Parmi les quatre principaux partis représentés à la Chambre, seuls le CSV et le DP souhaitent réduire le taux d’affichage des entreprises. (Illustration: Studio Maison Moderne)

Parmi les quatre principaux partis représentés à la Chambre, seuls le CSV et le DP souhaitent réduire le taux d’affichage des entreprises. (Illustration: Studio Maison Moderne)

Faut-il abaisser le taux d’imposition des entreprises pour permettre à l’économie luxembourgeoise de rester compétitive? C’est la question qui agite une partie de la campagne électorale, sur fond de bouleversement des règles fiscales en vigueur au niveau international.

Si le CSV et le DP souhaitent «s’approcher des taux moyens enregistrés au sein de l’UE et de l’OCDE», à savoir 21% contre 26% actuellement au Luxembourg, Déi Gréng et le LSAP s’y opposent. Pour des raisons différentes cependant.

Alors que les écologistes écrivent noir sur blanc être opposés à «la poursuite de la baisse de l’impôt sur les sociétés», afin de réintroduire «de la justice fiscale», tout en précisant ne pas être réfractaires à «des incitations fiscales ciblées», les socialistes abordent le problème différemment. Estimant que des efforts ont été réalisés en direction des sociétés au cours de cette législature, ils plaident pour une redistribution différente entre ménages et entreprises. Que ces dernières – particulièrement les multinationales – «assument leur responsabilité et (...) contribuent aux recettes fiscales».

Compétition avec les pays de l’Est

Impôt calculé à la fois par des variables nationales – le taux de l’impôt sur le revenu des collectivités et le taux de l’impôt de solidarité – et par une donnée communale – le taux de l’impôt commercial communal –, le taux d’affichage des entreprises varie donc d’une commune à l’autre. Entre 26% à Luxembourg-ville, commune qui concentre le plus grand nombre de sociétés sur son territoire, et 30% comme dans certaines communes du nord.

Selon les données les plus récentes du ministère des Finances, le taux moyen au niveau national baisse, puisqu’à 29,2% en 2016 contre 26,01% en 2018. Les données de la Commission européenne, qui remontent jusqu’en 2003, confirment cette affirmation, mais indiquent que ce taux avait été relevé entre 2013 et 2016.

En comparaison avec les trois pays voisins – Allemagne (30,2%), Belgique (29,6%) et France (34,4%) – le Luxembourg apparaît toutefois comme plus attractif. La compétition fiscale à ce niveau se joue donc avec d’autres pays, notamment ceux d’Europe de l’Est qui misent sur le dumping fiscal avec un taux d’imposition inférieur à 20%, voire à 15%. Les pays européens les plus agressifs en la matière étant la Bulgarie (10%), la Hongrie (10,8%), mais aussi Chypre et l’Irlande (12,5%).   

Considérée comme «très importante» par les fiscalistes, la question du taux d’affichage des entreprises cache celle de la stratégie de diversification de l’économie. Autrement dit, du type d’entreprises que le gouvernement souhaite attirer sur le territoire.

«Beaucoup de sociétés sont présentes au Luxembourg, mais ce sont des sociétés pour une majorité qui sont liées au secteur financier, comme des soparfi, et qui ne génèrent que peu d’impôts», souligne Jamal Afakir, partner chez Atoz. «Attirer des sociétés actives dans l’industrie ou le commerce permettrait non seulement de réduire la dépendance par rapport à la Place, mais aussi de diversifier les compétences et les profils de la population active. Ce qui sera bénéfique.»

Différents scénarios envisageables

Quant aux scénarios à mettre en place pour permettre une évolution de l’économie, plusieurs options sont envisageables. Mais celle incluant une baisse du taux d’affichage, souhaitée par le CSV et le DP, qui recueille les préférences des fiscalistes qui imaginent d’ores et déjà de nouvelles approches destinées à «conserver la compétitivité du pays». Notamment via un «système irlandais inversé».

«À savoir instaurer une différence dans la taxation entre les revenus issus de l’activité économique et ceux non opérationnels, comme c’est le cas en Irlande», explique Gerdy Roose, partner chez BDO Luxembourg. «Mais alors que Dublin taxe à 25% la première catégorie et 12,5% la seconde, nous pourrions faire l’inverse et moins taxer l’activité des banques et autres entreprises luxembourgeoises, et avoir une imposition plus importante sur les activités plus risquées.»