Finalement, ce n'est pas Albert Wildgen qui disparaît de la photo du CA, mais Marc Hoffmann. (Photo : Luc Deflorenne/archives)

Finalement, ce n'est pas Albert Wildgen qui disparaît de la photo du CA, mais Marc Hoffmann. (Photo : Luc Deflorenne/archives)

Ce lundi, le conseil d’administration de la société luxembourgeoise de fret aérien, Cargolux, s’est réuni afin de valider les résultats financiers de 2011. Annoncés « négatifs » par Frank Reimen, CEO, depuis le mois de janvier, aucune information plus précise n’a filtré à cet égard. Cependant d’autres décisions, sorties au compte-gouttes par les parties prenantes, ont davantage retenu l’attention.

D’abord, selon nos informations, l’avocat Albert Wildgen, président du conseil d’administration, a été invité à poursuivre son travail à la tête de l’instance suprême de décision de la compagnie tout-cargo. L’homme de confiance de la famille royale du Qatar – dont la compagnie nationale a acquis 35 % des parts de Cargolux - avait pourtant annoncé en septembre 2011, dès sa première réunion du CA dans sa version luxo-qatarie, qu’il ne briguerait pas un deuxième mandat après l’assemblée générale ordinaire de mars 2012.

Wildgen parti pour rester

Il est manifestement revenu sur sa parole. Ce choix reste à valider par les actionnaires le 28 mars. Il faut donc comprendre que la piste de l’ancien bourgmestre de la ville de Luxembourg, Paul Helminger, envisagé par la partie luxembourgeoise, a été écartée par les actionnaires du Golfe Persique. Qui remplacera alors Marc Hoffmann, comme représentant des intérêts de Luxair (et indirectement placé par l’État) ? La question est posée et revêt d’autant plus d’importance que l’intéressé siège au comité stratégie, aux côtés d’Akbar Al Baker (Qatar Airways) et d’Albert Wildgen, suppléés par les Agutter père et fils (consultants), ainsi qu’Adrien Ney (Luxair) et Jean-Claude Finck (Banque et Caisse d’Épargne de l’État).

Autre décision prise ce lundi : la création d’un comité de restructuration dirigé par Frank Reimen et Richard Forson, récemment nommé directeur financier et prétendu garant des intérêts qataris puisqu’il a exercé chez Qatar Airways entre 2003 et 2006. Son objectif sera d’améliorer la rentabilité de l’entreprise dans un contexte difficile. L’activité cargo, en général, subit une baisse de la demande. Singapore Airlines a par exemple réduit ses capacités de fret de 20% en février. Jade Cargo, joint venture entre Lufthansa et China Cargo, est en pleine restructuration et CargoItalia a cessé ses activités depuis décembre.

Pas d’augmentation de capital

Pour autant, selon nos sources, la recapitalisation de la société, ainsi que l’augmentation de la participation de Qatar Airways dans Cargolux, n’ont pas été envisagées.

Par ailleurs, les syndicats ont obtenu ce qu’ils demandaient depuis plusieurs semaines, à savoir une réunion (prévue lundi 26 mars) avec les ministres de tutelle : Claude Wiseler, ministre du Développement durable et des Infrastructures, et Étienne Schneider, ministre de l’Économie et du Commerce extérieur. Les syndicats souhaiteront y évoquer « tout ce qui touche à l’aéroport de Luxembourg et au Qatar ». Ils s’inquiètent de cette prégnance politique dans laquelle « tout ce qui est vrai à 10 heures ne l’est plus à 11 heures », nous confie une source syndicale. Ils craignent en fait que le gouvernement ait fait rentrer le loup dans la bergerie, que les actionnaires qataris sacrifient des emplois sur l’autel de la rentabilité.

Genre littéraire

Le mutisme du gouvernement et de la communication de l’entreprise avait en effet alimenté les fantasmes ces dernières semaines. Spéculer sur l’avenir à moyen terme de Cargolux en était devenu un genre littéraire. Les syndicats s’étaient, entre autres, émus de la possibilité pour la compagnie qatarie d’acquérir 49,9% des parts de Cargolux pour en devenir l’actionnaire principal et en menacer, le cas échéant, les emplois.

D’autant plus que le CEO de la compagnie du Golfe Persique, Akbar Al Baker, n’a pas ménagé ses associés luxembourgeois dans ses sorties médiatiques courant mars. Lors d’un entretien accordé au média de référence pour le secteur de l’aviation, Flightglobal, il avait déclaré: « Il est important que leur culture et leur façon de traiter les affaires évoluent. Les temps ont changé, mais pas leur modèle économique. Nous voulons apporter de l'efficacité et les aider à rationaliser leur activité en introduisant notre culture d'entreprise. »
Prochain épisode : mercredi 28 mars.