Philippe Gosset (plant manager Mc Bride Foetz): «L’entreprise prend un virage.» (Photo : Charles Caratini)

Philippe Gosset (plant manager Mc Bride Foetz): «L’entreprise prend un virage.» (Photo : Charles Caratini)

Philippe Gosset, plant manager de Chemolux-McBride, sur la zone de Foetz, est formel : « Ce vendredi matin, la phase 2 du plan social a été annulée. Il n’y aura pas de réduction d’effectif supplémentaire. » C’est évidemment une bonne nouvelle, même si elle peut surprendre, alors que les craintes pour le site même étaient encore bien réelles il y a très peu de temps.

Le plan social pouvait potentiellement toucher 140 personnes, pratiquement la moitié de l’effectif salarié total. Quelques aménagements avaient déjà été annoncés, après les interventions syndicales notamment. Mais une première vague de licenciements avait frappé 48 personnes. Et on s’attendait à une seconde lame. « On a effectivement fait l’actualité, poursuit M. Gosset. On ne pouvait pas beaucoup communiquer, parce que nous n’avions pas toutes les réponses. Beaucoup de choses se sont passées. Et la situation s’est bien débloquée. »

Henkel et le « private label »

Le groupe allemand Henhel a fait office de déclencheur. L’ancien propriétaire de Chemolux restait client du repreneur McBride, fabricant notamment de poudres pour lave-vaisselle. Quand Henkel a annoncé qu’il récupérait la production jusque-là faite à Foetz, Chemolux s’est retrouvée face à la perte de 48 % de ses volumes de production et de 66 % de la couverture de ses frais fixes. « On s’est battus et on s’est fait aider. Les autorités luxembourgeoises – ministères de l’Économie et de l’Emploi – ont joué le jeu, de même que les partenaires sociaux, l’ensemble du personnel et notre maison mère », résume Philippe Gosset, arrivé à Foetz il y a une grosse année pour prendre en charge les ressources humaines… « L’objectif a été de trouver des solutions, de rebondir et de maintenir un maximum de monde ici. »

Les planètes se sont alors réalignées. Henkel s’est ravisé, est resté client, avec moins de volumes, mais en préservant l’essentiel. Chemolux a même racheté les deux lignes dédiées à Henkel, de sorte que, en cas de nouveau revirement, les unités puissent être réorganisées en interne. Et puis Chemolux a misé sur la R&D et l’innovation technologique pour une gamme de produits ciblés. McBride, qui travaille avec des marques (comme celles du groupe Henkel) a aussi un positionnement fort sur le « private label », le « produit blanc » destiné à de grands distributeurs, comme Lidl, Schlecker, Carrefour, Auchan ou Marks & Spencer. En arrivant avec un nouveau produit, développé et fabriqué au Luxembourg, Chemolux s’ouvre des perspectives.

3 millions d’investissements, 170 personnes sur site

Alors qu’elle commence ce 1er juillet une nouvelle année fiscale, l’entreprise se retrouve, comme dit son directeur, « toujours dans le dur, mais avec un horizon ». En l’occurrence un plan industriel à cinq ans : si la visibilité reste sujette aux changements de stratégie (de la clientèle notamment), le carnet de commandes est engageant. Le groupe McBride a signé une convention d’investissement de quelque 3 millions d’euros pour cette année et place l’avenir du site en centre d’excellence, pour les produits de vaisselle.

« L’entreprise prend un virage » et, selon M. Gosset, « n’exclut pas, si tout tourne bien, de procéder à des extensions de production ». Pour l’heure, les négociations avec tous les partenaires ont permis de ramener la paix sociale. Une flexibilité a été introduite, le flux continu (en trois pauses) de semaine débordant sur certains samedis. Le « summer plan » prévoit le recours à une trentaine d’intérimaires, les licenciés de la première vague étant prioritaires. Avec un vivier de quelque 240 personnes, « on aura toujours sur le site quelque 170 travailleurs », précise le directeur, « dont une centaine en production ». Celle-ci ne perdra pas la moitié de son poids : d’environ 56.000 tonnes, elle devrait passer et se stabiliser entre 40 et 42.000 tonnes de poudre, selon les prévisions.

Avec le « faux départ » de Henkel, Chemolux-McBride a même tiré parti du rebond : des lignes de production ont effectivement été « transférées », depuis les usines de Moyaux (France) et de Barrow (Angleterre), sur Foetz, qui se réoriente. L’aspect R&D, encouragé par les autorités du pays, prend une nouvelle dimension, avec aides à l’appui, notamment pour les investissements dans la recherche. Il n’est pas impossible non plus que, à terme, le Luxembourg et son système attractif pour la propriété intellectuelle séduisent McBride pour le dépôt et la gestion de ces brevets.