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Christiane Schmitt, (Photo: David Laurent) 

Madame Schmit, vous occupez vos fonctions depuis décembre 1996. Comment jugez-vous l’évolution de votre métier, depuis 13 ans?

«Même si le titre reste le même, j’ai le sentiment d’avoir pratiqué plusieurs métiers depuis. Cela est aussi fonction de la personnalité des différents présidents de comités de direction dont je dépends directement. J’en ai connu quatre différents. Le premier, le regretté Jean Krier, était plutôt conservateur dans sa façon d’envisager la communication. Les trois suivants, André Roelants, Marc Hoffmann et Frank Wagener, ont chacun des caractères et des visions très différents. C’est ce qui fait la richesse de la fonction. Je n’ai jamais connu la routine.

L’environnement économique général a beaucoup influé aussi. Du temps d’André Roelants, c’était une époque glorieuse où les banques réalisaient des grands bénéfices et procédaient à des acquisitions à l’étranger. Il n’y avait pas de limite au métier de banquier et la communication suivait. C’était aussi le temps de l’OPA de Dexia, qui fut un des premiers projets de grande envergure pour mes équipes et moi. 

Puis, avec Marc Hoffmann, ce fut le 11 septembre et ses conséquences, avec une période 2003-2004 délicate, axée sur la communication de crise, suite aux problèmes liés à des acquisitions aux Pays-Bas. Mais ce fut aussi le développement de l’Internet banking, la création de RBC Dexia et le 150e anniversaire de la banque au Luxembourg, en 2006. Nous avons, pendant un an, multiplié les opérations pour remercier l’ensemble de nos stakeholders pour leur fidélité.

Sous la présidence de Frank Wagener, il y a eu l’inauguration et la communication autour de nos immeubles à Esch Belval et, en 2007, la venue d’Al Gore. Enfin, depuis quelques mois, il y a cette crise que l’on connaît. A chaque fois, il y a eu de nouveaux défis à relever, en s’adaptant aux technologies existantes. Nous sommes restés, depuis le début, une équipe d’une quinzaine de personnes, mais nous avons beaucoup plus à faire aujourd’hui qu’hier.

 
Etre une entité locale au sein d’un groupe international vous complique-t-il la tâche? Et quelle est, dans ce contexte, la marge de manœuvre dont vous disposez vraiment?

«Il est évident que cela n’a plus rien à voir avec ce que nous faisions du temps de la BIL. Chacune de nos opérations doit recevoir l’accord de la direction générale à Luxembourg et de la direction de la communication du groupe, dans le respect de la charte globale de Dexia, que ce soit pour les campagnes de publicité, les communiqués de presse, les relations publiques…

Nous disposons tout de même, dans ce cadre défini, d’une certaine marge de liberté. Le groupe a bien compris qu’il était essentiel que la Communication au Luxembourg, nécessitant des connaissances du pays et de ses réseaux, soit dirigée par une équipe locale. 

Cela a, par exemple, servi avec la récente affaire du versement par l’Etat luxembourgeois de 376 millions pour Dexia BIL. Je ne compte pas les échanges de coups de fil et de mails qu’il y a eu entre notre direction générale et le ministère des Finances pour rédiger une prise de position commune et cohérente. Cela a été facilité par les bonnes relations que j’entretiens avec Luc Frieden.

 
La crise économique et financière qui a touché directement Dexia BIL a-t-elle aussi été source de changement dans la façon de communiquer?

«Depuis 2008, le métier de directeur de la communication dans une banque en général, et en particulier celles touchées par la crise, a beaucoup changé. Les clients ont perdu confiance dans presque toutes les banques. Nous avons nous-mêmes interrogé beaucoup de gens, clients ou non, et nous avons constaté qu’ils estiment ne pas être écoutés. Ils ont développé une certaine hostilité envers les traders et les grands patrons, mais ils ont gardé la confiance dans leur conseiller personnel, leur personne de contact. C’est à cela que nous nous accrochons au moment où nous sentons que nous sortons doucement de la crise.

Notre stratégie de communication consiste actuellement à faire en sorte de regagner cette confiance perdue à travers nos conseillers qui ont conservé une bonne image. Nous avons développé tout un concept de publicités, depuis le printemps, avec des vrais employés et gérants. Nous allons poursuivre à la rentrée. Dans le même temps, nous cherchons à être plus transparents et plus clairs dans nos discours. Nous devons nous rapprocher du client et l’écouter, lui expliquer tout ce qui est arrivé et tout ce que nous allons faire pour améliorer les choses.

 

Y a-t-il encore aujourd’hui, dans ce contexte, de la place pour l’innovation dans la façon de communiquer?

«Bien sûr! Que ce soit en communication interne ou externe, nous cherchons en permanence de nouvelles façons de communiquer. Nous avons par exemple imprimé des cartes postales que l’on retrouve dans les bars en ville pour promouvoir l’image de nos conseillers, comme expliqué précédemment. En interne, nous avons fait d’autres cartes postales à disposition de nos personnels à la cafétéria, avec des témoignages vantant les bienfaits de la mobilité interne, et relayées par notre Intranet. Nous développons aussi beaucoup les podcasts sur cet Intranet, avec des interviews vidéo. Nous avons également distribué des DVD à tous nos personnels pour leur présenter notre politique de mobilité interne. 

Enfin, nous sommes en train de mettre en place un blog qui sera destiné à notre activité de banque privée, où tous nos conseillers seront informés en permanence sur les nouvelles tendances, les décisions des banques centrales, les cours euro-dollar, etc. Il sera mis en ligne avant la fin de l’année.

En externe, nous sommes de plus en plus attentifs aux journaux en ligne et aux réseaux sociaux. Nous devons être vigilants à l’égard de tout ce qui peut se dire sur nous dans les commentaires postés sur les articles ou communiqués. Dexia sous-traite en partie cette activité de «veille» avec une agence spécialisée à Paris.

 

Quels sont les défis que vous percevez pour les prochaines années?

«D’une manière générale, j’ai le sentiment que les entreprises hésitent à utiliser la communication pour se positionner vraiment. Elles se concentrent sur la vente de leurs produits ou services, sans insister sur le côté valeurs, missions. Peut-être ont-elles peur et jugent-elles un tel positionnement comme potentiellement dangereux pour leur image. Les banques sont un peu à part, au sortir d’une crise d’image sans précédent. Il faudra évidemment qu’elles passent par cet exercice de repositionnement. Il est en cours, mais n’est sans doute pas encore terminé. Il y a d’autres urgences en termes de communication concernant la transparence et le retour à la confiance. Sans doute en 2010 aurons-nous l’opportunité de développer davantage cet aspect positionnement.»