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Christian Scharff (Photo: Julien Becker) 

Monsieur Scharff, quels sont les grandes lignes et les grands défis de votre politique RH aujourd'hui?

«Notre volonté est d’être le plus proche possible de nos clients internes (collaborateurs et cadres), de comprendre leur métier, leur environnement afin de délivrer des services et conseils à valeur ajoutée, tant à Luxembourg que dans nos filiales internationales. Nous souhaitons par ailleurs livrer toute la chaîne des services administratifs RH avec une volonté constante de qualité élevée pour un prix strictement sous contrôle grâce à des processus maîtrisés et une informatique développée (utilisation intensive des outils ‘e’, centre de services, etc.).

Nos défis peuvent paraître assez «communs», trouver les meilleurs collaborateurs possibles et les faire grandir au sein de l’organisation. Leur offrir un cadre clair, motivant, dans lequel ils peuvent se développer et apporter de la valeur à l’organisation. C’est un objectif simple. Mais tellement de facteurs entrent en jeu dans sa réalisation qu’il s’avère très complexe à réaliser. C’est ce qui rend notre métier si exigeant et passionnant.

Quelle est, selon vous, l'évolution la plus significative dans le domaine de la gestion des ressources humaines au cours de ces vingt dernières années et comment envisagez-vous l’évolution prochaine du métier du DRH?

«Une double évolution. D’une part, la transformation d’une fonction principalement administrative en une fonction de ‘front office’, en contact avec les collaborateurs, de conseils en carrière, en changement, en design organisationnel… D’autre part, une révolution de la chaîne de services offerts d’un point de vue administratif avec un développement fulgurant des outils ‘e-’, des centres d’appels pour le personnel avec des critères de qualité toujours plus élevés. La notion de client a remplacé dans notre vocabulaire celle ‘d’employé’. Des termes comme SLA ou KPI sont entrés dans notre vocabulaire.

Pour ce qui est de la rémunération, quelles sont vos grandes tendances actuelles en la matière?

«Nous notons une plus grande différenciation des bonus octroyés entre les forces commerciales et de support, ainsi qu’une évolution vers des bonus différés pour certaines catégories de population. Par ailleurs, nous pensons à introduire la notion de développement durable, c’est-à-dire une politique de voitures de fonction plus respectueuses de l’environnement.

Quelles sont les attentes de vos salariés en ce qui concerne le développement de leurs compétences?

«Elles sont multiples, que cela soit sur le plan technique ou comportemental. Elles varient bien sûr suivant la fonction occupée, mais également suivant le parcours professionnel de chacun: à chaque moment clé d'une carrière correspondent des attentes et besoins particuliers.

Notre équipe ‘Développement’ conçoit et propose des dispositifs répondant aux attentes identifiées et qui sont liés aux besoins qui s'inscrivent dans le déploiement du business plan des différentes divisions. Ils vont du parcours d'intégration pour les jeunes diplômés nouvellement embauchés au 360° feedback pour les cadres supérieurs, en passant par des programmes pour nos hauts potentiels (Marco Polo, Development Center Deal, …) et du suivi individuel des besoins en développement sous la forme de coaching ou de mentoring par exemple.

Quel est le degré d'adhésion des salariés à l’exercice d’appréciation des compétences? Et celui des managers?

«Les compétences des employés sont appréciées tout au long de l'année par leurs managers au travers de leur travail quotidien ou de différents process. Le tout est formalisé en fin d'année au cours de l'entretien d'évaluation. Tous les salariés sans exception participent à l'exercice. Tant les collaborateurs que les managers en sont demandeurs.

S'il apparaît clairement que pour certains l'attribution du bonus lié à la performance est l'enjeu de ce moment charnière, l'entretien d'évaluation est loin de se limiter à ces discussions d'ordre financier. Bien plus que cela, il s'agit d'un temps de partage privilégié qui offre la possibilité de faire le point sur l'atteinte des objectifs fixés aux collaborateurs, mais aussi de parler de leurs souhaits en matière de développement: leurs besoins en formation, leurs désirs de mobilité ou leurs aspirations diverses en termes d'évolution professionnelle. L'adhésion des uns et des autres se trouve également renforcée lors de la fixation des objectifs en début d'année.

Quelle est votre définition du terme ‘qualité de vie’ (ou ‘bien-être’) au travail?

«L’entreprise est un lieu dédié au travail. On a souvent opposé les notions de travail et de ‘qualité de vie’, voire de ‘bien-être’. L’équilibre vie privée, vie professionnelle et la santé de 2.000 collaborateurs sont deux préoccupations permanentes chez Dexia.

C’est ainsi que, suite à une enquête interne, une série de services in-house ont été mis en place tels que le temps partiel à la carte, la garde d’enfants malades, un pressing et bien d’autres encore. En termes de santé de nos collaborateurs, nous avons instauré une série de mesures pour la promotion de la santé, comme les bilans de santé, une infirmerie, la possibilité de prendre des repas équilibrés au sein même de l’entreprise, etc.

Dexia BIL apporte par ailleurs son soutien à différentes associations sportives et met une salle de fitness à disposition de ses employés. Nous avons, en outre, obtenu le prix «Santé en Entreprise» cette année pour notre campagne bâtiment «non-fumeurs».

A propos de l’égalité des chances, quelles sont les mesures que vous avez mises en place?

«L'objectif de la banque est la valorisation du capital humain de l'entreprise, prenant en compte d'autres aspects de la diversité comme la nationalité, l'âge, la culture ou le handicap. Conscients des retombées positives que peut amener la diversité pour l'ensemble des membres du personnel, nous avons ouvert, en collaboration avec le ministère luxembourgeois de la Promotion féminine, un premier chantier dans ce sens, en entamant une réflexion de fond sur l'équilibre homme/femme au quotidien.

C'est ainsi que depuis 2003, une équipe spécialement dédiée se penche sur cette question et a déjà pris une série de mesures, en étroite collaboration avec la présidence de la banque et la délégation du personnel. Nous avons notamment décidé de soutenir et d’encourager particulièrement le management féminin en tenant compte des particularités liées aux congés parentaux ou aux aménagements du temps de travail.

Notre investissement dans la promotion de notre personnel féminin a été récompensé en mars 2004 par l'attribution du ‘Prix Féminin de l'Entreprise’, décerné par le ministère de la Promotion féminine. A la suite de quoi nous avons créé le prix ‘Woman Business Manager of the Year’, contribuant ainsi aux efforts de promotion du rôle de la femme dans l’économie luxembourgeoise.

En quoi les ressources humaines font-elles, aujourd’hui, du marketing? En quoi contribuent-elles à l’image de marque de l’entreprise?

«En dehors des clients qui ont pour premier contact les professionnels du front office, les autres types de contacts externes sont principalement de deux natures: les fournisseurs et les candidats. Dans ce cadre, les RH agissent donc souvent comme premier contact avec Dexia.

Qu’un candidat soit retenu ou non, qu'il accepte ou qu'il décline notre offre potentielle, notre objectif demeure de véhiculer une image positive et honnête. Les collaborateurs RH doivent donc bien connaître Dexia et se faire les ambassadeurs de ses valeurs et de sa stratégie. Les RH contribuent donc au marketing de Dexia de manière réactive, mais aussi en tant qu’acteurs: notre présence sur les sites web, notre participation régulière à des événements liés au recrutement tels que des forums en France, en Belgique ou au Luxembourg, notre présence sur Second Life sont autant d’actions marketing.

Quels sont, selon vous, les avantages et les inconvénients du métier du DRH? Et quelles sont les qualités essentielles pour l’exercer?

«Il faut être rigoureux tout en étant capable d’être souple; il faut pouvoir être dur, tout en sachant rester profondément humain; il faut connaître les détails et rester en contact avec les gens et le terrain tout en prenant de la hauteur; il faut savoir écouter et parfois faire la sourde oreille.

Complétez le tableau avec une bonne dose d’humilité, d’humour, beaucoup de curiosité, un talent de communicateur et une bonne capacité de travail. Vous tenez votre candidat DRH.

Nous sommes au cœur de la vie de l’entreprise, de sa stratégie. Nous disposons d’un poste d’observation fascinant sur la manière dont les affaires sont conduites, sur les compétences managériales. Contrairement à beaucoup d’idées reçues, ce n’est pas un poste de pouvoir mais d’influence. Et la nuance est de taille dans la manière de l’exercer. L’imprévu est vraiment tous les jours au menu.

Pour conclure, quels conseils donneriez-vous aux jeunes qui souhaiteraient suivre vos traces?

«Il me semble impératif de bien comprendre le business et de se doter de solides connaissances en RH. Notre fonction est fort variée et le parcours est long pour maîtriser toutes les facettes de la fonction. Mais c’est ainsi que l’on se construit un profil ‘complet’.

Enfin, ce métier demande un excellent équilibre personnel car, pour bien s’occuper des autres, il faut d’abord bien savoir s’occuper de soi et être bien dans sa peau et sa tête, sur le long terme. Car c’est une course de fond qui attend notre candidat DRH».