Pour les deux experts, «les chantiers couverts par le plan Beps représentent déjà des évolutions considérables». (Photo: Allen & Overy)

Pour les deux experts, «les chantiers couverts par le plan Beps représentent déjà des évolutions considérables». (Photo: Allen & Overy)

Cette convention transposera directement les dispositions adoptées par chaque État dans les conventions fiscales bilatérales de son choix, sans avoir à renégocier individuellement chacune d’elles, afin de réduire le plus rapidement et efficacement possible les opportunités d’évasion fiscale. Les dispositions de plus de 1.100 traités portant entre autres sur les dispositifs hybrides, les établissements stables, le détournement de la finalité des traités ou la résolution des conflits seront ainsi modifiées.

Que signifie concrètement la signature de la convention pour le Luxembourg?

«L’OCDE a publié, pour chacun des signataires, la liste des conventions bilatérales auxquelles s’appliquera la convention ainsi que les réserves et options choisies. En effet, à côté des dispositions mettant en œuvre les standards minimaux anti-Beps, la convention contient toute une série de mesures optionnelles ou pour lesquelles des réserves peuvent être faites.

Malgré le caractère «révolutionnaire» de l’instrument, ces nouvelles dispositions ne font, pour la plupart, que renforcer l’existant ou poursuivre le chemin amorcé au niveau national ou européen (par exemple concernant les dispositifs hybrides, visés par les récentes directives Atad).

Comment les acteurs du secteur financier doivent-ils s’adapter à cette nouvelle donne?

«En l’absence, à ce jour, de clarifications des autorités fiscales, les praticiens vont tout d’abord devoir établir précisément quelles dispositions s’appliqueront aux traités bilatéraux conclus par le Luxembourg. Des difficultés pratiques sont à anticiper: le Luxembourg s’est par exemple réservé le droit de ne pas appliquer l’intégralité de la règle anti-abus visant les établissements stables à ses conventions fiscales. L’Allemagne n’a en revanche pas exprimé de réserve sur ce point. Comment le traité entre ces deux pays sera-t-il modifié? Cette question se posera pour chaque disposition des 81 traités bilatéraux auxquels le Luxembourg souhaite voir s’appliquer la convention.

Nous analyserons notamment avec une attention particulière les dispositifs de restriction d’accès aux traités (règle de limitation des avantages (LOB) et règle du critère de l’objet principal (PPT)), qui auront un impact important sur les structures fonds d’investissement et private equity.

Faut-il ouvrir d’autres chantiers dans le domaine de la fiscalité?

«Les chantiers couverts par le plan Beps (et les formes prises par sa mise en œuvre au sein de l’UE) représentent déjà des évolutions considérables. En parallèle de cette régulation, voire uniformisation, des pratiques fiscales, la compétitivité du pays ne devra pas être négligée. La réforme fiscale 2017 s’est engagée sur une voie prometteuse en baissant par exemple le taux de l’impôt sur le revenu des collectivités, mais il existe encore de trop nombreux freins à l’investissement, comme la charge fiscale globale aux niveaux national et communal qui reste, malgré ces efforts, trop élevée, ou l’absence de régime de propriété intellectuelle.»