Beatriz Baena Jiménez (Photo: David Laurent/Wide)

Beatriz Baena Jiménez (Photo: David Laurent/Wide)

Madame Jiménez, quand on s’occupe de marketing et communication dans un groupe mondial tel que Deloitte, quelle est la marge de manœuvre au niveau local?

«Nous avons évidemment des guidelines assez contraignantes en termes de branding, de valeurs, de règles d’intégrité et d’indépendance. La nature même d’un de nos principaux métiers, l’audit, et le fait que la firme compte comme clients un bon nombre de grands groupes internationaux cotés en Bourse ne nous permettent évidemment pas de faire n’importe quoi. Ces guidelines assurent une homogénéité dans la perception de la firme partout dans le monde.
Mais nous avons tout de même pas mal de libertés quant au développement de chacune des entités locales du groupe, dans la mesure où chacun est susceptible de développer des gammes de services différentes. Au Luxembourg, nous en avons certaines qui ne sont pas aussi développées en Belgique ou en France. Nous avons donc cette marge de manœuvre qui nous permet de rester en prise directe avec les attentes et les besoins du marché local, que ce soient des clients existants ou des prospects.

Cela veut donc dire que vos campagnes de communication sont faites au Luxembourg?

«Il existe évidemment des campagnes ‘monde’, faites au niveau de l’entité Deloitte Global, à New York. Mais nous avons en effet la liberté de développer nous-mêmes notre propre campagne. C’est ce que nous avons fait l’année dernière, autour du concept d’anticipation. Nous avons, suite à un appel d’offres, fait appel à l’agence Binsfeld pour développer la campagne. Et comme elle a plutôt bien fonctionné, nous avons décidé de la reconduire cette année encore

Ces annonces publicitaires constituent-elles votre principal vecteur de communication?

«Pas nécessairement. Les annonces publicitaires cherchent avant tout à véhiculer notre image corporate et à accompagner une démarche qui est davantage construite avec les clients par le biais de la relation qu’entretiennent les partners de la firme chaque jour, sur le terrain, et qui leur permet de constituer des offres de services pertinentes par rapport aux besoins du marché.
Les services professionnels ne sont pas quelque chose qui se vend en disant ‘nous sommes les meilleurs’. Il faut promouvoir la valeur ajoutée que nous apportons aux clients et notre accompagnement à chacune des étapes importantes de leur quotidien, au travers des changements législatifs ou réglementaires. La campagne n’est qu’un support parmi d’autres. A nous, également, de faire connaître l’expertise de la firme par la publication d’études, d’articles, mais aussi des supports audiovisuels comme les podcasts sur notre site Internet.

Quelle est, justement, l’importance de ce site Internet dans votre stratégie de communication?

«Lorsque j’ai pris mes fonctions, il y a un an, nous venions juste de procéder à une migration de notre plate-forme web, en vue de la rendre encore plus attractive. Visuellement, elle est devenue plus attirante et régulièrement alimentée par des contenus variés, y compris des modules de formation via un système de webinars (contraction des mots web et seminar, ndlr.). Depuis cette migration, nous avons enregistré un bond de la fréquentation de notre site. Il faut dire aussi que dans chacune de nos communications extérieures, nous redirigeons les gens vers ce site. Nous avons également beaucoup travaillé dans le domaine du référencement pour les moteurs de recherche Internet.

Qu’en est-il de votre approche en matière de réseaux sociaux et de sites communautaires?

«Il y a deux points de vue qui cohabitent quand on considère les gens qui ne font pas partie de la génération Y: certains sont vraiment férus de ce genre d’outils et d’autres qui n’y voient aucune utilité. Chez Deloitte, en général, nous y voyons une utilité! Cela nous permet de promouvoir l’expertise de la firme via des groupes de discussion sur LinkedIn, par exemple.
Mais cela nous aide, aussi, à accroître la proximité de la relation que nous pouvons entretenir avec les ‘Alumni’ de Deloitte. LinkedIn, mais aussi Facebook, permettent de créer et d’entretenir de tels réseaux et de donner l’accès, à chacun de ces ‘anciens’, à des informations spécifiques de type études ou invitations à des conférences. Cela nous sert également à des fins de recrutement, puisqu’une grande partie des nouveaux employés de la firme arrivent en septembre, avec un profil junior, donc peu ou pas expérimenté, mais qui sont tous, aujourd’hui, de vrais digital natives. Il est donc essentiel de parler leur langage pour les intéresser, leur montrer que nous sommes une firme qui pourra répondre à leurs attentes et où ils ne se sentiront pas en décalage au niveau de la culture d’entreprise et des centres d’intérêt.

Cet intérêt pour les réseaux sociaux va-t-il jusqu’à des plates-formes plus instantanées telles que Twitter?

«On n’y est pas encore, mais il y a des réflexions, que ce soit au niveau local ou global. La difficulté reste de savoir ce qu’il est pertinent de communiquer via ce média qui n’autorise que des messages courts.

Et les applications mobiles?

«Il s’agit là, typiquement, de l’exemple où des réflexions et des développements peuvent être initiés au niveau local. Deloitte Luxembourg, mais aussi d’autres firmes locales, travaillent ainsi actuellement sur le développement d’une application iPhone que nous comptons lancer à l’automne prochain. Ce n’est pas quelque chose qui a été initié par Deloitte Global, mais à partir du moment où quelques entités locales proposeront ce type d’applications, il est probable que ce soit ensuite encouragé ailleurs.

Y a-t-il d’autres exemples d’initiatives nées au Luxembourg et qui ont ensuite été relayées au niveau du groupe?

«Je citerai, d’une certaine façon, le développement de nos webinars, qui sont des modules de formation que l’on peut suivre par le biais de conference calls, tout en ayant, à l’écran, le support Powerpoint du conférencier. Et pour ceux qui ne peuvent pas suivre la formation en direct, elle est disponible en podcast, également avec le support Powerpoint. L’idée, à la base, a été lancée par notre département formation, et nous l’avons ensuite implémentée via notre site Internet. A l’heure actuelle, il n’y a que Deloitte Luxembourg qui propose cet outil, mais beaucoup de personnes d’autres entités locales viennent s’y connecter et surtout, il est prévu que des intervenants d’autres entités y contribuent en tant que conférenciers.
Nous publions également, trois fois par an, un magazine dédié à l’investment management. Au départ, les articles n’étaient écrits que par les responsables de cette industrie au Luxembourg. Depuis, les contributions viennent de toute l’Europe et nous en assurons la mise en forme et la diffusion.

Votre fonction couvre également les besoins en matière de communication interne. Comment les choses s’organisent-elles dans ce domaine?

«Nous considérons chaque membre du personnel comme un vecteur de communication, un ambassadeur de la firme. C’est pourquoi il est essentiel pour nous que l’ensemble du personnel soit informé des initiatives internes et externes. Chacun doit pouvoir comprendre les objectifs stratégiques de l’entreprise, connaître son rôle dans leur accomplissement et la façon dont chaque action individuelle contribue à faire avancer l’entreprise dans une même direction.
Pour développer cette culture d’entreprise, nous travaillons à plusieurs niveaux. D’une part, par la communication interne en elle-même, via notre newsletter vidéo, notre intranet, des campagnes d’affichage dans notre bâtiment ou encore des présentations périodiques par le management des objectifs de la firme. D’autre part, par le développement d’un environnement de travail agréable et motivant, grâce aux nombreux événements de team-building que nous organisons, ainsi qu’à nos actions de responsabilité sociale dont un des objectifs est de veiller au bien-être des employés dans leur cadre de travail.

Avez-vous déjà eu l’occasion, depuis que vous avez intégré le département marketing communication il y a un an et demi, de noter des changements majeurs dans votre environnement?

«Il est clair que les supports commerciaux traditionnels, comme les brochures ou les slide decks, qui ont longtemps été les moyens de communication principaux, ne se suffisent plus à eux-mêmes. La promotion d’un service, quel qu’il soit, doit désormais se faire de façon plus riche et plus variée. Une brochure doit, ainsi, être accompagnée de forums sur notre site, voire de conférences, non pas sous le format d’un conférencier qui parle seul, mais quelque chose de bien plus collaboratif. L’échange et le débat avec les clients sont devenus primordiaux. Sans compter que tout va toujours de plus en plus vite. Aujourd’hui, il est essentiel d’être le premier à faire quelque chose.

Comment se profile la rentrée pour Deloitte Luxembourg?

«Notre souci permanent est de veiller à positionner notre firme comme étant le meilleur accompagnateur possible, au quotidien, pour les clients. Reste à déterminer par quel biais, ce qui alimente nos réflexions en continu. Nos priorités sont, aujourd’hui, notre  site Internet, les réseaux sociaux et la communication vidéo. Mais nous n’oublions pas non plus l’événementiel, pour aller directement à la rencontre des clients.
Nous allons également lancer, avec la Contemporary Art Society of London, des expositions temporaires d’art contemporain dans notre hall d’entrée. Il y en aura trois par an, la première étant prévue pour novembre.»

 

 

CV

Un nouveau défi

Agée de 38 ans, Beatriz Baena Jiménez, de nationalité espagnole, diplômée de la Solvay Business School (ULB, Bruxelles), compte déjà douze années de présence chez Deloitte Luxembourg, qu’elle rejoint en 1998 en tant que consultante, après une première expérience de plus de deux ans dans la filiale bruxelloise de Banco Santander Central Hispano.
Pendant douze ans, jusqu’en 2009,
elle officie en tant que consultante pour
de nombreux projets dans le secteur financier, en Belgique et au Luxembourg. D’abord membre d’une équipe de project management, sa carrière évolue jusqu’à occuper des fonctions de project manager. Elle est également responsable de formation (interne et externe) en méthodologie et outils de gestion de projet.
Mais après cette longue expérience,
elle décide de changer radicalement d’activité et accepte un nouveau défi,
en intégrant, en 2009, le service marketing et communication de la firme dont elle a rapidement pris la direction. Elle
y met en place une stratégie «markcom»
et accompagne le développement
de l’identité d’entreprise.  J.-M. G.