Christiane Wickler: «Le complexe d’infériorité qui caractérise parfois les femmes en Europe est beaucoup moins fort chez les Asiatiques.»  (Photo: Patrick Galbats / archives)

Christiane Wickler: «Le complexe d’infériorité qui caractérise parfois les femmes en Europe est beaucoup moins fort chez les Asiatiques.»  (Photo: Patrick Galbats / archives)

Elles étaient 40. 40 femmes cheffes d’entreprise réunies au sein de la prestigieuse Université de Stanford, sur le campus de Palo Alto (Californie) dans le cadre du «BNP Paribas Women Entrepreneur Program», créé avec le soutien de l'association Women business mentoring initiative.

Venant d’Asie, d’Europe, du Maghreb et des États-Unis, toutes ces femmes, âgées de 25 à 60 ans, ont eu l’occasion, pendant une semaine en juillet dernier, d’assister à des cours, forums et autres discussions sur des thématiques inhérentes au management, à l’économie, à la vie des entreprises.

Christiane Wickler (la deuxième au premier range, en partant de la droite) et l'ensemble des femmes qui ont assisté à ce séminaire à Stanford.
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Parmi ces 40 heureuses élues, une Luxembourgeoise: Christiane Wickler, administratrice déléguée du groupe de distribution Pall Center et présidente de la Fédération des femmes cheffes d’entreprises (FFCEL), qui reconnaît volontiers «être tombée de la chaise» lorsqu’elle apprit, à la fin du printemps, qu’elle était sélectionnée pour assister à ce programme.

Transformée!

Un peu plus d’un mois après, Mme Wickler en a encore les yeux qui brillent. «J’en ai été transformée», explique-t-elle à Paperjam.lu. «Tout d’abord, en présence de femmes d’horizons culturels si variés, j’ai eu la confirmation que l’avenir se trouve vraiment en Europe, avec la richesse de notre diversité! C’est la première fois de ma vie que je me suis sentie Européenne et fière de l’être, avec des valeurs humaines bien arrêtées.»

Autre révélation, ou plutôt confirmation: même si un décideur est souvent seul au moment de prendre une décision, cette solitude est finalement toute relative. «Nous n’avons peut-être pas les mêmes problématiques entre nous, mais nous avons sûrement les mêmes soucis. Et d’avoir pu les partager, cela nous a beaucoup aidés. Surtout qu’à 12 000 km de là, il est plus facile de se lâcher!»

L’entrepreneuriat n’a pas d’orientation sexuelle. Il faut arrêter de se comparer et miser plutôt sur la complémentarité.

Christiane Wickler, Pall Center

Neurosciences, marketing, langage corporel, manipulations, inclusion des plus faibles… les matières abordées ont été légion et les échanges entre participantes n’en ont été que plus riches. «Nous avons par exemple pu constater que nous, les Européennes, nous envisagions généralement les relations business avec un partenaire sous le mode ‘gagnant-gagnant’. C’est loin d’être aussi prononcé chez les Asiatiques ou les Américaines. Ce qui, pour nous, constitue une certaine fierté ressemble davantage à de l’appréhension chez elles. En revanche, on a pu constater que le complexe d’infériorité qui caractérise parfois les femmes en Europe était beaucoup moins fort chez les Asiatiques. Nous avons aussi eu des cours sur la négociation et là aussi, chacune a des façons bien spécifiques de négocier…»

Dans un cadre qui n’a absolument rien eu de revendicatif ni de «féministe» («De toute façon, à mes yeux, l’entrepreneuriat n’a pas d’orientation sexuelle. Il faut arrêter de se comparer et miser plutôt sur la complémentarité», estime Mme Wickler), les échanges ont été «sereins et qualitatifs, dans le seul but d’apprendre de l’autre et de partager».  

Une image positive du Luxembourg

Apprendre: non seulement en recevant des informations nouvelles, mais aussi en apprenant sur soi-même. «Le principe prôné par les Américaines de dire que ‘the second is the first looser’ n’a pas du tout été accepté par les autres, qui ont certainement développé une tout autre mentalité sociale de partage. En Europe, nous travaillons certainement moins avec les coudes pour écarter les concurrents.»

En passant, Christiane Wickler a pu mesurer combien l’image du Luxembourg était pour le moins positive, y compris auprès des entrepreneuses venues de France, un pays où les attaques médiatiques envers le Grand-Duché ne manquent pas. «On ne parle plus de paradis fiscal ou de rues bordées uniquement de banques. On parle aujourd’hui d’un petit pays qui est bien, très vert, très stable. On a même parlé du space mining. En tous les cas, je n’ai pas entendu une seule fois de réaction négative.»

Nous devons être maîtres de la digitalisation et non pas esclaves.

Christiane Wickler, Pall Center

Redescendue du nuage sur lequel elle flotte depuis un mois, Mme Wickler envisage déjà la suite avec un enthousiasme régénéré. Dès septembre, elle retrouvera les entrepreneuses belges et françaises rencontrées à Stanford dans le cadre d’un événement spécialement organisé à Malines (Belgique) et d’autres initiatives similaires suivront rapidement, dans le cadre de la FFCEL qu’elle préside. «Nous avons toutes la volonté de contribuer positivement aux bouleversements que connaît la société actuellement. Nous n’en avons pas peur et nous sommes prêtes à donner un coup de main et à partager nos compétences. Et le tout en mettant les avancées technologiques et digitales à notre service, et non pas le contraire. Nous devons en être maîtres et non pas esclaves. Et sur ce point-là, nous avons toutes été unanimes!»