Pour le détecter à temps, il faut être attentif à des signaux comme une fatigue chronique, une perte d'appétit ou des troubles du sommeil. (Photo: CC)

Pour le détecter à temps, il faut être attentif à des signaux comme une fatigue chronique, une perte d'appétit ou des troubles du sommeil. (Photo: CC)

Parfois à l'origine d’accidents ou de dépression de longue durée, le burn out peut mener à des conséquences profondes s’il n’est pas détecté à temps. «La littérature le définit comme un épuisement professionnel, qui contamine tous les pans de la vie. La perte de motivation et d’énergie est progressive. La maladie frappe avant tout des travailleurs très engagés, qui se dépensent trop dans leur fonction et ne parviennent plus à faire la part des choses», cadre Patrizia Thiry, présidente de l’Association pour la santé au travail du secteur financier (ASTF).

D'après différentes études, on recense 12 stades différents, nécessitant des réponses adaptées. «Entre un et trois, il s’agit d’un excès de motivation, qui peut se gérer assez facilement. Du coaching peut aider à mieux gérer son temps et son énergie. Bien souvent, au-delà du 6e stade, il faudra passer par un travail psychiatrique et la prise de psychotropes. On compte alors entre trois et six mois d’arrêt maladie. On constate ces dernières années une prise de conscience encourageante.» D'après les observations de l'ASTF, le phénomène occupe actuellement la première place du podium des maladies les plus présentes dans le secteur financier, juste avant les problèmes liés à l'ergonomie du poste de travail.

Pente descendante

S’il y a autant de variantes burn out que de patients, il amène souvent dans son sillage désimplication professionnelle, fatigue, tristesse grandissante, sentiment d’échec ou d’incompétence, problèmes de sommeil, tremblements, crises de panique ou difficultés à se concentrer, qui rejaillissent fréquemment sur la sphère privée. «Les symptômes psychosomatiques, fréquemment ignorés, sont souvent similaires, même si chaque personne développe son propre cocktail. La porte d’entrée est toujours le corps et il y a très souvent un déni de la souffrance psychique, jusqu’à ce que ces manifestations prennent de plus en plus de place. Petit à petit, les personnes en détresse ressentent un grand vide intérieur, une sorte d’anesthésie émotionnelle et ne parviennent plus à se fier à leur instinct.»

Sans doute en raison de sa complexité, au Luxembourg, la pathologie, objet d’une récente question parlementaire commune d’Alexandre Krieps et Edy Mertens, n’est pas encore considérée comme une maladie professionnelle en tant que telle selon la réponse du ministre du Travail Nicolas Schmit. «C’est un sujet très épineux. La multitude de causes et de symptômes rend la catégorisation très compliquée, d’autant plus qu’il y a une forte composante individuelle. On ne peut pas toujours incriminer l’entreprise.»

Redonner confiance

Difficile à traiter, puisqu’il requiert une approche au cas par cas, le burn out révèle souvent un malaise enracinée, voire des problèmes latents au sein d’une équipe. «Comme ce sont des travailleurs qui abattent souvent une grande quantité de travail, l’impact est forcément important sur les collègues. Il peut il y avoir un effet domino. Dans certains cas de figure, il s’agit de «burn out sentinelle», la maladie permet de détecter des problèmes organisationnels», dévoile Patrizia Thiry.

Une constante: plus il est détecté tôt, plus le temps de guérison sera court. Le maître mot doit être la prévention. Ainsi, l’équipe de l’ASTF forme les entreprises à détecter les signes avant-coureurs. Composée de 15 personnes, dont cinq médecins du travail, l’association intervient souvent comme intermédiaire entre le travailleur et son employeur. «Depuis un an, nous poussons les entreprises à demander conseil dès les premiers soupçons. Le message est clair: ce n’est pas aux managers de poser le premier diagnostic, mais ce sont les premiers qui sont à même de percevoir les signaux d’alerte.»

Réintégrer en douceur

Outre les formations, la mission de l’ASTF est de guider la personne en souffrance. Libre à elle de venir consulter sans en informer sa direction. L’anonymat peut tout à fait être de mise. «Le plus grand travail est de faire prendre conscience au travailleur de son burn out. Ensuite, il faudra identifier le stade où il se trouve». Pour réintégrer la personne de retour de congé maladie, les RH ont un rôle central à jouer. «Il ne faut pas hésiter à la voir avant sa réintégration afin de préparer le terrain et désamorcer l’angoisse. Il faut l’aider à réapprendre ses limites et se reconstruire.»

En étant à l’écoute et réceptive aux aménagements de postes, l’équipe RH peut contribuer à redonner confiance au travailleur et éviter qu’il ne rechute. Parfois souhaitable, la mobilité interne ne suffira pas toujours.

«Dans 50% des cas, il y aura une mutation à l’intérieur de l’entreprise ou dans une autre organisation. Un faible pourcentage change complètement de secteur. Le plus important est de réussir à recharger ses batteries et à ne plus se laisser envahir par le travail, ce qui est devenu particulièrement compliqué avec les smartphones ou autres ordinateurs portables. Il est déterminant de veiller à ne pas emmener son bureau chez soi», achève Patrizia Thiry, qui constate un nombre de dossiers en croissance sur le bureau de l’ASTF depuis quelques années.