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Le secteur audiovisuel n'a pas été épargné par les restrictions budgétaires. Il lui manquera 500.000 euros cette année.

Alors même que le Grand-Duché prétend vouloir soutenir et développer le secteur culturel, dans son ensemble, et audiovisuel, en particulier, le gouvernement, dans son budget 2004, lui a coupé ses crédits. Le Fonds national de soutien à la production audiovisuelle (Fonspa) a ainsi vu son enveloppe réduite de 500.000 euros. De 4,5 millions en 2003 ? dont 3,5 millions alloués à la seule production audiovisuelle ? elle a fondu à 4 millions. Une situation que comprennent difficilement les producteurs qui estiment que, si les règles changent, un projet, bâti sur plusieurs années, peut tomber à l'eau.

Guy Daleiden, managing director du Fonspa, se veut rassurant, même s'il ne se réjouit pas de ces coupes budgétaires. "Il ne s'agit pas d'un acte politique de la part du gouvernement. Toutefois, comme il a dû épargner de l'argent, tous les fonds ont subi des diminutions".

Le ministre délégué aux Communications, François Biltgen, a promis que lorsque reviendraient les jours meilleurs, le budget serait revu à la hausse. Une promesse facile à faire, en cette période préélectorale. M. Daleiden assure que si le budget est revu à la hausse l'an prochain, il n'y aura pas de grandes répercussions. Le Fonspa peut en effet encore compter sur les 500.000 euros qui n'ont pas été dépensés l'an dernier. En revanche, si l'enveloppe devait continuer à fondre progressivement, il y aurait péril en la demeure. L'an dernier, 36 dossiers ont été traités et 21 d'entre eux se sont vu accorder une aide financière.

Deux types d'aides sont mises à disposition des producteurs: les aides automatiques, par le biais de certificats d'investissement audiovisuel, et les aides sélectives, attribuées pour le développement, la production et la distribution des films. Sur les 41 millions d'euros investis l'an dernier dans la production au Luxembourg, l'Etat a accordé des déductions fiscales à hauteur de 30%. Ces aides automatiques, qui constituent des non-recettes d'impôt pour l'Etat, se sont ainsi élevées à 12,3 millions d'euros. Mais d'une manière ou d'une autre, la moitié de ces 30% de pertes pour l'Etat, se retrouve réinjectée dans l'économie luxembourgeoise.

"Le cinéma

luxembourgeois n'existe pas"

Les aides sélectives, en partie débloquées une fois le film terminé, sont accordées après avis du comité de lecture et du comité économique et financier. Pour espérer obtenir un financement du Fonspa, les projets doivent avoir un lien avec la culture luxembourgeoise, que ce soit par le scénario, le lieu de tournage, la nationalité des techniciens ou celle du réalisateur. Le Fonspa devient ainsi actionnaire et, si recettes il y a, il sera rémunéré au prorata de sa mise. "Ces retours sont maigres . En moyenne, ils s'élèvent à 70.000 euros par an', avoue M. Daleiden.

Donato Rotunno, réalisateur et producteur de la société de production Tarantula, estime qu'il faudrait une vision politique du financement qui soit cohérente. "Elle doit s'inscrire dans une vision européenne. Sans volonté politique, le cinéma n'existe pas". Et de réclamer une professionnalisation du secteur: "Cela fonctionne ici comme un fonds régional'.

De son côté, Guy Daleiden estime que, contrairement à la fin des années 90, où les réalisations n'étaient pas professionnelles, on est capable, aujourd'hui, de réaliser des productions internationales.

Eddy Geradon-Luyckx, associé de M. Rotunno, reconnaît que l'enveloppe dévolue à la production audiovisuelle est confortable au Luxembourg, en regard de ce qui se pratique dans les autres pays, mais il estime qu'il faut renforcer les outils disponibles. Et Donato Rotunno de poursuivre: "La volonté existe mais l'on ne sait pas vers où l'on veut aller. Le cinéma luxembourgeois n'existe pas: il n'y a que des films en luxembourgeois. On a une spécificité luxembourgeoise ? 35 % de résidents étrangers - et l'on ne peut pas la nier", insiste-t-il.

Au Luxembourg, 450 personnes vivent de l'audiovisuel: 40 sociétés de production cohabitent, dont une quinzaine sont agréées par le Fonspa, ce qui leur permet de bénéficier du certificat d'investissement audiovisuel. Leur avenir est-il, à terme, menacé?