Alors qu’un deuxième aéronef doit revêtir les couleurs italiennes de Cargolux, pilotes et syndicats se font entendre. (Photo: Licence CC)

Alors qu’un deuxième aéronef doit revêtir les couleurs italiennes de Cargolux, pilotes et syndicats se font entendre. (Photo: Licence CC)

L’Association luxembourgeoise des pilotes de ligne et le syndicat LCGB ont organisé ce mardi une action de sensibilisation à la volonté de Cargolux de confier l’exploitation à sa branche italienne d’un deuxième Boeing 747. Ce qui les inquiète au plus haut point.

Pour comprendre, pas inutile de procéder à un petit zoom arrière. Cargolux a créé sa filiale Cargolux Italia en 2008, afin d’opérer depuis Milan Malpensa vers l’Asie, notamment. Pour ce faire, la compagnie luxembourgeoise loue un Boeing 747 à sa filiale afin qu’elle assure des vols de fret vers le Japon, Hong Kong et Dubaï. Dans un premier temps, des pilotes employés au Luxembourg ont assuré ces prestations.

«Mais aujourd’hui, tous les pilotes, soit 25 personnes environ, sont employés par la filiale italienne. C’est le cas depuis 2013. Et nous avions alors accepté le principe, puisque dans le même temps, cette présence à Milan générait également de l’activité pour les professionnels luxembourgeois, 50% des vols entre Milan et les États-Unis étant assurés par ce que l’on appelle du wet-lease, autrement dit avec de la location d’équipages (luxembourgeois, donc)», précise Aloyse Kapweiler, le secrétaire syndical du LCGB.

«Contourner le modèle social luxembourgeois»

Or, en mai dernier, la compagnie Cargolux a annoncé vouloir équiper sa filiale transalpine d’un second Boeing 747, sous prétexte que les coûts salariaux sont moindres qu’au Luxembourg et que le groupe y gagnera en rentabilité. «Faux. Non seulement parce que les salaires ne pèsent pas lourd sur les coûts d’un long vol, mais également parce que la création de Cargolux Italia a généré et génère encore des frais inutiles, la compagnie n’ayant nullement besoin de créer une filiale qui détient une licence d’exploitation italienne pour opérer des vols depuis Milan. En plus, cette filiale est déficitaire depuis six ans», précise Aloyse Kapweiler.

Dès lors, quelles sont les motivations de Cargolux? «Ce n’est pas clair, mais si un deuxième avion part en Italie, pourquoi pas un troisième, un quatrième… Et puis la maintenance également», s’interrogent le LCGB et l’Association luxembourgeoise des pilotes de ligne (ALPL).

Le duo, en revanche, a des certitudes. «Cette décision vise à contourner le modèle social luxembourgeois, à épargner le paiement d’impôts au Luxembourg et à dévier les futures embauches vers l’Italie», a écrit le responsable syndical dans un courrier adressé à François Bausch, le ministre du Développement durable et des Infrastructures, le 28 mai dernier. Courrier pour l’heure resté lettre morte, confie le LCGB.

Contre un deuxième transfert

Compte tenu de cet apparent manque de transparence et de l’impact présumé sur le «modèle social luxembourgeois», le syndicat et les pilotes exigent que Cargolux renonce au transfert de l’avion, d’ores et déjà programmé pour le 24 septembre. «Surtout que nous venons d’apprendre que les liaisons opérées entre Luxembourg et Sharjah (Émirats arabes unis) et entre Luxembourg et Amman (Jordanie) seraient également désormais assurées par Cargolux Italia», révèle Aloyse Kapweiler. «Nous revendiquons que le gouvernement luxembourgeois (l’État est actionnaire de Cargolux à hauteur de 8,32%) veille à pérenniser le site du transport et de la logistique luxembourgeois, les emplois y a affectés, ainsi que la garantie que le dumping social ne devienne pas le modèle pour le Luxembourg», assènent le LCGB et l’ALPL.

Et si rien ne bouge? «Le personnel a toujours fait preuve de disponibilité et d’une grande flexibilité. Personne n’a jamais dit non à des heures supplémentaires. Cela pourrait changer», prévient Aloyse Kapweiler.