La fibre optique accélère l’accès à Internet, mais également la croissance économique.  (Photo: David Laurent/Wide)

La fibre optique accélère l’accès à Internet, mais également la croissance économique.  (Photo: David Laurent/Wide)

En avril 2010, le gouvernement lançait le Luxembourg dans la course à l’accès Internet à ultra-haut débit. De quoi s’agit-il? Tout simplement de permettre aux entreprises et aux particuliers de bénéficier d’une vitesse d’accès à Internet plus que décuplée.

Les offres disponibles aujourd’hui sur le marché, avec la technologie ADSL, offrent ainsi une bande passante allant jusqu’à 20 Mbits par seconde. On attend, à terme, une vitesse d’accès par fibre optique pouvant atteindre 1 Gbit par seconde… même si dans un premier temps cette vitesse restera théorique.

L’aventure de la fibre optique au Luxembourg n’est cependant pas de première jeunesse. Ainsi, en mai 2002, Codenet annonçait déjà le lancement d’un accès par fibre optique démarrant… à 2 Mbits, ce qui constituait une vitesse plus que respectable pour l’époque, sachant que l’ADSL n’était encore qu’un rêve pour la plupart des consommateurs.

En novembre 2008, Jean-Louis Schiltz, alors ministre des Communications et Lucien Lux, ministre des Transports, avaient assisté à la pose du 200e kilomètre de câble à fibre optique de LuxConnect. Cette société, propriété du gouvernement, a été créée pour construire la nouvelle génération de réseau en fibre au Luxembourg, mais aussi vers l’étranger, afin de garantir la bonne connectivité du pays avec les centres économiques voisins importants tels que Bruxelles, Paris ou Francfort.

Dans ce domaine, des initiatives comme celle de LU-CIX sont à signaler. Elle regroupe différents opérateurs et prestataires et son objectif est de favoriser le développement d’Internet au Luxembourg, mais également de proposer des outils aux entreprises internationales, attirées par le Grand-Duché, et sensibles à la qualité et à la vitesse des bandes passantes disponibles.

Gains de productivité

Pourquoi tant d’enthousiasme pour une technologie qui n’est – a priori – qu’une montée en vitesse? Les réponses varient selon le consommateur observé. Les particuliers ont modifié leurs habitudes de consommation d’Internet. Ainsi, les offres de type triple play, couplant l’accès à Internet, télévision et téléphonie, se sont banalisées. Ces trois services, a priori différents, utilisent, de fait, le même tuyau entrant.
Les chaînes de télévision ont également modifié la qualité de leur diffusion, passant à la haute définition. Si, dans le cadre d’un foyer, un accès ADSL peut suffire pour la consommation unitaire d’un seul des services, des ralentissements peuvent devenir sensibles lorsque différentes télévisions captent différents canaux en même temps, tandis que l’une ou l’autre personne surfe de son ordinateur, tout en passant un coup de téléphone. La taille du tuyau devient alors insuffisante… Et nécessité se fait sentir de l’adapter.

Or les marges de progression de l’ADSL, basée sur une technologie utilisant les fils de cuivre des lignes téléphoniques classiques, ne sont plus suffisantes, voire inexistantes là où la fibre optique, elle, possède encore des capacités inexploitées.

Pour les entreprises, le développement des services informatiques de type cloud computing se traduit également par la hausse des besoins en bande passante. En faisant basculer l’exécution des applications et l’hébergement des données vers des centres extérieurs à l’entreprise, les besoins en vitesse d’accès au réseau ont explosé. Les entreprises internationales, connectées à des datacenters à l’étranger, doivent, elles aussi, être également capables d’absorber des volumes de données importantes, avec des capacités de bande passante garanties.

D’autres sociétés encore, dont le marché est européen ou mondial, et dont les produits sont purement numériques (musique, vidéo…), doivent pouvoir fournir leurs services avec le maximum d’efficacité. Donc, pour pouvoir positionner le Luxembourg comme un hub numérique pertinent sur la carte mondiale, il faut connecter le pays, sur son territoire, et vers l’étranger.

Une étude de la Commission européenne, citée par le gouvernement en avril 2010, affirmait ainsi que le passage au haut débit apportait des gains de productivité importants, de l’ordre de 5% dans le secteur de la production et de 10% dans le secteur des services. L’économie de la connaissance, dont l’Europe se veut la championne depuis la mise au point de la stratégie de Lisbonne en 2000, permettrait ainsi un gain de productivité de 0,15% par an, au niveau européen.

De son côté, la Banque mondiale estimait que l’accroissement de 10% du taux de pénétration du haut débit se traduisait par une hausse du PIB de 1,3% en moyenne. Autant dire que les infrastructures télécoms sont des facilitateurs importants dans le cadre d’une économie ouverte comme celle du Luxembourg, surtout lorsque les inquiétudes sur la compétitivité nationale sont nombreuses.

Où en est-on, aujourd’hui, concrètement, pour voir se généraliser des offres commerciales? Pour l’heure, les dossiers sont en cours de préparation au sein de l’Institut Luxembourgeois de Régulation (ILR).

Peu avant son départ à la retraite, le 1er mars dernier, Odette Wagener, la directrice historique de ce qui s’appela, jusqu’en 2000, l’Institut Luxembourgeois des Télécommunications, reconnaissait que ce très haut débit, et l’accès à l’infrastructure nécessaire pour le développement de l’offre, constituait le grand défi de l’institution: «L’introduction généralisée de la fibre optique rend nécessaire une révision de la réglementation actuelle qui se limite encore à l’accès aux paires de cuivre. Sur base des nouvelles analyses de marché, il sera donc décidé lesquels parmi les opérateurs sont puissants sur le marché et se verront imposer des ‘remèdes’ pour permettre à d’autres opérateurs de les concurrencer.»

En attendant les tarifs...

Fort est à parier que l’Entreprise des P&T sera un de ces opérateurs puissants. Les grilles tarifaires, permettant aux opérateurs alternatifs de proposer une offre économiquement viable, sont en cours de négociation et de validation… Paul Schuh, qui a pris la relève à la tête de l’ILR le 1er mars, reconnaît lui aussi que la tarification de gros appliquée par l’opérateur historique fait partie des dossiers à traiter: «Nous sommes, pour l’heure, un peu à court d’informations, mais aussi en présence de données parfois contradictoires. Il faut aussi noter que les opérateurs alternatifs ont parfois de drôles d’idées. Ils vont par exemple chercher des références de prix pratiqués aux Pays-Bas, alors qu’il est connu que les coûts du génie civil, là-bas, sont le tiers de ceux pratiqués ici», expliquait-il à paperJam, dans l’édition d’avril 2011.

En attendant la décision tarifaire, donc, les acteurs se préparent et définissent leurs offres pour pouvoir démarrer aussi vite que possible une fois le feu vert donné.