En consultant le site internet www.guichet.lu, les dirigeants de BIP Investment Partners eurent la mauvaise surprise de voir que le Statec avait reclassé ses activités économiques selon la nomenclature statistique des activités économiques dans la communauté européenne (NACE). De société de participation financière qu’elle était, tel que ça ressortait d’une lettre de septembre 2011 du service de statistiques, elle fut placée dans la catégorie des Autres activités des services financiers, hors assurances et caisses de maladie, quelques mois plus tard sans en avoir été avertie au préalable.
Des échanges de courriers et une contestation de la part de BIP n’y changèrent rien; le Statec justifia son nouveau choix et campa sur ses positions en considérant BIP comme une société d’investissement, car la rubrique des soparfi est réservée aux entités détenant «les actifs d’un groupe de sociétés filiales et dont la principale activité est d’être le propriétaire de ce groupe». Le classement s’appuyait sur les derniers comptes annuels publiés au registre de commerce et des sociétés ainsi qu’une consultation du site internet de BIP. Il n’était donc pas question d’un reclassement dans la nomenclature initiale et d’ailleurs, le Statec estimait qu’il n’avait pas à demander l’avis de la société.
Un recours devant le Tribunal administratif fut donc introduit par BIP pour mettre en cause cette décision unilatérale du Statec. La procédure ne fut pas inutile dans l’avancée du droit qu’ont les sociétés à pouvoir intervenir auprès du Statec en cas d’erreur de classification. La juridiction a en effet considéré, en dépit des dénégations de la part des autorités, que le classement NACE s’analysait comme une décision administrative, et donc opposable, c’est-à-dire susceptible de pouvoir être mise en cause devant un tribunal et donnant des droits à l’administré, dont celui de l’information préalable. Ce dont le Statec avait fait l’économie, considérant qu’aucune loi européenne ni nationale ne lui en imposerait la communication.
Cotisations à la Chambre de commerce en arrière-fond
En toile de fond de ce litige entre BIP et le Statec se greffait la bagarre que s’étaient livrée de nombreuses soparfis avec la Chambre de commerce autour des cotisations obligatoires. Le conflit avait abouti à l’aménagement d’un statut très favorable aux sociétés de participations financières soumises à une cotisation forfaitaire très faible de 350 euros par an. Le reclassement de BIP lui valait de ne pas avoir droit à ce traitement de faveur.
Or, la réglementation luxembourgeoise est formelle (règlement grand-ducal du 8 juin 1979), exigeant que l’autorité se proposant de prendre une décision en dehors d’une initiative de la partie concernée doit l’informer de son intention en lui communiquant les éléments de faits et de droit qui l’amènent à agir et lui permettre de faire valoir ses observations.
Comme l’information est ressortie du contentieux, le Statec confirme en principe dans les trois mois aux sociétés l’attribution de leur code NACE à compter du classement. Mais il n’existe aucune information préalable au classement, le Statec se contentant parfois d’une information ex post, sans que ce soit d’ailleurs systématique.
Or, dans le cas de BIP une consultation préalable aurait permis au Statec de corriger son erreur, d’autant que le litige a montré que plusieurs écoles prévalaient dans la méthodologie de classement des activités économiques.
Résultat des courses: en privant BIP de présenter ses arguments préalablement à sa décision du reclassement et de contribuer ainsi à l’élaboration d’une décision «dans l’intérêt de toutes les parties concernées», le Statec a violé la réglementation. D’où l’annulation de sa décision.