«L’important, dans l’entrepreneuriat, est d’avoir une certaine capacité d’apprentissage»  (Photo: David Laurent/Wide)

«L’important, dans l’entrepreneuriat, est d’avoir une certaine capacité d’apprentissage»  (Photo: David Laurent/Wide)

Voici une dizaine d’années, Marco Houwen lançait, avec Datacenter Luxembourg, sa première société active dans le secteur des technologies et de la sphère Internet. Depuis ces temps qui peuvent, aujourd’hui, paraître préhistoriques, l’homme a fait du chemin. Parmi ses principaux faits d’armes, on peut citer le développement d’EuroDNS, société dédiée à la gestion des noms de domaine, ou encore une contribution majeure à la création de Lu-Cix, point d’échange Internet commercial du Luxembourg, fédérant plusieurs acteurs du secteur pour en assurer la promotion et le développement.

Depuis deux ans maintenant, Marco Houwen, à travers LuxCloud, une autre société à part entière, s’attèle à un nouveau projet majeur. «Pendant des années, nous nous sommes battus pour amener de l’e-business au Luxembourg, explique-t-il. Mais nos efforts n’ont réellement pu être récompensés qu’à partir de 2006, avec le changement de stratégie du gouvernement en la matière. Si bien que début 2009, le nombre d’acteurs évoluant dans ce nouveau cadre s’était considérablement développé.»

Face à cette nouvelle donne, dans un environnement concurrentiel important, il a fallu chercher de nouvelles pistes de développement. «Nous nous sommes soudainement réveillés et avons étudié les possibilités qui s’offraient à nous en vue d’innover, explique-t-il. Nous avons cherché, au sein de notre secteur, quel serait le prochain changement de paradigme.»

LuxCloud n’est autre que le fruit de cette recherche. Avec, au départ, un constat auquel Marco Houwem a voulu apporter une réponse: le désir des acteurs de petite et moyenne envergure de ne plus être contraints d’acquérir des serveurs et des licences onéreuses pour bénéficier de solutions informatiques efficaces et flexibles. Avec LuxCloud, le jeune entrepreneur veut proposer un outil qui permettra, aussi bien aux développeurs de solutions IT qu’aux intégrateurs, de proposer des services flexibles à leurs clients, via des solutions pay as you go. «La plate-forme LuxCloud pourrait être comparée à l’AppStore des services IT professionnels. Avec elle, les entreprises pourront accéder à une multitude de services IT en ligne. En tant qu’intermédiaire entre ces entreprises utilisatrices et les développeurs, nous gérons la mise à disposition des services sur la plate-forme, les droits d’utilisation par les entreprises, les upgrade et downgrade, ainsi que la facturation liée à leur utilisation, explique Marco Houwen. LuxCloud est un canal qui permettra aux développeurs de vendre directement les services qu’ils proposent. La grande différence, par rapport à l’AppStore, c’est que l’utilisateur final dans le cadre LuxCloud n’aura pas à télécharger le service pour l’utiliser, ni à l’héberger. Tout se fera en ligne.»

LuxCloud se positionne comme un projet précurseur dans un marché qui doit encore émerger et la société veut en être un acteur incontournable en positionnant ce projet, dont la réussite commerciale est notamment basée sur des économies d’échelles, sur un marché d’envergure européenne. «L’ambition est énorme, autant que le potentiel de ce projet. Aujourd’hui, l’outil est là et est opérationnel. S’il peut et doit encore évoluer, c’est la réussite autour du produit que nous devons désormais créer.»

Pour y parvenir, LuxCloud compte approcher le marché par plusieurs voies différentes. Marco Houwen veut, d’une part, s’adresser aux intégrateurs qui, selon lui, auront à l’avenir un rôle primordial à jouer dans le conseil et l’orientation des entreprises à l’heure d’entreprendre des choix pour leurs solutions informatiques. A ce niveau, le jeune entrepreneur tient à valoriser leur rôle en leur laissant, avec des solutions hébergées sur la plate-forme LuxCloud, la possibilité de faire des marges bénéficiaires. D’autre part, M. Houwen dit négocier avec des acteurs de plus grande envergure, comme des fonds d’investissement, afin de trouver des partenaires financiers et des organismes à même d’aider LuxCloud à se développer vite et bien. «A l’heure actuelle, nous avons environ une année et demie d’avance sur nos concurrents. Mais il est crucial de la préserver. Pour cela, il nous faut nous entourer des meilleurs. Nous sommes en permanence à la recherche de talents.»

Marco Houwen a toujours préféré l’entrepreneuriat à la voie habituelle que suivent, dit-il, ses concitoyens: celle qui les amène irrémédiablement dans la fonction publique. «C’est quelque chose que j’ai en moi, une farouche envie de créer, de construire», assure-t-il.

Après quelques aventures pas forcément concluantes à l’étranger, il est revenu au Luxembourg pour lancer les projets que l’on connaît aujourd’hui. «Des erreurs, tout le monde en fait. Il faut pouvoir en tirer les enseignements nécessaires et passer outre.» En travaillant sur les nouvelles technologies, il a bataillé ferme pendant plusieurs années. LuxCloud est le fruit du développement et de la capitalisation d’un savoir et d’un savoir-faire en la matière, «un aboutissement aussi bien qu’un nouveau départ, avec un potentiel important».

La capacité d’apprendre

Il détient en direct 20% des parts de LuxCloud, mais est aussi actionnaire via Datacenter Luxembourg qui détient 31% du capital. Les 49% restants sont entre les mains de LuxConnect, société anonyme détenue à 99% par le gouvernement. Avec cette entreprise établie à Leudelange, il emploie déjà neuf personnes, mais les développements à venir, inscrits dans le business plan, en prévoient une vingtaine pour la fin de cette année, 35 pour la fin 2012. C’est dire si Marco Houwen table sur une forte croissance. Vite et bien.

«Je ne suis peut-être pas né avec un ordinateur sur les genoux, mais je suis, en revanche, passionné par la technologie et les nombreuses possibilités qu’elle nous offre. Néanmoins, je reste, avant tout, un utilisateur, confie le finaliste de cette cinquième édition de ce CYEL Award. L’important, dans l’entrepreneuriat, est d’avoir une certaine capacité d’apprentissage. On ne peut pas tout savoir. Un chef d’entreprise doit être là pour soutenir le travail et les solutions avancées par ses collaborateurs. Et, au final, pour prendre les décisions et les assumer.»

C’est un des autres préceptes forts de la vision de l’entrepreneuriat de Marco Houwen, persuadé que «la seule mauvaise décision, c’est celle de ne pas en prendre». Mais la prise de décision doit, dit-il, laisser une place au doute. C’est ce dernier qui pousse à la remise en question, et à l’amélioration du projet, à la réévaluation permanente des décisions prises.

Reste que pour créer, il faut pouvoir regarder vers demain. «D’un point de vue stratégique, pour développer des projets créatifs, il faut pouvoir se détacher de l’opérationnel, explique-t-il. Il est difficile de travailler à une vision de demain, sur un projet créatif en devant régler de manière permanente les problèmes d’aujourd’hui.»

Cette place en finale du CYEL Award, Marco Houwen la considère avant tout comme une reconnaissance, pour le travail qu’il a accompli, mais aussi pour l’intérêt que présente le projet qu’il porte. «C’est important d’être reconnu pour ce qu’on fait. Nous en sommes à un stade, avec LuxCloud, où nous en avons besoin, tant à l’échelle nationale qu’à l’échelle internationale.»