Jean-Luc Dourson: «Le but n’est pas de faire ce qui a déjà été fait, mais au contraire de rechercher des expertises là où elles sont.» (Photo: DR)

Jean-Luc Dourson: «Le but n’est pas de faire ce qui a déjà été fait, mais au contraire de rechercher des expertises là où elles sont.» (Photo: DR)

Monsieur Dourson, vous inaugurez aujourd’hui officiellement votre nouveau laboratoire d’analyses médicales, dénommé Bionext Lab. Pouvez-vous tout d’abord nous rappeler la genèse de ce projet?

«Il y a à peine 6 mois, nous n’existions pas! C’est en fait grâce à l’application et à un énorme travail de toute une équipe – nous en sommes aujourd’hui à 120 collaborateurs déjà – que ce projet a pu voir le jour avec la création d’un nouveau laboratoire d’analyses médicales.

Si Bionext Lab est très jeune en termes de recul et d’historique, l’équipe qui le compose a par contre une longue histoire dans la biologie médicale, ce qui est très important pour notre expertise qui se trouve au cœur de notre métier.

Pour le reste, comme il n’a jamais été question de s’arrêter pour moi – j’y ai été forcé en 2014 –, j’ai souhaité tout naturellement me réinstaller. Repartir de zéro a finalement été une chance assez incroyable et c’est la réussite du partenariat avec le Centre hospitalier Émile Mayrisch (Chem) et la reprise des activités ambulatoires de cet hôpital qui a mené à la création de ce nouveau projet. Et au démarrage de Bionext.

La reprise du laboratoire du Chem, mais également celle du laboratoire Forges du sud…

«Oui. Pour le Chem, on n’a repris qu’une partie des activités ambulatoires du laboratoire, et non sa totalité. Pour Forges du sud, effectivement, c’est une reprise en tant que telle, mais nous le voyons plus sous la forme d’un partenariat parce que ces laboratoires utilisent les services de Bionext pour leurs besoins. Un peu comme une franchise. Et ce modèle peut être applicable éventuellement à d’autres laboratoires, y compris à l’étranger.

C’est pour cela que nous sommes plus enclins à parler de partenariat que réellement de rachat d’entreprise parce que ce n’est pas nécessairement le modèle que nous voulons développer.

Vous venez de rejoindre un marché où Ketterthill, que vous avez dirigé, et les Laboratoires réunis sont déjà bien implantés. Y a-t-il suffisamment de place pour tout le monde?

«Je pense qu’il y a de la place pour tout le monde à partir du moment où chacun a des éléments différenciants permettant d’offrir des services aux patients, à la population luxembourgeoise et aux cliniciens. Certes, on est dans un monde ultra-concurrentiel, mais nous ne souhaitons pas en fait entrer dans ce modèle de concurrence effrénée. Je crois que c’est un modèle du passé.

On souhaite dépasser ce stade et avoir une approche collaborative avec les professionnels de santé dans une recherche de complémentarité. Donc le but n’est pas de faire ce qui a déjà été fait, mais au contraire de rechercher des expertises là où elles sont, de pouvoir les associer aux nôtres, et de pouvoir proposer ensuite de nouveaux services, de nouveaux outils, et que tout cela soit guidé par l’innovation.

Comment vous différenciez-vous de vos concurrents? Que proposez-vous de plus?

«C’est justement là que se situe la différence. C’est que notre approche collaborative entre secteur privé et secteur public – alors qu’auparavant il y avait un cloisonnement vraiment important – est en phase de dépasser ce cloisonnement, et de dépasser nos intérêts propres, à chacun, pour trouver des synergies qui sont source d’économies d’échelle et d’optimisation de la prise en charge du patient.

Comme je l’ai déjà dit, l’idée n’est pas de refaire ce qui a été fait, mais de profiter de l’expertise existante sur le Grand-Duché – il n’est pas obligatoire d’aller nécessairement la chercher à l’étranger – pour renforcer celle qui nous est propre. Un exemple a été le Chem, un autre a été Forges du sud, mais on peut imaginer des partenariats avec le Laboratoire national de santé, avec d’autres institutions telles que l’Université du Luxembourg, mais aussi avec d’autres acteurs étrangers.

Quels sont les défis qui se posent aux laboratoires en général et à Bionext en particulier?

«Des défis, il y en a, et des enjeux aussi d’ailleurs! À vrai dire, nous sommes aujourd’hui dans un monde où il va falloir certainement repenser entièrement notre gamme de services en ambulatoire en introduisant une grande part de mobilité, tant dans la prise en charge des patients que dans les outils que nous mettons à leur disposition ainsi qu’à celle des médecins.

Cette part de mobilité doit être au cœur de notre métier et nous devons y songer au jour le jour dans tout ce que nous décidons d’innover. Parce qu’aujourd’hui toute la population est devenue très mobile, et les jeunes générations – très friandes des smartphones et de ces outils mobiles – font que nous devons dans le monde des laboratoires être compatibles avec ces solutions.

C’est d’ailleurs pour cela que nous avons lancé fin juin l’outil MyLab, qui est destiné aux patients, aux médecins mais aussi aux réseaux de soins infirmiers.

Le numérique est donc devenu important pour vous?  

«C’est un véritable enjeu puisqu’il y a un développement constant de l’e-santé au Luxembourg avec MyDSP, le dossier de soins partagé, avec lequel nous ne sommes pas concurrents mais bien complémentaires.

En outre, je pense que la dématérialisation des données va nous ouvrir de nouvelles portes, telles que la prescription électronique associée à un système expert, sans oublier les objets connectés orientés vers la santé. Ce sont vraiment des développements qui vont renforcer la mobilité des soins.

Vous évoquiez plus tôt d’éventuels partenariats avec des acteurs étrangers. Avez-vous des projets à l’international?

«Bionext a pour vocation de dépasser le cadre des frontières du pays et de pouvoir déjà proposer aujourd’hui une offre de gammes d’analyses à destination de l’étranger, grâce à notre département d’auto-immunité. C’est ainsi que nous traitons des échantillons en provenance de plusieurs pays de l’Union européenne.

Nous avons aussi pour vocation d’établir des partenariats avec des laboratoires étrangers, et donc soit c’est le modèle de franchise dont je vous parlais, soit c’est un partenariat plus classique pour importer au Luxembourg des activités que l’on ne souhaite pas développer localement, parce que l’expertise existe ailleurs.

Je peux citer par exemple le domaine du microbiote, qui est un domaine très à la mode aujourd’hui pour lequel nous sommes en phase de déploiement avec un laboratoire en Belgique.

Et d’autres partenariats de déploiement stratégique sont en cours, toujours à un niveau transfrontalier.»