banques centrales des pays membres. Une érosion significative du capital de la BCE, et sa reconstitution par les Etats membres, pourraient êtres perçues comme affaiblissant la crédibilité et l’indépendance de la BCE. Un réapprovisionnement des fonds propres de la BCE sur une longue période pourrait avoir un effet négatif sur les résultats budgétaires des pays de la zone euro. »
Fort heureusement, ce scénario, aux conséquences lourdes, a tout de même deux chances sur trois de ne pas se réaliser, selon l'agence de notation.