Les membres du conseil d’administration de l’Automobile Club du Luxembourg ont pris une salve en pleine tête par Daniel Tesch, son ancien directeur. Après avoir observé le silence radio depuis son licenciement en octobre dernier, il a choisi de placer les administrateurs devant leur responsabilité en leur écrivant une lettre au vitriol, dont paperJam.lu a pris connaissance. Il s’agit d’un véritable règlement de comptes...
L’ancien dirigeant interpelle également les administrateurs sur des questions de gouvernance et d’image et se dit inquiet pour le devenir de l’ACL, qui vient juste de se choisir un nouveau directeur en la personne de Jean-Claude Juchem, 51 ans.
Une clause de non-dénigrement rompue
La transaction intervenue en février entre Daniel Tesch et l’ACL (qui a octroyé à l’ancien dirigeant 80.000 euros net d’impôts au titre d’indemnité de licenciement) interdisait aux deux parties de se dénigrer mutuellement. Or, Daniel Tesch estime que le président de l’ACL, Yves Wagner, a rompu cette clause en accordant des interviews dans la presse, au contenu jugé diffamant à son égard.
Et il en impute la responsabilité à l’ensemble du conseil d’administration: «Si j’ai de mon côté scrupuleusement respecté mes engagements», écrit-il, «vous n’avez, pour votre part, pas cessé, depuis mon licenciement, d’essayer de nuire à ma réputation en faisant publier dans la presse des faits inexacts, malveillants et des propos parfaitement diffamatoires à mon égard pour un résultat (voulu?) de miner toutes mes chances de retrouver un emploi décent à Luxembourg».
Il est vrai que des nouvelles pas toujours bonnes ont jalonné le parcours de Daniel Tesch depuis son départ de l’ACL. Si l’ouverture d’un restaurant brésilien à Clausen, Maria Bonita, est un point positif dans sa carrière, en revanche, la fin de sa mission comme consul honoraire de la république du Brésil, signifié par «note verbale» le 25 février dernier (avec effet rétroactif au 28 septembre 2013) aux autorités grand-ducales par l’ambassade du Brésil à Bruxelles, a sans doute été un coup dur pour Daniel Tesch.
Harcèlement moral et népotisme
Dans sa lettre aux administrateurs de l’ACL, il leur reproche d’avoir ignoré ses appels à l’aide, consignés dans une lettre de juillet 2013 faisant état de «pressions insupportables de la part du président Wagner, qui voulait m’obliger à recruter sa compagne (…) comme responsable des ressources humaines». En se masquant les yeux, les administrateurs de l’ACL auraient «non seulement accordé (leur) support à un harcèlement moral qualifié», mais auraient aussi «cautionné une tentative de népotisme avéré».
Le licenciement de Daniel Tesch avait aussi été précédé de rumeurs imputant son départ à son engagement sur la liste du DP aux élections législatives du 20 octobre dernier. Or, leur répond l’ancien candidat, «j’avais pris toutes mes précautions pour que ceci ne nuise pas à notre association et en ayant l’accord du comité de gérance».
«Vous n’avez pas hésité à mentir à la presse sur la réalité de mon licenciement», ajoute-t-il en se déclarant profondément inquiet pour le devenir de l’ACL et ses «décisions dépourvues de bon sens, voire de logique».
Terrain constructible de 1,2 ha à Bertrange
L’ancien directeur reproche encore aux administrateurs de l’ACL d’avoir perdu de vue le sens des réalités, la notion de sincérité et surtout des intérêts de ses 170.000 membres qui «rassemblent chaque année 13 millions d’euros pour faire fonctionner leur association». «Ne sont-ils pas en droit», écrit M. Tesch, qui est aussi membre associé de l’ACL, «de s’inquiéter de la bonne gestion de l’ACL et la sauvegarde de son patrimoine considérable (quelque 6 millions d’euros détenus en banque ainsi que le terrain constructible de 1,2 hectare à Bertrange)?»
Et l’ex-directeur d’enfoncer le clou en évoquant un des gros problèmes de gouvernance du club: la présence au conseil d’administration de l’ACL des deux plus grandes compagnies d’assurance du pays, en l’occurrence Foyer et Lalux, qui sont aussi des «concurrents naturels» de l’Automobile Club? Comment expliquer aux membres associés et affiliés que ces deux assureurs «participent aux décisions stratégiques ainsi qu’au choix du nouveau directeur?», s’interroge encore Daniel Tesch en pointant le risque que l'ACL ne suive la même voie que l'ADAC en Allemagne.
«Je revendique le droit d’espérer que de véritables efforts seront désormais entrepris dans le sens d’un véritable rattachement à la volonté des personnes auxquelles nous devons notre existence», appuie Daniel Tesch. Il en appelle à la «volonté inébranlable» des administrateurs de l’ACL ainsi qu’à leur «intégrité sans faille». Et il conclut: «J’ose espérer que le conseil d’administration aura le courage de soumettre ces thèmes à ses membres lors de la prochaine assemblée générale pour qu’ils puissent y donner leur juste avis.»