Coup de tonnerre dans le ciel luxembourgeois : la Commission européenne a demandé au Luxembourg de mettre fin aux discriminations à l’encontre des travailleurs migrants et des membres de leur famille dans l’attribution de bourses d’études, d’aides financières aux volontaires et d’allocations dites de « boni pour enfant ».
L’affaire est on ne peut plus officielle : la demande de la Commission se présente sous la forme d’un « avis motivé » notifié en application de la procédure d’infraction de l’Union. Le Luxembourg dispose maintenant de deux mois pour y répondre. Si cette réponse n’était pas satisfaisante, la Commission pourrait décider de citer le pays devant la Cour de justice de l'Union européenne.
Libre circulation
Le dossier est évidemment très suivi, par les syndicats et par les milliers de frontaliers dont les enfants de plus de 18 ans, n’ayant plus droit aux allocations familiales, n’ont pas obtenu non plus le droit au système de bourses d’études versées par l’État aux jeunes effectuant des études supérieures.
Depuis 2010, des plaintes en série ont atterri au tribunal administratif de Luxembourg (saisi de dizaines de recours, il a posé la question préjudicielle à la Cour européenne de Justice) et à la Commission. Celle-ci a ouvert une enquête sur le texte législatif luxembourgeois, qui revient à imposer une condition de résidence pour l’obtention de ces prestations. « Il est probable que cette disposition lèse davantage les travailleurs migrants originaires d'autres États membres de l'Union que les travailleurs luxembourgeois, ce qui constitue une discrimination indirecte fondée sur la nationalité et contrevient donc à la législation européenne sur la libre circulation des travailleurs », note la Commission.
De gros enjeux politiques et financiers
Les enjeux financiers pourraient être énormes pour le gouvernement et l’impact politique ne serait pas anodin non plus – en particulier pour le ministre François Biltgen, père porteur de cette réforme - , s’il devait effectivement faire machine arrière, soit en octroyant aussi les bourses d’études aux enfants de travailleurs au Luxembourg, soit en diminuant les avantages accordés aux jeunes résidents, soit en rétablissant un système générique d’allocations familiales. Dans tous les cas, cela coûterait cher…
Le ministre François Biltgen ne cesse de plaider la cause de ce système d’aide financière mis en place par le Luxembourg. Il a par ailleurs plusieurs fois exprimé le souhait de maintenir ce système qui est selon lui « l'un des plus performants d'Europe ». A contrario, le nouveau coup de semonce européen, s’il ne met évidemment pas un terme à cette saga, s’apparente néanmoins à un début de camouflet pour l’État luxembourgeois.