Pour lutter contre le dumping social qui hante des chantiers, la réunion des acteurs veut travailler en amont. (Photo : Olivier Minaire / archives)

Pour lutter contre le dumping social qui hante des chantiers, la réunion des acteurs veut travailler en amont. (Photo : Olivier Minaire / archives)

Même si ce n’est pas, au sens strict du modèle social luxembourgeois, une « tripartite », mais « une réunion technique qui rassemble les syndicats, le patronat, les administrations concernées et le ministère », comme s’entendent à le dire les participants, elle a des enjeux évidents. On parle du secteur de la construction, ce jeudi vers 17 h, autour de Nicolas Schmit, ministre du Travail et de l’Emploi.

Et, explique l’OGBL par la voix de Jean-Luc de Matteis, « cela fait des mois que l’on pousse pour que l’on aborde le fond des choses en amont. » Si syndicats et patronat s’entendent pour clamer que, malgré la conjoncture, la santé générale est bonne pour la majorité des acteurs du secteur (les quelques faillites retentissantes seraient des cas isolés imputables au management chaotique d’une poignée de dirigeants), il y a de gros soucis rencontrés sur le terrain. « Et cela crée une pression sur les prix, des situations de concurrence déloyale, des abus sociaux inqualifiables avec des travailleurs clandestins payés 4 euros de l’heure », souligne M. de Matteis.

Appliquer la loi

L’Inspection du Travail et des Mines connaît les problèmes pour les combattre depuis des années. Mais on y manque de moyens, notamment humains. « Ils ont par exemple un seul inspecteur dans le canton d’Esch, où les chantiers pullulent », observe le syndicaliste. On ne fera pas l’économie, et le ministre Schmit s’est d’ailleurs déjà engagé sur ce terrain, d’attribuer de meilleurs moyens de contrôle.

Dans l’immédiat, la réunion technique se focalise, en présence de tous les partenaires concernés, sur les questions de détachement au Luxembourg. « Il y a une loi. Il faut l’appliquer ! C’est un problème crucial, qui découle notamment de la cascade de sous-traitants que l’on peut rencontrer sur de gros chantiers, y compris pour des projets publics d’envergure », note Jean-Luc de Matteis. « Le maître d’œuvre utilise les services d’une entreprise en sous-traitance, qui elle-même sous-traite, etc. On voit des situations horribles, sur le plan humain. Un dumping social insoutenable. »

Intérêt partagé par tous

Comme le montre cette « tripartite construction » qui ne dit pas son nom, tout le monde a intérêt à briser la spirale négative et à assainir l’horizon. Déjà, il y a un poids économique non négligeable qui s’évapore. Même s’il est, par essence, impossible à tracer vraiment, le travail illégal pèserait facilement 2 à 3 % du PIB. L’impôt éludé, la TVA égarée, les cotisations non versées, tout cela alourdit la note.

Il y a donc lieu de mettre tout à plat : la concurrence et ses distorsions, la crise qui pousse les plus hardis à la course aux marchés « à tout prix », le contrôle des marchés publics, le monitoring des cahiers de charges, la responsabilisation du maître d’ouvrage, le choix d’une offre économiquement responsable plutôt que forcément moins-disante, quitte à changer la loi sur les soumissions, une ligne directrice sur les prix, une meilleure planification publique… Il y a des chantiers ouverts ou à ouvrir.
Le ministre Schmit, les syndicats, l’ITM, les entreprises du secteur, tout le monde l’a bien compris. La réunion de ce jeudi attaque le début de la pelote.