La prise de commandes de Cargolux fait toujours débat et les syndicats sont sur leurs gardes. (Photo: Frédéric Humblet / archives)

La prise de commandes de Cargolux fait toujours débat et les syndicats sont sur leurs gardes. (Photo: Frédéric Humblet / archives)

Claude Wiseler, le ministre CSV du Développement durable et des Infrastructures, multiplie les séances d’explications pour justifier le «préjugé favorable» du gouvernement à l’égard de l’offre de reprise présentée par les Chinois de HNCA de la participation dans la compagnie de fret Cargolux. 

Il avait déjà informé vendredi les membres de la Commission du développement durable de l’avancée des négociations en vue de ce rachat, qu’il espérait encore boucler pour le mois de novembre.

Il a ensuite multiplié les interventions dans la presse, à coup de démentis sur les intentions du groupe chinois de délocaliser une partie de la flotte dans la province du Henan. Le ministre doit maintenant rassurer les partenaires sociaux, lesquels ne veulent pas jouer à nouveau les dindons de la farce comme ils le furent lors du «deal» avec le Qatar en 2011.

Catalogue remis sur la table

Claude Wiseler recevra mercredi après midi, successivement, une délégation de l’OGBL puis du LCGB pour entendre la position pas très enthousiaste des syndicats sur le candidat de prédilection. Le LCGB lui exposera notamment le catalogue des questions «en relation avec les problèmes actuels des sociétés Cargolux, Luxair et de l’aéroport» qu’il lui avait déjà présenté il y a un an, lorsque l’actionnaire qatari prit la poudre d’escampette en sortant du capital de la compagne de fret.

Un an après cette défection et le portage des actions par les actionnaires existants, en attendant un repreneur idéal (donc industriel), les craintes du syndicat restent entières.

Fuites d’informations

Ils se montrent d’autant plus préoccupés que des fuites d’informations sur le contenu des accords et la base des négociations entre Cargolux et HNCA ont laissé entrevoir chez les Chinois des intentions de délocalisations de la flotte, peu compatibles avec le plan d’affaires à court terme de la compagnie pour assurer sa survie et sauvegarder les emplois à l’aéroport.

Selon la Radio 100,7, il y aurait des désaccords au sein même de l’équipe dirigeante de Cargolux sur l’évolution des négociations avec HNCA. Richard Forson, le directeur général par intérim, est accusé de tenir seul le manche par une partie du management qui souhaiterait être davantage associé au tour de table.

Un tiers de la flotte sous pavillon chinois

Lundi, un document de travail de 12 pages remontant à juin dernier a fait aussi l’objet d’une fuite dans les médias. Il s’agit d’un projet d’accord commercial entre Henan Civil Aviation Development and Investment Co, Ltd (HNCA) et Cargolux ainsi que ses quatre actionnaires, Luxair, BCEE, SNCI et l’État luxembourgeois. Ce document porte sur la vente de 35% des actions de la compagnie, soit 3.489.926 parts ainsi que 1.395.928 obligations convertibles émises le 27 mars 2013.

Ce projet de deal prévoyait le soutien par le Luxembourg des ambitions de la province de Henan de développer sa plateforme en Asie pacifique à partir de l’aéroport de Zhengzhou Xinzheng International Airport.

Selon le document obtenu par paperJam, le programme de coopération entre les deux partenaires obligeait Cargolux à allouer au moins un tiers de sa flotte de Boeing à la plateforme asiatique. Un transfert de compétences vers le centre de maintenance du hub chinois était également dans les cartons.

Droit chinois

Plus inquiétant encore et dénotant d’un déséquilibre évident entre les négociateurs – la balance penchant davantage du côté chinois qu’en faveur du développement de l’aéroport de Luxembourg –, l’accord commercial devait dépendre du droit chinois et un éventuel litige être traité par un tribunal arbitral de Hong Kong.

Claude Wiseler a voulu minimiser la portée de ce document qui était selon ses dires «un document de travail» remontant au mois de juin et dont certaines dispositions ne seraient plus d’actualité.

On comprend mieux pourquoi, à la lumière de ce document, fut-il de travail, les négociations avec HNCA ont pris tellement de temps et suscitent autant d’inquiétudes, au sein même du management de Cargolux.