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Laurent Koener (Chambre de Commerce), Photo: Julien Becker) 

Trop souvent, au Luxembourg, la transmission d’une entreprise n’est pas optimale. La raison en est que les chefs d’entreprise ne pensent pas assez tôt à organiser la reprise future. «Au cours des 10 à 15 prochaines années, on peut estimer qu’environ 300 sociétés seront à transmettre annuellement», a détaillé Laurent Koener, conseiller au sein de l’Espace Entreprises de la Chambre de Commerce, en ouverture de  la table ronde «Céder ou reprendre une entreprise: comment faire?», organisée le 10 juin dernier dans le cadre du programme «Business Mentoring» initié par la Chambre de Commerce, en étroite collaboration avec la Luxembourg School for Commerce.

Un projet de cession, c’est avant tout une question de temps. Pour s’assurer de la bonne transmission de sa PME et mettre tous les atouts de son côté, il importe d’anticiper. «Une transmission peut prendre entre deux et dix ans. Donc, dès l’âge de 45 ou 50 ans, un patron doit déjà réfléchir à l’avenir, se poser les bonnes questions afin d’assurer la pérennité de son entreprise après son départ. A-t-il un enfant qui rependra ou veut-il vendre? Veut-il accompagner le repreneur durant quelques années ou souhaite-t-il se retirer immédiatement?» Cette première phase, pourtant primordiale, est souvent négligée, sans compter qu’il n’est pas facile de se séparer de son «bébé».

Une fois la réflexion entamée, le chef d’entreprise devra veiller à remettre de l’ordre dans ses affaires, afin de présenter la société sous son meilleur jour. Il convient aussi de réfléchir aux aspects juridiques, sociaux, financiers, fiscaux d’une transmission. Mieux vaut faire appel à des conseillers pour éviter bien des surprises et optimiser la transaction, qu’elle se réalise au sein d’une famille ou avec un tiers.

Se projeter dans l’avenir

Du point de vue du repreneur, le chemin est lui aussi semé d’embûches. «Il n’est pas vraiment différent de celui d’une création d’entreprise. Dans un cas comme dans l’autre, il faut oser, avoir les capacités nécessaires pour diriger une entreprise, la bonne formation et la connaissance du métier», a témoigné Marcel Hetto, directeur associé chez Luxplan et repreneur. «Le plus important, c’est le projet, les personnes qui le portent et la qualité du business plan», a ajouté Serge Thurm, conseiller de direction auprès de la Banque de Luxembourg. En la matière, une règle essentielle est encore une fois de bien s’entourer, l’une des pistes étant désormais celle du business mentoring qui permet à un entrepreneur en phase de création, de développement ou de reprise de bénéficier des conseils avisés d’un chef d’entreprise aguerri. Et le banquier d’ajouter une autre composante, financière celle-là. «Certes, en cas de reprise d’une entreprise saine, le banquier se trouve dans un état de confort plus grand que s’il s’agit d’une création, concède M. Thurm. Mais il faut garder aussi à l’esprit que les résultats du passé ne sont pas une garantie quant aux performances futures. Des fonds propres sont nécessaires dans la grande majorité des cas.» D’autres pistes de financement sont là pour aider les jeunes entrepreneurs. 

Enfin, la clé de voûte d’une bonne transmission est la fixation du prix juste. Souvent, un patron ne connaît pas la valeur de son affaire. Et si l’on peut se faire une idée approximative de la valeur d’une entreprise en se basant sur le chiffre d’affaires ou le résultat brut d’exploitation, l’intervention d’experts est souvent nécessaire. «Pour établir un prix, il va falloir étudier le bilan, voir si on trouve de l’immobilier à l’actif, ce qui, il faut en être conscient, n’est pas toujours un atout vu sa forte valorisation, a détaillé pour sa part Jean Hames, partner chez Ernst & Young. On va aussi étudier la probabilité que les clients restent, s’intéresser au carnet de commandes, aux projets en cours. Tout cela dans le but de se projeter au mieux dans l’avenir.» Un avenir qui se prépare dès maintenant.