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Qu'est-ce qui peut bien séduire les producteurs, et conséquemment les réalisateurs, acteurs ainsi que toute la caravane technique à venir s'installer le temps de plusieurs claps dans un pays qui n'a d'hollywoodien que sa situation économique? Réponse: celle-ci justement. Le Grand-Duché ayant toujours su tirer les avantages de ses faiblesses, il n'a pas hésité à instaurer des privilèges à l'industrie de la pellicule dans le but d'attirer le gratin mondial et de créer ainsi une industrie supplémentaire. Par le biais de certificats d'investissements, aides financières  et subsides divers (lire à ce sujet notre papier sur le Fonspa-Filmfund Luxembourg- dans notre numéro zéro). La machine a eu du mal à se mettre en marche, la loi à rester en vigueur. Les tournages s'éparpillaient de façon parcimonieuse pendant bon nombre d'années.

Est-ce un heureux hasard ou le fruit de durs labeurs qui font que le train semble avoir trouvé sa locomotive (même si elle est loin de pouvoir concurrencer le TGV) et que les tournages vont s'accumuler au fil des prochains mois,? Si une réponse exacte à cette question est difficile à trouver en ce qui concerne l'ensemble de la production nationale, nul ne pourra nier que certaines maisons sont dignes d'un avenir prometteur, vu les énergies qui y ont été déployées pendant des années pour monter des films de qualité, et cela souvent avec des bouts de ficelle. Grâce au système des coproductions avec d'autres pays, une maison comme Samsa voit la majorité de ses films sollicités dans des festivals, parfois même les plus prestigieux. La preuve qu'on y fabrique un cinéma tout autre qu'alimentaire, chose d'autant plus difficile à maintenir que les goûts du public se vulgarisent de plus en plus de par le monde entier.

Communication au point zéro?

Nous allons donc donner un coup de chapeau à notre microcosme du septième art en mouvement, en présentant brièvement le travail à effectuer dans les diverses maisons au fil des prochains mois.  Dans la limite de nos possibilités. Car une chose est à critiquer ouvertement dans le boulot de ce milieu moins doré que le cliché ne le laisse croire. En ce qui concerne la communication, toutes les sociétés ne semblent pas disposées à collaborer ouvertement avec la presse luxembourgeoise. Le fait que les appels téléphoniques restent sans résultat et les e-mails sans réponse, cela même après des semaines de vains essais, laisse-t-il supposer qu'il existe des producteurs désireux de profiter des avantages présentés par la situation légale sans montrer le moindre intérêt en une collaboration fructueuse avec la presse locale'  Ou alors est-ce parce que chez Carousel p.ex. on est noyé dans le tourbillon d'un superproduction qu'il semble impossible de nouer quelconque lien avec les journalistes nationaux? Nous passerons avec une certaine indulgence sur ces détails qui ne sont pourtant pas sans importance, vu le fait que le problème semble exister avec bon nombre d'autres collègues. Ceci étant dit, rendons-nous sur les plateaux et visitons les tournages en cours ou ceux qui risquent de combler la brèche dans un futur proche. Tout du moins pour ce qu'on a bien voulu nous en dévoiler.

The Carousel Picture Company

La société autour de Romain Schroeder et Tom Reeve s'est surtout spécialisée dans des coproductions avec les States, sans négliger le marché des B-pictures.

Ils viennent de réaliser leur plus gros coup, et certainement le plus important de la courte histoire du cinéma-lux avec la superproduction "D'Artagnan', réalisée par Peter Hyams (End of Days, Time Cop). Casting d'enfer avec Catherine Deneu-ve, Tim Roth et Gary Oldman. On parle d'un budget de1,2 milliards de Luf. Le tournage a débuté fin août à Toulouse et dans le pays gascon et devrait se poursuivre au Grand-Duché à partir de mi-septembre.

DELUX Productions

Après une collaboration avec des noms aussi prestigieux que Peter Greenaway ou Nicolas Cage (en tant que producteur sur "Shadow of the Vampire"), Jimmy de Brabant va recevoir le fils d'un des papes du cinéma américain. A savoir Roman Coppola, fils de Francis F. A partir du 5 octobre, la société appartenant au groupe RTL hébergera donc toute l'équipe de "C.Q.", lequel mélange l'époque des années soixante à Paris à la fiction kitsch des films SF, genre "Barbarella". Franka Potente ("Lola rennt") y donnera la réplique à Noah Taylor ("Shine"). Autour d'eux graviteront des personnages devenus mythiques tels que Gene Hackman, Giancarlo Giannini et Aurore Clément. Johnny Depp et Gérard Depardieu se font malheureusement excuser. Mais le bruit court que papa Coppola viendrait rendre visite à fiston, et que soeurette les rejoindrait aussi. Elle pourrait essayer de présenter son film acclamé à Cannes, et la Cinémathèque nous sortir  une rétrospective de Francis, histoire d'exhiber tout le clan du "Parrain' au grand public (c'était un conseil gratuit).

Autres travaux en route: "La Chambre Obscure" de Marie-Christine Questerbert avec Melvile Poupaud et Caroline Ducey (devrait être en postproduction), "Christie Malry's Own Double Entry" de Paul Tickell avec Nick Moran, "The Tulse Luper Suitcase" de Peter Greenaway, "Alias, Alias" de Ahmed Bouchaala, et "Secret Passage" de Ademir Kenovic.

Monopoly Productions

Si nous le faisons passer avant son frère Jani (Samsa) c'est parce que Paul Thiltges, président de l'ULPA (Union Luxembourgeoise de La Production Audiovisuelle), nous sort son dernier produit ces jours-ci. Et parce qu'il est un des vétérans ainsi qu'un des personnages les plus spontanés, voire vivaces  de la scène locale récente. C'est la Suisse, ou plus précisément Fama Film AG qui s'est tourné vers lui pour coproduire un long métrage sur la difficulté des rapports sentimentaux. "Grosse Gefühle" fait suite à "Liebe Lügen'(1995), qui est à ce jour le film suisse ayant connu le succès le plus populaire. A son générique nous retrouvons, entre autres acteurs suisses et autrichiens, le luxembourgeois André Jung qui, même s'il préfère monter sur les planches, s'est déjà profilé notamment devant les caméras d'Alexander Kluge.

Samsa Films

La société autour de Jani Thiltges et Claude Waringo reste incontestablement la plus prestigieuse de nos maisons. Vu le fait que l'impact culturel semble très important dans le choix des sujets, le cinéma d'auteur y trouve un support auprès de vrais cinéphiles. D'où bon nombre d'invitations dans des festivals du monde entier, distinctions à l'appui.

Parions que "Villa des Roses" dont le tournage s'est terminé chez nous fin août pour s'installer en Belgique, ne fera pas dans la facilité de scénario. Avec Julie Delpy et Shaun Dingwall comme héros de la première guerre mondiale, le film est réalisé par le belge Frank Van Passel qui a déjà réalisé l'excellent "Manneken Pis".

D'ici quelques jours, trois autres tournages devraient se chevaucher chez Samsa, dont un sous réalisation et production autochtone. Il s'agit de "Petite Misère" que se partagent le belge Philippe Boon et Laurent Brandenbourger, bien de chez nous et qui a réalisé un court-métrage (Luc et Marie) sélectionné aux Césars. Marie Trintignant et Albert Dupontel seront les protagonistes de la destinée quelque peu bizarroïde d'un huissier de justice, et les collègues d'Artemis, qui avaient déjà co-produit "Elles" et "Liaison pornographique" en seront les co-producteurs.

"Le troisième oeil' du belge Christophe Fraipont, est une sorte de road movie dans lequel Jérémie Renier (La Promesse) et Nozha Khouadra (La Nouvelle Eve) seront confrontés au crime, mais aussi à la prémonition.

Le premier tournage a être entamé sera sans doute celui de "Tempo". Cette fois c'est un américain, Bruce Mc Donald, qui est aux commandes, et il s'agit là d'un téléfilm, qui pourrait avoir Ornella Muti comme actrice principale (reste à confirmer).

Si l'on rajoute à tout cela les post-productions de "L'amour en suspens" (anc. Le Bal des Pantins) de Herman van Eyken avec  Marc Duret (seconds rôles chez Besson) et Andréa Ferréol, "Dis Pourquoi, Dis Comment" d'Agnès Obadia et Jean-Julien Chervier (la sexualité male et féminine filmée en double confrontation m/f), ainsi que les projets en développement, dont la comédie musicale "Nha Fala" avec Flora Gomes (Guinée Bissau), et "Bye Bye Blackbird' du fils de Jérôme Savary (Robinson), qui devrait se faire avec la maison "Road Movies" (Wenders et Ken Loach  se font produire par eux) ainsi qu'avec "Isabella Films" (co-responsable du dernier Lars van Trier), on se dit que le personnel de Samsa n'aura pas de quoi se reposer dans les prochains mois.

Petit bonbon avant que nous allions faire dodo: Geneviève Mersch va sans doute enfin voir le tournage de son premier long "J'ai toujours voulu être une sainte" concrétisé. Ce qui nous met de bonne humeur. Car nous avions déjà commencé à craindre qu'elle avait totalement vendu ses talents à la pub depuis qu'elle collabore aux spots de La Luxembourgeoise...

Nos amis des autres sociétés nous pardonneront pour l'instant. Mais le foisonnement sur le terrain nous oblige à remettre leurs projets en attente. Rendez-vous donc dans le prochain numéro avec Tarantula, Melusine, Neuroplanet, Oniria Productions, Classic Films, Studio 352, Broadcasting Center Europe. Et qui sait, peut-être d'autres nouveaux venus?