Les progrès à réaliser concernent aussi l'ergonomie et la diffusion des informations via les canaux digitaux.  (Photo: licence cc )

Les progrès à réaliser concernent aussi l'ergonomie et la diffusion des informations via les canaux digitaux.  (Photo: licence cc )

Un appel à un changement de business model. Si les banques luxembourgeoises veulent capter l’attention des nouveaux clients, les attirer et les garder, elles doivent profondément revoir leur processus et l’approche du marché via un filtre devenu transversal: le digital. 

Dans son benchmark «Improving the digital performance» consacré à 10 grandes banques présentes au Grand-Duché, Deloitte passe en revue l’état des lieux de la transformation digitale de ces institutions, tant des enseignes locales que des branches de groupes étrangers.  

Les résultats de ce premier benchmark du genre sont dévoilés en avant-première sur Paperjam.lu.

Processus d’intégration, contenu et fonctionnalités, design et ergonomie, navigation, sécurité informatique sont les cinq grands piliers d’évaluation parmi 140 critères auxquels ces banques ont été soumises.

Des leaders relatifs

Changements démographiques, apparition de nouveaux concurrents non traditionnels, obligations réglementaires à la hausse ou encore une pression sur les marges sont autant de facteurs qui compliquent l’environnement des banques, tant au Luxembourg qu'à l’étranger. S’y ajoute l’émergence d’une nouvelle génération de clients, moins fidèles, et enclins aux canaux mobiles pour utiliser les services bancaires.

«Les nouveaux clients présentent des attentes élevées et veulent véritablement que les services bancaires soient customisés à leurs besoins», déclare Esther Bauer, consultante chez Deloitte Luxembourg. «Nous avons décelé le besoin d’offrir des fonctions à valeur ajoutée, de mettre en place des alertes dédiées aux clients.»

Un défi, mais aussi une opportunité pour les banques qui sont répertoriées dans trois groupes au sein du benchmark de Deloitte: les leaders, les «medium perfomers» et les «subperformers».

Aucun acteur ne propose à ses clients une entrée en relation d’un bout à l’autre via le canal digital.

Pascal Martino, associé et digital leader chez Deloitte

«Les leaders luxembourgeois restent toutefois en dessous des bonnes pratiques mises en places à l’étranger», déclare Pascal Martino, associé et digital leader chez Deloitte Luxembourg. «Nous avons notamment remarqué que la phase de onboarding restait très compliquée et qu’aucun acteur ne proposait à ses clients une entrée en relation d’un bout à l’autre via le canal digital.»

Comment les grands acteurs peuvent-ils s’adapter dans ce contexte? Comment réagir face aux sociétés fintech qui émergent de plus en plus comme de sérieuses concurrentes? La réponse tient tant de l’adaptation de la structure interne qu’à de nouvelles initiatives en dehors du périmètre traditionnel de l’institution.

Le cabinet estime pourtant que 75% des personnes utilisent actuellement des solutions bancaires en ligne et que 45% des usagers le font aussi pour des solutions bancaires mobiles. Une tendance amenée à s’accroître dans les prochaines années.

Une tendance inéluctable qui devrait pousser les banques à progresser tant en termes d’informations fournies via les canaux digitaux que l’ergonomie même de leurs interfaces, deux autres éléments de progression relevés dans le benchmark.  

Les nouveaux acteurs ne doivent pas composer avec un héritage en dehors du digital.

Pascal Martino, associé et digital leader chez Deloitte

Le phénomène de la maison passive

«L’image du secteur de la construction peut être utilisée dans ce cas», ajoute Pascal Martino. «Les nouveaux acteurs construisent d’emblée des maisons passives, adoptent directement des approches digitales autour de l’utilisateur et ne doivent pas composer avec un héritage en dehors du digital. Pour les acteurs historiques qui possèdent une maison classe F ou G, il sera difficile, même en rénovant leur maison, de disposer d’un bâtiment passif.»

Outre une véritable révolution, l’optique choisie par certains acteurs, en France notamment, est de créer de petites maisons connexes qui présentent une approche digitale dès leurs fondations, soit une structure (spin-off) qui est considérée comme un laboratoire ou le rachat d’une entité (start-up) déjà existante.

«Personne n’a véritablement pris ce chemin-là au Luxembourg», ajoute Esther Bauer. «C’est plus délicat étant donné la taille du marché, qui est par ailleurs bien doté en termes de guichets physiques et autres agences.»  

Ne pas négliger la démographie

Depuis l’ouverture des premiers sites internet il y a 10 ans, les opérations en ligne proposées entre-temps, ainsi que la présence – relative aussi – sur les réseaux sociaux, c’est une nouvelle approche, systémique cette fois, qui est nécessaire.

«Il ne faut pas oublier que le Luxembourg présente une démographie positive qui amène de nouveaux habitants, d’origine étrangère, et donc de nouveaux clients qui ont de nouvelles attentes également», poursuit Pascal Martino.

Car si l’offre bancaire traditionnelle ne manque pas au Grand-Duché, sa population bien connectée est aussi approchée par des acteurs non bancaires, qu’ils soient locaux ou non.

Alors que le digital et les possibilités offertes par internet amènent des géants comme Google ou Kickstarter à considérer des services financiers, la question de la mutation digitale pour les banques dites classiques ne doit plus se poser. Il faut désormais se demander comment y aller.