Johan Van Overtveldt, ministre belge des Finances, assure qu'il abordera «officiellement» ces rumeurs avec Pierre Gramegna. (Photo: Conseil européen)

Johan Van Overtveldt, ministre belge des Finances, assure qu'il abordera «officiellement» ces rumeurs avec Pierre Gramegna. (Photo: Conseil européen)

Selon le journal économique belge L’Echo, le Luxembourg «s’obstine à conclure des rulings secrets». Dans son édition de mardi, le quotidien affirme que «certains indices font penser que le Luxembourg tente de nouveau de cacher au monde extérieur les accords fiscaux lucratifs conclus avec de grandes entreprises». Évoquant «plusieurs fiscalistes de renom», sans toutefois avancer de nom, L’Echo indique que «des entreprises très en vue concluraient depuis peu des accords ‘verbaux’ avec l’administration luxembourgeoise» et ce, «malgré l’indignation provoquée par les LuxLeaks».

Pour les fiscalistes interrogés par nos confrères, cette pratique serait «très préoccupante» car elle pourrait signifier «que le Luxembourg essaie d’éviter que les contrats formels, sur papier, soient portés à la connaissance d’autres pays». Toujours selon L'Echo, cette pratique supposée est remontée aux oreilles du ministre belge des Finances, Johan Van Overtveldt (N-VA), qui entend bien avoir un entretien avec son homologue, Pierre Gramegna (DP). «Si ces rumeurs sont confirmées, on peut se poser sérieusement des questions. (…) Nous allons aborder officiellement cette question avec le Luxembourg et demander des explications.»

Une intox qui ne correspond en aucun cas à ce qui se pratique.

Me Alain Steichen, avocat fiscaliste

Hasard du calendrier, les deux hommes se trouvent justement tous les deux à Bruxelles actuellement, dans le cadre d’une réunion de l’Eurogroupe ce mardi et d’une réunion de l’Ecofin mercredi… Du côté du ministère des Finances, les affirmations de L’Echo, reprises par l’agence Belga, laissent perplexe. «Ce qu’ils prétendent est un peu étrange et ne correspond en rien à la réalité», assure un porte-parole, qui souligne qu’«au niveau des administrations, quelles qu’elles soient, la transmission d’informations ou la conclusion d’accords se fait toujours par écrit, faute de quoi les engagements pris n’ont aucune valeur.»

Même son de cloche du côté de MeAlain Steichen, avocat fiscaliste au sein de Bonn Steichen & Partners. Faisant état «d'une intox» qui ne correspond «en aucun cas à ce qui se pratique, dans mon cabinet du moins», le spécialiste estime que ces allégations «peuvent être considérées comme des accusations mensongères». L’administration de la rue de la Congrégation précise pour sa part «appliquer depuis le début de l’année l’échange de données avec la Belgique de manière anticipée» et assure n’avoir pour le moment «aucune demande en attente de la part des autorités belges». En 2015, l'ACD a officiellement traité 726 rulings, selon le rapport annuel du ministère des Finances.

Les révélations liées aux LuxLeaks avaient amené les autorités européennes et internationales à accélérer différents mécanismes destinés à réduire l’opacité de certaines pratiques fiscales, notamment liées aux rulings. Outre l’échange automatique d’informations entre États qui entrera en vigueur en 2017, l’OCDE et le G20 ont plébiscité le plan Beps, acronyme désignant le programme visant à limiter l’érosion de la base d’imposition et au transfert de bénéfices. Un accord multilatéral présenté en février dernier par Pierre Gramegna «comme un élément important du ‘level playing feld’ en matière de fiscalité internationale».