Paperjam.lu

 

Dans la hiérarchie de toute organisation, on néglige trop souvent l’importance du middle management. Son rôle est pourtant crucial dans l’amélioration de la performance. Le middle management est essentiel, notamment, dans le relais des informations, afin d’assurer une réelle cohérence, un alignement entre les équipes et la vision stratégique développée par les dirigeants de l’entreprise. «Au cœur de sa fonction, un middle manager doit pouvoir traduire la stratégie d’entreprise, qu’il reçoit des niveaux supérieurs, auprès des employés. Dans un univers où le business évolue de plus en plus rapidement, la professionnalisation de ces fonctions est cruciale», explique Caroline Lamboley, HR director chez BDO. «Le middle manager est l’un des principaux vecteurs de transmission de la vision de l’entreprise et de ses valeurs auprès de tous les collaborateurs de l’organisation.»
Cela étant posé, la fonction dépasse néanmoins celle de simple intermédiaire. Le middle management, dans un monde économique compétitif et évolutif, est devenu hautement stratégique. Il appartient désormais à cette fonction d’être plus souple et réactive, mais aussi de disposer de compétences de leadership, qui permettent de retirer le meilleur des équipes. «La stratégie d’une entreprise n’est jamais figée. Dans un univers hautement concurrentiel, elle l’est d’ailleurs de moins en moins. Elle doit être adaptée en permanence, au risque de créer des décalages entre la vision développée par le top management et celle perçue par les équipes», commente Christelle Mescolini, responsable de l’Academy of Change et experte en change management au sein de MindForest Group. «À ce niveau, le middle management doit assurer une réelle cohérence à l’ensemble de l’organisation et, pour ce faire, construire du sens avec ses équipes dans un cadre défini.»
Le middle manager moderne n’est donc plus forcément un spécialiste, une pointure dans un domaine bien déterminé. Si ses compétences dans le métier lui confèrent une réelle légitimité, il doit aussi travailler sur toute une série de soft skills aujourd’hui indispensables. «Le plus souvent, un middle manager doit apporter une valeur ajoutée sur les aspects techniques, la gestion des équipes ainsi qu’au niveau commercial, poursuit Caroline Lamboley. S’il peut ne pas exceller sur ces trois facettes, il ne peut en aucun cas être mauvais dans l’une d’elles.»

Savoir bien déléguer

C’est la dimension technique qui, dans la plupart des cas, fonde sa légitimité. En tant que manager, il est le garant de la qualité du travail réalisé par ses équipes. S’il est expert, il doit donc pouvoir déléguer pour se concentrer sur les aspects exigeant un niveau de compétence plus avancé.  Le middle manager doit aussi être capable de motiver les membres de son équipe, les challenger. Le choix des managers est donc crucial. Alors que c’est encore trop souvent la compétence technique qui est à la base de la progression dans l’entreprise, le top management aurait tout intérêt à prendre en considération d’autres qualités, comme la capacité de certaines personnalités à motiver, à créer un climat dans lequel chacun se sent bien, à entretenir un sentiment d’appartenance à une organisation ou encore à mobiliser les énergies. «Il appartient au top management et aux équipes des ressources humaines de pouvoir identifier les personnes capables de faire avancer l’entreprise», explique Caroline Lamboley.

Bon communicant, le middle manager doit pouvoir disposer de la confiance des membres de son équipe, susciter leur engagement sans faille, tout en étant la personne sur qui tout le monde peut compter. «La capacité à communiquer est évidemment cruciale. Un manager doit avant tout pouvoir apporter un feed-back, qu’il soit positif ou négatif, à ses équipes. Il doit aussi être en capacité de recevoir les commentaires, en étant à l’écoute des avis des uns et des autres, précise Christelle Mescolini. La culture du feed-back, pour manager l’entreprise, est extrêmement importante. Cela doit devenir un réflexe dans le chef du manager. Il doit être dans le coaching. On a toujours beaucoup à apprendre des autres.»

Instaurer la culture du feed-back

On reconnaît la maturité du manager, mais aussi de son équipe, à la facilité des échanges en son sein. Le feed-back, le commentaire, l’échange d’idées doivent être à la base d’une saine émulation, les clés de voûte d’un processus d’amélioration continue. Cela exige du middle manager de pouvoir établir des relations justement équilibrées, en étant proche de ses collaborateurs tout en restant dans son rôle de manager. «Le manager doit pouvoir consacrer du temps à ses équipes, prendre du recul, sortir de la routine, établir des espaces de dialogue au cœur de l’entreprise», ajoute Christelle Mescolini. «Malheureusement, on est souvent trop pris par notre quotidien. L’échange, notamment, permet de faire émerger l’intelligence collective, de pouvoir impliquer le personnel dans le développement de l’entreprise, dans la recherche de la performance, en valorisant les idées de chacun. On constate rapidement, une fois que l’on s’y essaie, que le simple échange d’idées crée l’envie.»
Dans le chef du manager, on comprend vite qu’il s’agit avant tout d’une question d’attitude à adopter. Si l’aptitude à diriger une équipe, à motiver ses membres et à communiquer est innée chez quelques rares managers, pour beaucoup d’autres, elle exige de passer par de la formation. «Les personnes promues à des échelons managériaux doivent être accompagnées. Le plus souvent, elles disposent de compétences techniques. Notre rôle, en tant que manager RH, est de leur permettre d’acquérir des compétences de gestion d’équipe», explique Caroline Lamboley (BDO). «Ce sont des éléments auxquels il faut être vigilant, principalement quand ces personnes sont amenées à évoluer rapidement au sein de l’organisation.»

Un rôle de coach

Selon Christelle Mescolini (MindForest), «le manager de demain doit être un coach pour son équipe». Depuis quelques mois, en effet, le concept de management coaching revient de plus en plus régulièrement. Nébuleux aux yeux des managers, les principes de la discipline ne sont encore que peu appliqués.
Des formations moins complexes, de type gestion du temps, du stress, relatives à la prise de parole en public, sont encore privilégiées. «Un middle management efficient nécessite de prendre en compte ces aspects, mais il faut surtout donner au middle manager la capacité de prendre un peu plus de hauteur, d’adopter une attitude positive qui va rejaillir sur son équipe, pour qu’elle gagne en compétence et en efficience, qu’elle puisse développer une approche service minded», précise Caroline Lamboley. «De plus en plus de dirigeants d’entreprise se rendent compte de la valeur du middle management, notamment dans son rôle de moteur de l’entreprise, de la performance et du développement des équipes, en matière de rétention du personnel.» Car, c’est bien connu, on ne quitte jamais une entreprise, on quitte son manager.

Parce qu’il contribue fortement à la qualité de vie, à l’ambiance au cœur de l’entreprise, le middle manager doit être un relais sur lequel appuyer le changement. À ce titre, il doit être formé pour mieux accompagner le changement et même, idéalement, impliquer le personnel, stimuler la créativité qui peut amener à transformer l’organisation pour plus d’efficacité. «Parmi les compétences attendues du leader de demain, je vois une compétence nouvelle que l’on pourrait qualifier de ‘savoir-changer’, une combinaison d’attitudes, de qualités personnelles et de connaissances qui permettent de savoir changer de moule, remettre en question, voir plus loin, savoir mettre en scène des données de façons différentes pour les appréhender de façon nouvelle, détecter les opportunités. En fait, le ‘savoir-changer’ c’est cette capacité à se renouveler en permanence, à penser avec créativité», explique Christelle Mescolini.

Former au cœur de l’organisation

L’experte en change management voit encore une autre compétence clé pour les leaders de demain dans leur aptitude à effectuer une transition rapide. «Les leaders vivent de nombreuses transitions dans leur vie professionnelle, du coup l’aptitude à effectuer une transition rapide et efficace en arrivant dans un nouveau poste est devenue une compétence cruciale.»
S’il doit être coach, proche de son équipe, capable de travailler sur l’humain, le manager doit aussi pouvoir maintenir une frontière, sans quoi il risque de se dissoudre dans les besoins de son équipe. Son cap doit rester celui de l’entreprise avant tout, celui qui a été fixé par le top management.
Au-delà de la formation des managers, la culture du management de qualité peut être travaillée à l’échelle de l’organisation, afin d’y apporter une réelle cohérence au service de la performance. Des programmes de formation ou d’adaptation complets peuvent être imaginés, en fonction des problématiques effectivement rencontrées. «Aujourd’hui, quand vient la question de la professionnalisation du middle management, on se rend compte qu’il est plus efficace de travailler au cœur de l’organisation, de dispenser un savoir directement actionnable, de travailler avec des managers sur les problématiques qu’ils rencontrent», explique Christelle Mescolini.
Selon l’activité de l’entreprise, mais aussi sa taille, le middle management devra relever des challenges différents. Ce qui est certain, cependant, c’est qu’il doit contribuer à faire émerger des organisations plus participatives. De nos jours, de nombreux outils technologiques peuvent faciliter l’échange. Les réseaux sociaux, par exemple, mais aussi de nombreux autres outils collaboratifs, ont intégré l’entreprise et favorisent un meilleur travail en équipe. Mais ces outils, aussi efficaces soient-ils, ne remplacent pas le rôle du middle manager, dans la mesure où c’est lui qui doit donner l’impulsion, inviter à travailler ensemble, encourager l’utilisation des nouveaux outils. Le middle manager doit être un motivateur et adopter un rôle moteur.

Des outils variés
Plus de temps pour se former
Le manager doit donc répondre à de nombreux défis. Pour lui permettre de mener à bien ses missions, une des clés est d’augmenter la part de la formation au cœur de son temps de travail, et cela par la mise en place de dispositifs offrant en continu une palette variée d’outils.
«On peut penser aux formations classiques dispensées par des organismes de formation, vers lesquels on envoie son manager, explique Christelle Mescolini. Mais cela peut aussi prendre la forme d’espaces informels pour partager entre managers, c’est-à-dire des espaces d’échanges interdisciplinaires, transversaux, pour casser l’effet silo qui existe en entreprise. On peut aussi mettre en place des programmes de tutorat, profiter de plateformes d’e-learning, qui offrent une grande flexibilité.»
Dans la même veine, il y a les Mooc (Massive Open Online Courses) qui permettent d’appréhender la thématique de la formation sous l’angle de l’employabilité. Le manager a aussi sa part de responsabilité en ce qui concerne sa formation continue. Et les Mooc constituent une option simple pour accéder, de chez soi, à des savoirs diversifiés que l’on peut choisir seul, sans demander un accord de l’entreprise.

Collaboration
Le savoir, ça se partage
Aujourd’hui, le manager doit aussi travailler à l’employabilité des membres de son équipe. Il est révolu le temps où l’on gardait les compétences pour soi, où l’on ne partageait pas volontiers les savoirs, où l’on tenait à rester indispensable.
Le manager doit plus que jamais travailler en lien avec les équipes des ressources humaines, afin de veiller à la préservation de l’employabilité de chacun, mais surtout pour mieux faire progresser tout le monde. Il a pour rôle de partager ses compétences, afin de faire évoluer son équipe. Cette logique doit être développée dans l’intérêt de l’entreprise, car personne n’est irremplaçable et il est risqué d’appuyer toute son organisation sur des personnes clés. «Le savoir doit se partager et il appartient au middle management d’y veiller», résume Caroline Lamboley (BDO).